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Les Grandes Marées

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Par   •  19 Février 2014  •  3 086 Mots (13 Pages)  •  1 142 Vues

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Thème récurrent de l’univers de Jacques Poulin, présent en particulier dans Les grandes marées, la douceur se révèle fort complexe dès lors qu’on en esquisse la portée sur les plans physiologique, psychologique et moral. Si le couple permet à Teddy Bear de trouver à même son tempérament doux une forme d’épanouissement, que le rapport à la nourriture vient figurer, la reconstitution d’une petite société dans l’île Madame invertit sa douceur en handicap qui l’isole et le transforme en bouc émissaire. Au fur et à mesure que l’île se peuple, l’agressivité s’accroît, apparaissant comme un des fondements de toute société. Mode d’être sans valeur, enjeu moral réduit à l’insignifiance, la douceur tenace de Teddy Bear constitue une forme de désespoir qui vient consacrer l’incapacité du personnage à vivre en société.

Abstract

Food, Sweetness and Despair in Les grandes marées by Jacques Poulin

Sweetness, which is a recurrent theme in Jacques Poulin’s novels, is in fact very complex when one looks at it, as in this article on Les grandes marées, at the physiological, psychological and moral levels. If the couple gives Teddy Bear the opportunity to find out, with his sweet temper, a form of well-being, symbolized in his relation to food, the re-creation of a small society on the île Madame turns his sweetness into a handicap that isolates and transforms him in a scapegoat. As the population of the island increases, so, too, does aggressiveness, which seems like one of the foundations of any society. A way of life without value, or a moral issue reduced to insignificance, Teddy Bear’s stubborn gentleness becomes a form of despair that reveals his inability to live within society.

Resumen

Alimento, dulzura y desesperación en Les grandes marées, de Jacques Poulin

Tema recurrente del universo de Jacques Poulin, particularmente presente en Les grandes marées, la dulzura se revela como muy compleja en cuanto uno esboza el alcance en los planos fisiológico, psicológico y moral. Si bien la pareja permite a Teddy Bear encontrar en su mismo temperamento dulce una forma de plenitud, que la relación con la comida viene a figurar, la reconstitución de una pequeña sociedad en la isla Madame muda su dulzura en desventaja que lo aísla y lo transforma en chivo expiatorio. A medida que se va poblando la isla, aumenta la agresividad, apareciendo como uno de los fundamentos de cualquier sociedad. Manera de ser sin valor, apuesta moral reducida a l insignificancia, la dulzura tenaz de Teddy Bear constituye una forma de desesperación que viene a consagrar la incapacidad del personaje a vivir en sociedad.

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Que Teddy Bear, le personnage principal des Grandes marées, soit, comme la plupart des personnages de Poulin, un homme doux, dépourvu d’agressivité, au point de paraître passif et même peu viril, se passe de démonstration. La douceur, comme la tendresse, est une des caractéristiques les plus évidentes et les plus ressassées de l’univers de l’auteur, et la critique se fait un devoir de rappeler ce lieu commun inévitable. Or, plutôt que d’être l’expression d’une certaine mièvrerie de la vie sentimentale, la douceur se trouve associée à la mort chez Poulin, comme le dit très explicitement Noël dans Le coeur de la baleine bleue : « [L]a mort c’est la dernière étape de la douceur. La mort, c’est la douceur absolue [1]. » La mort révèle que la douceur est bien plus qu’une simple disposition de sentiment, plus qu’un trait de caractère ; elle est surtout un état d’esprit, une manière d’être dans le monde, un enjeu d’ordre existentiel duquel peut surgir le désespoir le plus grand. De tous les personnages doux de Poulin, seul Teddy Bear en vient à mourir ; il est le seul à expérimenter ce passage de la douceur à la mort représenté allégoriquement par le refroidissement progressif et irréversible de son corps qui l’amène à ressembler à la statue de pierre de l’île aux Ruaux où il échoue à la toute fin du roman — il est le seul à entrer dans la mort, à laquelle on l’accule par le moyen d’un meurtre symbolique, en raison d’une douceur trop constante et trop entière pour être tolérée par autrui.

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Encore faut-il, pour pouvoir saisir comment la douceur mène à la mort, et pourquoi la mort survient sous la forme d’un lynchage dans Les grandes marées, en savoir un peu plus sur la douceur elle-même. Son aire sémantique est plutôt vaste, qui va du domaine concret des sens à celui plus abstrait des qualités et des valeurs.

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Dérivé du vieux mot dulz (doux), provenant étymologiquement du latin dulcis, le terme douceur concerne d’abord le sens du goût, puis les quatre autres sens. Ce qui est doux est apparenté à ce qui est sucré, comme le miel, et s’oppose ainsi à ce qui est amer, acide, fort ou piquant ; au toucher, il désigne le lisse, le souple, le soyeux, comme peuvent l’être la peau ou un tissu ; à l’ouïe, il renvoie à quelque chose de peu sonore, d’harmonieux ou de mélodieux ; à la vue, il est associé à une lumière peu intense, tamisée ; à l’odorat enfin, il se rapporte à ce qui est peu prononcé ou suave. Le doux est immanquablement agréable, donne un plaisir modéré et délicat, s’oppose à toute sensation forte ou excessive. La douceur de vivre est une forme de bonheur, essentiellement un bien-être, un état de satisfaction dont on peut jouir de façon mesurée et paisible.

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Si la douceur appliquée aux choses renvoie à une qualité ou à une propriété d’ordre physiologique, elle définit une qualité ou une propriété d’ordre psychologique lorsqu’elle est appliquée aux personnes. La douceur est ainsi un trait de caractère, une manière d’être et de réagir qui détermine la personnalité psychologique d’un individu : on est doux de tempérament quand on ne heurte ni ne blesse personne, quand on n’impose rien à quiconque, quand on ne se met pas en colère. Être doux, c’est être patient, conciliant, dépourvu d’agressivité, voire inoffensif. Mais la douceur appliquée aux personnes ne renvoie pas seulement à une qualité ou propriété psychologique, elle peut aussi constituer une valeur et ainsi être l’objet d’une recherche et d’une promotion s’effectuant tant dans la vie individuelle que dans la vie sociale. Placée sous le signe de la maîtrise de soi, la douceur s’allie alors aux vertus de tempérance, de tolérance et d’indulgence ; cette

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