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Le Roman Algérien

Commentaire d'oeuvre : Le Roman Algérien. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  3 Décembre 2014  •  Commentaire d'oeuvre  •  5 058 Mots (21 Pages)  •  524 Vues

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Né dans le contexte colonial, le roman algérien de langue française constitue dès son émergence un espace d’écriture de « soi par soi » face à la masse des écrits colonialistes. C’est dans ce sens que la question de l’identité se place au cœur de cette production romanesque, production qui représente l’exemple et l’exemplification d’une identité culturelle en évolution. Dès lors le questionnement identitaire, notamment comme motif thématique constant, est apparu. Il est resté présent dans les créations jusqu’à nos jours. Le basculement que connaît l’Algérie en ce tournant du siècle trouve [3], en partie, son origine dans une certaine crise identitaire héritée de l’Histoire.

À travers la lecture qui suit, la question identitaire est posée dans une perspective historico-culturelle et dans un cadre littéraire. Cette synthèse tenterait de remonter le temps depuis « l’impasse coloniale [4] » jusqu’à nos jours en faisant références à quelques œuvres [5] qui nous semblent représentatives et exemplatives. Sans aspirer à l’exhaustivité ni à l’approche détaillée, cette lecture se veut une vision d’ensemble [6] : nous proposons un cheminement indicatif et annoté de la présence et de la manifestation de la question de l’identité dans la création littéraire et notamment dans le roman ici retenu comme forme d’expression culturelle.

Un basculement problématique et générateur

L’espace géographique algérien a été une terre d’impérialisme [7] à répétition le long de ces deux mille ans derniers. De l’empire romain à l’invasion vandale et byzantine, en passant par les conquêtes arabo-musulmanes, la présence ottomane et la colonisation française, l’Algérie a connu une suite de ruptures et d’effacements identitaires. Sa nomination perpétuellement changeante en est le témoignage et l’attestation : on connaît « la perte du nom » (nomination de l’extérieur) que connait le Maghreb depuis l’ère numide jusqu’au recensement administratif colonial (français) vers 1870 [8]. Cette dernière phase coloniale nous intéresse particulièrement puisqu’elle coïncide avec la naissance du roman algérien et trouve une influence majeure et palpable encore aujourd’hui.

Colonie de peuplement puis département français, l’Algérie qui voit sa naissance dans ses contours actuels [9] – administrativement et géographiquement – se trouve confrontée à la question identitaire que pose et impose le projet colonial – assimilationniste et ségrégationniste – prôné par l’administration française. Cette réalité historico-politique marquée par une volonté d’acculturation [10], se développe fortement à partir du tournant des années 1920 sous l’impulsion du travail administratif et éducatif (l’école) en extension. C’est à ce moment qu’on voit naître les premiers romans écrits par des Algériens indigènes (arabes, berbères, juifs [11]). La lecture de ces romans dits « à thèse » ou d’« assimilation [12] », renseigne sur un déchirement ou un dédoublement – voire un triplement – identitaire qui se trouve traduit dans les fictions romanesques où le parcours des personnages se mue couramment en « quête d’identité ». Ces quelques rares auteurs sont présentés comme des modèles [13] de réussite de la politique assimilationniste associée à une « mission civilisatrice » ; ils ont à ce titre bénéficié de l’appui du courant « algérianiste [14] ».

Ce tournant des années 1920 et 1930 nous semble fondamental dans la mesure où l’avenir même de « l’Algérie française » se trouve posé en termes d’identité comme en témoignent les projets politiques en cette période [15]. Cette question identitaire trouve un écho manifeste dans les écrits littéraire algériens successifs si on doit inclure notamment les auteurs représentatifs de « L’École d’Alger [16] » qui se sont « démarqués » de l’algérianisme qui présentait une identité algérienne de souche principalement « latine », pour écrire une Algérie aux origines et aux identités complexes, mêlées et métissées [17]. Néanmoins, bien qu’ancrés dans le sol algérien, les écrits des auteurs de L’École d’Alger « privilégiaient » une certaine méditerranéité d’orientation « latine » et « séparée » des autres dimensions constituantes de l’algérien. Ces orientations exclusives trouvent d’ailleurs une résonance critique dans l’essai de Jean AMROUCHE, L’Eternel Jugurtha [18] où il est question de l’ancrage et du comportement identitaire de l’Algérien :

Le Maghrébin moderne combine dans un même homme son hérédité africaine, l’Islam, et l’enseignement de l’Occident […]. Il prend toujours d’autrui, mimant à la perfection son langage et ses mœurs ; mais tout à coup les masques les mieux ajustés tombent, et nous voici affrontés au masque premier : le visage de Jugurtha […] dans l’île tourmentée qu’enveloppent la mer et le désert, qu’on appelle le Maghreb [19].

AMROUCHE associe la dimension géographique à la dimension historique et insiste sur l’ancrage « héréditaire » de l’identité algérienne en convoquant la figure de Jugurtha. Néanmoins, cet ancrage n’est pas fermé à l’évolution et aux acquisitions, donc à la « modernité » : l’identité est faite d’assimilation et d’effacement perpétuels à l’image de l’espace algérien travaillé par ses deux constituantes géographiques mouvantes : la mer et le désert. Ouverte et multiple, la personnalité algérienne s’avère ainsi façonnée par trois dimensions qui se « rencontrent » et s’associent : l’africanité, à savoir la berbérité ; l’arabo-islamité ancrée par la présence et l’influence de la religion musulmane portée par la langue et la pensée arabes ; et l’influence de la présence française, notamment à travers le « passage » à l’écriture – du roman – en langue française. Impulsée par un contexte colonial qui se définit essentiellement par la domination d’une identité par une autre, cette « question-quête » identitaire se trouve de la sorte convertie en entreprise de réflexion et d’écriture qui se constitue en contre-discours : l’identité de l’écriture porte le reflet de l’identité culturelle comme on pourrait pertinemment le constater à travers l’œuvre de Jean AMROUCHE située à la croisée des langues et des traditions littéraires [20].

L’accélération de l’Histoire : la nécessité d’une définition identitaire

Superposées autant que concurrencées, ces dimensions travaillent l’imaginaire et dessinent les contours d’une identité algérienne ouverte et en mouvement à tous ses niveaux. Autour du tournant

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