Le Roman - invention.

Tim et moi étions attablés devant un verre d'eau. Nous n'avions pas les moyens de nous offrir un petit déjeuner normal et les factures impayées commençaient à s'entasser sur la table du salon. Il était grand temps que mon frère trouve un emploi ou nous finirions à la rue. Mais Tim se résignait à me dire qu'il était détective privé, ce qui est totalement insensé puisque même des chiens policiers ont probablement résolu plus d'affaires que lui. Je bus une gorgée d'eau. Nous étions au fond du trou et il ne nous restait plus beaucoup de temps pour remonter. Tim, les yeux dans le vague, ouvrit la bouche et entreprit de parler.

"Tu as peut-être raison. Les gens ne demandent plus les services d'un détective privé aujourd'hui. Je vais me trouver un travail plus rentable."

Je fus tellement content qu'il se décide enfin à se comporter comme un jeune homme de 21 ans que je ne répondis même pas. Il prit un journal sur la table et l'ouvrit à la page des offres d'emploi. Malheureusement, celui-ci datait d'il y a 6 mois, mais mon frère ne parut pas s'en apercevoir et parcourut la page des yeux. Il s'arrêta sur une annonce et la lut.

"'Cherche vendeur souriant et parlant plusieurs langues pour nouvelle boutique de souvenirs quartier Hampstead.' Tiens, mais c'est exactement ce qu'il me faut, clama-t-il. Allez, c'est parti Nick. Nous allons à Hampstead."

Je faillis l'empêcher de postuler pour cet emploi mais, après tout, si l'employeur était aussi idiot que mon frère, peut-être que tous les défauts de Tim passeraient inaperçus. Mon frère ne parlait pas un mot des principales langues européennes comme le français ou l'allemand, et il était tellement naïf que n'importe qui pourrait l'arnaquer et la boutique ferait faillite en à peine deux mois. Néanmoins, il faut toujours tenter sa chance, c'est pourquoi mon frère et moi prîmes le métro dès onze heures en direction de Hampstead. Tim avait emmené le journal pour avoir l'adresse avec lui. Il avait ressorti son vieux complet en lin et espérait probablement faire bonne impression avec, mais la veste possédait plus de trous que de boutons et des mites avaient élu domicile dans le pantalon. Bref, Tim faisait un peu pitié dans cette tenue mais je ne lui dis rien pour ne pas le vexer. Nous trouvâmes sans mal la boutique à l'adresse mentionnée dans l'offre. Elle donnait dans une ruelle sombre et assez peu fréquentée. Quand nous arrivâmes, un homme à l'air pressé sortit de la boutique et nous salua discrètement en passant devant nous. Il passa le coin de la rue alors que nous approchions de l'entrée. Quelques néons sales éclairaient une vitrine dans laquelle se trouvaient surtout des gagdets et bijoux en plastique, bariolés et de mauvaise qualité, pour la plupart portant l'inscrption "I love London". En voyant les prix, j'ouvris de grands yeux. Tim, à côté de moi, siffla. Sauf qu'il ne savait pas siffler. Un son étrange et quelques postillons sortirent de sa bouche, mais je compris qu'il avait vu la même chose que moi. C'était un piège à touristes. La boutique ne devait pas marcher fort. Je poussai la porte en laissant Tim s'adonner à la contemplation des accessoires de pacotille. Une petite clochette défraîchie carillona à mon entrée. Une odeur de renfermé flottait à l'intérieur. Mes pieds évoluaient sur un parquet crasseux et jonché d'emballages. Sur les murs, je parvins à distinguer dans la pénombre touts sortes d'objets plus surprenants les uns que les autres: des chaussettes ornées de l'Union Jack, une chope rouge avec le portrait de la reine, et tant d'autres choses farfelues. Je passai un angle et m'approchai du comptoir. L'homme qui s'y trouvait avait la tête baissée et ne broncha pas quand je m'approchai de lui. La trentaine, une chemise à carreaux et des cheveux frisés, sa peau était plutot pâle. Il ne devait jamais sortir de sa boutique.

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