Lecture Analytique - Des Cannibales, Montaigne

« Des Cannibales », I, 31, page 316

I. Montaigne, témoin de la rencontre

L’information dont il est question dans cet extrait peut être résumée ainsi : « Trois d’entre eux, […] se trouvèrent à Rouen au moment où le feu roi Charles IX y était. » Le reste de cette longue phrase est consacré au développement de deux longues propositions : l’une introduite par le participe présent et l’autre par l’adjectif qualificatif « malheureux ».

Deux mots qui résument le destin des Indiens, tel que Montaigne le perçoit, un peu moins d’une centaine d’années après avoir assisté à cette rencontre à Rouen. On estime en effet que cette Essai a été rédigé vers 1578.

Montaigne adopte d’emblée un regard de compassion sur ces Indiens victimes d’une ignorance qui n’est pas absence de savoir mais plutôt méconnaissance du monde ancien. « des corruptions de ce côté-ci de l’océan » (l2)

En revanche, cette ignorance causera leur perte irrémédiable (l3-4) « leur ruine (comme je présuppose qu’elle est déjà avancée.) »

Deux mondes s’opposent le « côté-ci de l’océan » « le nôtre », celui de la tromperie et du vice, et l’autre, celui des Indiens que caractérise « la douceur de leur ciel. » (l5)

Témoin dans un premier temps de l’évènement, Montaigne raconte comment on veut éblouir les Indigènes en leur faisant admirer les beautés de la ville : le roi pose l’implicite que tout, ou du moins beaucoup de choses, sont surprenantes et admirables.

Pour répondre à cette question limitée, les Indiens déplacent le propos à ce qui leur a semblé étrange. (l11) et donc éloigné d’eux et de leurs coutumes. Leur étonnement souligne deux questions fondamentales :

- La question du pouvoir, hérité par un enfant de dix ans.

- La question de la répartition des richesses, plus développée, et plus précise et qui dénonce l’inégalité entre eux. (l16) « Qui sont remplis et gorgés de toutes sortes de bonnes choses » et qui montrent l’excès et l’avidité et en face la pauvreté des mendiants « décharnés par la faim et la pauvreté. »

Richesse et pauvreté sont vus de manière réaliste et matérielle et l’étonnement des Indiens va jusqu’à ne pas comprendre comment de telles inégalités ne conduisent pas les pauvres à se révolter.

En tout cas, c’est-ce qui se passerait dans leur société à eux, transformant l’inégalité en justice et rendant ainsi la violence légitime.

II. Montaigne, acteur de l’entretien

Le 2ème paragraphe met en scène Montaigne qui n’est plus seulement témoin mais acteur puisqu’il discute avec l’un des Indiens, et non des moindres, puisqu’il s’agit d’un personnage important, peut-être même d’un roi, contribuant ainsi à un parallélisme dans les situations (Roi Charles IX -> Roi Indien). Les questions ouvertes peuvent sembler naïves et superficielles mais les réponses de l’Indien abordent franchement la question du pouvoir :

- Un bon chef conduit au combat des milliers d’homme en prenant leur tête, preuve de courage et d’intelligence stratégique.

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