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Madame Bovary

Mémoire : Madame Bovary. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  9 Février 2015  •  2 048 Mots (9 Pages)  •  619 Vues

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Flaubert n’est devenu une véritable « star » de la littérature mondiale que vers les années 1960-1980. En 1970, le Flaubert de Régis Debray-Genette (éd. Didier) favorisait cette prise de conscience en retraçant, textes à l’appui, la lente émergence critique de l’œuvre de 1870 à 1970. En fait, à quelques exceptions près (Maupassant, Théodore de Banville, George Sand, Baudelaire), les contemporains de Flaubert n’ont pas compris le sens et la nouveauté de son travail. Les moins défavorables le tolèrent moyennant de multiples réserves (Sainte-Beuve) ou en le réduisant pour l’annexer à une cause (Zola et les naturalistes). Les autres rejettent l’œuvre en bloc. Les années 1890-1920 font place à de nouvelles lectures philosophiques et psychologiques (Paul Bourget, J. de Gaultier, G. Lukacs, Henri James) beaucoup plus pertinentes. Mais c’est dans les années 1920 que Flaubert se trouve brusquement projeté sur la scène critique par Charles Dubos, Percy Lubbock, et surtout par Marcel Proust lors de la polémique qui l’oppose à ce sujet à Albert Thibaudet. A partir de cette époque, la publication de la correspondance et des œuvres de jeunesse renouvelle du tout au tout la lecture de l’œuvre : les études flaubertiennes (D. L. Dumorest, R. Dumesnil, G. Leleu, etc.) entrent dans une phase de reconnaissance institutionnelle et notamment universitaire. Il faut pourtant attendre l’après-guerre pour que commence à se dessiner l’horizon d’une réception critique plus dynamique : les textes d’E. Auerbach (1946), de Queneau (1947), de Sartre (1948), de Seznec (1949), de M. J. Durry et de G. Poulet (1950), de L. Bopp (1951) représentent une première vague de renouvellement, bientôt suivie par un intense travail de réexamen du corpus flaubertien. La phase qui s’ouvre en 1953 avec Le Degré zéro de l’écriture de R oland Barthes se solde rapidement par une multiplication et une diversification considérable des recherches : 1954 (Jean Pierre Richard, J.-B. Pontalis), 1955-1956 (G. Poulet, Georges Lukas), 1957 (Jorge Luis Borges, Ullmann, et une floraison de textes critiques pour le centenaire de Madame Bovary). Mais une nouvelle histoire de la critique flaubertienne commence avec les années 1960 : les travaux de Matignon, de Sartre encore, de J. Rousset en 1960, les nouvelles analyses de jeunes critiques comme R. Girard (1961), Fairlie, Bruneau, Sagnes (1962), M. Blanchot, Bollème (1963) se croisent avec l’impact d’une nouvelle édition des œuvres complètes par M. Nadeau. La seconde moitié des années 1960, sous l’influence des écrivains du « nouveau roman », donne à Flaubert une place prépondérante de « précurseur ». La montée du « mythe » Flaubert s’accompagne d’un prodigieux développement des études critiques en France avec l’apparition de la génération structuraliste et la mise au point de nouvelles méthodes d’investigation. Flaubert devient l’objet d’étude par excellence : 1966 (C. Gothot-Mersch, Brombert, G. Genette, Sartre), 1967 (Michel Foucault, Bart, Cento, J. Proust). A partir de 1968, il devient presque impossible de citer les critiques français et étrangers qui contribuent, parfois de manière considérable, à la relecture de l’œuvre de Flaubert ; tandis que les pionniers continuent à donner des travaux de plus en plus importants. L’Idiot de la famille que Jean-Paul Sartre publie en 1971-1972 pourrait en être le symbole : près de trois mille pages d’une vision renouvelée de la psychologie et de la création flaubertiennes. Mais les années 1970-1980, ouvertes par le centenaire de L’Education sentimentale et par la nouvelle édition des œuvres complètes par M. Bardèche au Club de l’honnête homme (1971-1975), se caractérisent assez vite par une mutation des recherches flaubertiennes : en profitant des acquis de la « nouvelle critique » (textanalyse, socio-critique, narratologie, etc.), un petit groupe de chercheurs crée en 1978, sous l’impulsion de R. Debray-Genette, une équipe internationale de recherche sur les manuscrits de Flaubert, à l’institut des textes et manuscrits modernes (Centre National de la Recherche Scientifique)). Sans abandonner la perspective critique, l’accent est mis sur l’analyse des « avant-textes », des brouillons, des documents de genèse qui permettent d’étayer l’interprétation des œuvres sur une meilleure intelligence des techniques et des projets de l’auteur. En 1980, un ouvrage collectif, Flaubert à l’œuvre, donne une première idée de ce nouveau type d’investigation qui ne cesse de démontrer, depuis lors, sa vitalité aussi bien du côté de l’édition que de la critique. Une grande réédition à la Bibliothèque de la Pléiade est désormais en cours de réalisation (par G. Sagnes et C. Gothot-Mersch), et d’importants ensembles de manuscrits flaubertiens deviennent accessibles (Les Carnets de travail). Parallèlement à ces éditions, les études de génétique et de narratologie de R. Debray-Genette (Métamorphoses du récit), de linguistique par A. Herschberg-Pierrot (sur le Dictionnaire des idées reçues), de psychanalyse par J. Bellemin-Noël, J. Bem, P. Willemart, de socio-critique par C. Duchet, F. Gaillard ou de thématique par A. Masson se combinent avec des approches pluridisciplinaires comme celles de J. Neefs et C. Mouchard, Y. Leclerc, P.-M. de Biasi, etc. Tous ces travaux mettent à jour, entre le Flaubert de la correspondance et celui de l’œuvre, un troisième Flaubert : l’écrivain aux prises avec ses rédactions, tel qu’on le trouve dans les 25 000 pages de manuscrits qu’il nous a légués.

Le « système » de Flaubert :

La nouvelle poétique inaugurée par Flaubert n’est pas fondée sur les présupposés d’une doctrine ou d’une école littéraire, ni sur une vision du monde singulière qui serait celle de l’auteur. Elle résulterait plutôt d’une série passablement formelle de « contraintes » que Flaubert s’est progressivement donnée pour écrire et qui ont fini par se traduire en termes de méthodes de travail.

Impersonnalité. La notion d’impersonnalité comme critère d’évaluation des œuvres littéraires apparaît assez tôt dans la Correspondance (1845-1846), à une époque où Flaubert est en train de s’interroger sur le sens de ses premiers écrits de jeunesse, fortement influencés par le romantisme. Le jeune écrivain se rend compte que la plupart des grands textes qu’il admire (Homère, Shakespeare, Cervantès, etc.) se caractérisent par l’absence à peu près complète de la personnalité de l’auteur. L’ةducation sentimentale de 1845 est d’ailleurs consacrée à l’histoire d’un jeune homme qui rompt avec l’inspiration romantique pour devenir un grand artiste. Malgré cette prise de conscience, la véritable rupture n’intervient que vers 1850-1852,

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