Lys Dans La Vallée
Fiche de lecture : Lys Dans La Vallée. Recherche parmi 298 000+ dissertationsPar dissertation • 17 Avril 2013 • Fiche de lecture • 866 Mots (4 Pages) • 728 Vues
Le pacte en vertu duquel les enfants cachent leurs peccadilles et qui leur apprend déjà l'honneur, fut nul à
mon égard ; bien plus je me vis souvent puni pour les fautes de mon frère sans pouvoir réclamer contre cette
injustice ; la courtisanerie, en germe chez les enfants, leur conseillait−elle de contribuer aux persécutions qui
m'affligeaient pour se ménager les bonnes grâces d'une mère également redoutée par eux ? était−ce un effet
de leur penchant à l'imitation ? était−ce besoin d'essayer leurs forces ou manque de pitié ? Peut−être ces
causes réunies me privèrent−elles des douceurs de la fraternité. Déjà déshérité de toute affection, je ne
pouvais rien aimer et la nature m'avait fait aimant ! Un ange recueille−t−il les soupirs de cette sensibilité
sans cesse rebutée ? Si dans quelques âmes les sentiments méconnus tournent en haine, dans la mienne ils se
concentrèrent et s'y creusèrent un lit d'où plus tard ils jaillirent sur ma vie. Suivant les caractères, l'habitude
de trembler relâche les fibres, engendre la crainte et la crainte oblige à toujours céder. De là vient une
faiblesse qui abâtardit l'homme et lui communique je ne sais quoi d'esclave. Mais ces continuelles tourmentes
m'habituèrent à déployer une force qui s'accrut par son exercice et prédisposa mon âme aux résistances
morales. Attendant toujours une douleur nouvelle, comme les martyrs attendaient un nouveau coup, tout mon
être dut exprimer une résignation morne sous laquelle les grâces et les mouvements de l'enfance furent
étouffés, attitude qui passa pour un symptôme d'idiotie et justifia les sinistres pronostics de ma mère. La
certitude de ces injustices excita prématurément dans mon âme la fierté, ce fruit de la raison qui sans doute
arrêta les mauvais penchants qu'une semblable éducation encourageait. Quoique délaissé par ma mère, j'étais
parfois l'objet de ses scrupules, parfois elle parlait de mon instruction et manifestait le désir de s'en occuper ;
il me passait alors des frissons horribles en songeant aux déchirements que me causerait un contact journalier
avec elle. Je bénissais mon abandon, et me trouvais heureux de pouvoir rester dans le jardin à jouer avec des
cailloux, à observer des insectes, à regarder le bleu du firmament. Quoique l'isolement dût me porter à la
rêverie, mon goût pour les contemplations vint d'une aventure qui vous peindra mes premiers malheurs. Il
était si peu question de moi que souvent la gouvernante oubliait de me faire coucher. Un soir, tranquillement
blotti sous un figuier, je regardais une étoile avec cette passion qui saisit les enfants, et à laquelle ma précoce
mélancolie ajoutait une sorte d'intelligence sentimentale. Mes soeurs s'amusaient et criaient, j'entendais leur
lointain tapage comme un accompagnement à
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