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La Part Manquante, Bobin Christian

Fiche : La Part Manquante, Bobin Christian. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  13 Mai 2013  •  Fiche  •  893 Mots (4 Pages)  •  843 Vues

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Voilà vingt-sept ans qu'il vivait avec elle. En parfaite harmonie. Puis la lassitude est venue. L'idée d'une rupture a germé, mais on ne se défait pas facilement d'une aussi longue cohabitation. Finalement, un beau jour de septembre dernier, en trois coups de ciseaux, il a coupé sa moustache. Hasard? Il venait à peine de déménager, une grande migration d'au moins cinq cents mètres. Autant de changements, négligeables pour certains, considérables pour Christian Bobin le sédentaire. Il en convient, il se sent aujourd'hui curieusement transformé: "La moustache était une protection dont je n'avais plus besoin. Les ciseaux ont peut-être traduit cette libération. Le visage, le corps, l'écriture, tout va dans le même allant, j'ai cette sensation heureuse de ne plus rien craindre." Le voici donc, libéré, dans son grand appartement - très simple au demeurant - donnant sur tous les arbres de la création. Un compagnonnage fondamental quand on sait que la vue d'un arbre peut, en une fraction de seconde, lui donner "assez de joie pour les vingt années à venir".

Aussi, malgré son amour de la nature, court-il rarement la campagne. Autre paradoxe, cet homme économe, qui dit ne rien aimer tant que les gens, les visages, ne voit pratiquement personne: "Je peux passer des années sans rencontrer mes amis. Pourquoi? Je ne peux pas l'expliquer. Je ne suis pas gêné dans l'absence." Mais, alors, que fait-il? Il s'assoit à son bureau et attend. Attend que les choses lui viennent dans un flot "comme si elles entraient par la fenêtre", puis tape sur sa vieille machine électrique, vite, très vite. Et si cela ne coule pas de source, il ne s'inquiète plus, il sait que l'inspiration, cette "compagne infidèle", va revenir. En attendant? Il mène une "vie éteinte, apparemment inerte". "Ce creux va être rempli par rien et, dans ce rien, il y a du tabac, de la lecture, beaucoup de lecture, de la musique, et parfois même des heures allongé sur le lit à regarder les mouvements d'un rideau agité par le vent."

Christian Bobin est creusotin depuis quarante-sept ans, mais il se perd encore dans sa ville natale. "Une ville, pour moi, c'est aller d'un point à un autre, d'une personne à une autre. Je ne sais pas me promener, je n'ai pas la grâce d'un Modiano pour qui la ville peut engendrer, je le vois, bonheur sur bonheur. D'où mon ensauvagement, ma mise à l'écart. C'est peut-être cela l'écriture, transformer un handicap en atout."

Pourtant, il l'aime, sa ville, bâtie au rythme des cheminées d'usine, née de la seule volonté de la famille Schneider. Il fut un temps où tout ici, les maisons, les destinées, les maternités, les églises, les corps et les âmes, appartenait à l'usine. Les parents de Christian Bobin n'ont pas échappé à la règle, contrairement à l'auteur du Très-Bas, qui n'a jamais envisagé d'entrer dans une quelconque structure sociale: "Le refus aura été ma boussole, reconnaît l'éternel marginal. J'ai passé tous les siècles de l'enfance à lire, cela met dans un drôle d'état. Avant d'écrire, vers les 25-26 ans, j'ai étudié la philosophie, j'ai eu des éblouissements,

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