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Gustave Flaubert et la connaissance

Dissertation : Gustave Flaubert et la connaissance. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  31 Janvier 2022  •  Dissertation  •  2 752 Mots (12 Pages)  •  244 Vues

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Jeudi 25 novembre 2021

D I S S E R T A T I O N      D E      L I T T É R A T U R E

« Travaille, médite, médite surtout, condense ta pensée, tu sais que les beaux fragments ne sont rien. L’unité, l’unité, tout est là ! L’ensemble, voilà ce qui manque à tous ceux d’aujourd’hui, aux grands comme aux petits. Mille beaux endroits, pas une œuvre. »

Gustave FLAUBERT

« La connaissance conduit à l’unité comme l’ignorance conduit à la diversité. »

L’homme d’esprit Ramakrishna insiste ici sur le lien entre la connaissance et l’unité – de la même manière qu’il existe un lien entre l’ignorance et la diversité –, sur l’importance qu’à l’une pour l’autre.

Dans une optique similaire de valorisation de l’unité, Gustave Flaubert écrit dans sa lettre à Louise Colet (14 octobre 1846) : « Travaille, médite, médite surtout, condense ta pensée, tu sais que les beaux fragments ne sont rien. L’unité, l’unité, tout est là ! L’ensemble, voilà ce qui manque à tous ceux d’aujourd’hui, aux grands comme aux petits. Mille beaux endroits, pas une œuvre. »

Flaubert prône ici un concept d’unité, d’ensemble qui serait bien plus important, bien plus intéressant que des « fragments ». il utilise à plusieurs reprise des verbes conjugués à l’impératif traduisant un ordre. « Travaille, médite » : ces verbes apparaissent comme des consignes spirituelles entrant dans le domaine du développement personnel. Travailler, méditer comme objectifs pour développer notre esprit, nos capacités intellectuelles. Le verbe « méditer » est d’ailleurs répété à deux reprises, « médite, médite surtout ». Cela donne plus d’importance au mot puisque se répétition ne fait que l’accentuer. Et puis, il y a ce « surtout » qui intensifie encore plus l’idée qu’il faut méditer avant toute chose. Et méditer, c'est faire une longue réflexion, une réflexion qui n’est pas immédiate. Ensuite, Flaubert demande de condenser notre pensée. Donc, de la réduire, de la rendre plus dense. On trouve ici un subtil paradoxe entre l’idée d’une réflexion longue qui laisse à penser que sa longueur permet de découvrir nombreux chemins de pensée et l’idée de condenser nos pensées en les exprimant en peu de mot. C'est presque une idée de synthèse, de prise de recul qui se présente dans ces quelques mots. « Tu sais que les beaux fragments ne sont rien ». Ce morceau de phrase a pour but de convaincre. De convaincre le lecteur qu’il sait déjà que les « beaux fragments ne sont rien », et que s’il croyait penser le contraire, c'est qu’en quelques sortes, il se mentait à lui-même parce que, comme le dit Flaubert, « tu sais ». Les fragments, de manière générale, sont beaux mais ils ne sont que des fragments et c'est ce qui dérange l’auteur. En effet, on trouve ensuite une répétition du mot « unité » : « L’unité, l’unité, tout est là ! ». La répétition du mot accentue son importance dans le propos de l’auteur puisque c'est justement ce que ce dernier prône. Le point d’exclamation en témoigne d’ailleurs puisqu’il donne une certaine vivacité aux paroles, comme un enthousiasme perceptible par le lecteur. Après cette courte phrase, Gustave Flaubert renchérit son propos lorsqu’il dit « L’ensemble, voilà ce qui manque aux grands comme aux petits ». C'est donc, cet ensemble, cette unité qu’on ne peut retrouver dans un fragment qui manque à tous. En utilisant le mot de comparaison « comme », les « Grands » sont mis sur le même piédestal que les « Petits ». Effectivement, les uns comme les autres sont de ceux qui n’ont que des fragments à défaut d’avoir une certaine forme d’unité. Car, les fragments sont « mille beaux endroits, pas une œuvre ». On retrouve ici l’adjectif qualificatif « beau » qui caractérise les fragments, comme quoi ceux-ci apparaîtraient comme étant intéressants grâce à leur « beauté » mais que la vraie connaissance se trouve dans l’œuvre, que pour travailler, méditer et condenser notre pensée, il faut lire une œuvre complète dans toute son unité et pas quelques fragments qui n’amènent pas à une véritable méditation, à une véritable réflexion.

        Mais alors, une œuvre est-elle vraiment ancrée dans un concept d’ensemble ? Ne peut-on pas trouver matière à profonde réflexion dans une citation, dans un « fragment » ou faut-il toujours ne jurer que par une œuvre complète ?  

        Il s’agit tout d’abord de saisir ce que l’auteur comprend dans son idée de « beaux fragments » qui s’oppose à l’œuvre puis, d’envisager qu’un fragment puisse finalement avoir autant à apporter qu’une œuvre si ce n’est plus. Enfin, nous verrons en quoi une œuvre doit être abordée dans son ensemble et non de manière morcelée.

        Flaubert utilise le terme « beau » pour qualifier les fragments. En effet, lorsqu’on extrait à une œuvre un morceau, un fragment, on le choisi et c'est donc volontairement qu’on en garde ce qui nous semble le meilleur, le plus beau. Mais, une belle phrase bien tournée et avec de jolis mots ne représente pas une œuvre. De même qu’un extrait, qu’une partie d’un livre ne le représente pas. Ne se contenter que de « beaux fragments » qui ne sont « rien » en les tenant comme emblématiques de l’œuvre c'est comme réduire Aphrodite à un joli minois. Prenons l’exemple d’ Illusions Perdues de Balzac. Si on ne gardait que la partie centrale, la plus longue : « Un homme de province à Paris ». Elle raconte les aventures de Lucien de Rubempré dans sa quête de la célébrité et de la gloire en plein Paris, lui qui avait toujours vécu à Angoulême. On pourrait en effet appeler cette partie « beau fragment », elle relate la partie du roman la plus mouvementée, c'est la plus connue et celle qui intéresse le plus de monde de manière générale. On peut d’ailleurs le voir dans l’adaptation de Xavier Giannoli qui a totalement délaissé la troisième partie et n’a gardé que quelques éléments de mise en contexte de la première partie. Mais les « illusions perdues » ne concernent pas seulement Lucien et ses ambitions trop grandes mais aussi David Séchard qui avait pour objectif de révolutionner le papier pour en fabriquer un type moins couteux sans en altérer la qualité. Et donc, en ne gardant qu’une partie, c'est tout l’édifice qui perd de sa valeur. En ne conservant qu’une partie, qu’un fragment, il n’y a plus de réel sens, puisqu’on retire une partie d’un tout pour finalement obtenir quelque chose de flou dans les parties mais qui serait clair dans l’assemblage.  

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