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Faut-il opposer parole théâtrale et image cinématographique ?

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Par   •  27 Février 2017  •  Dissertation  •  1 309 Mots (6 Pages)  •  755 Vues

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Faut-il opposer parole théâtrale et image cinématographique ?

I. Oui

Œdipe roi de Sophocle et son adaptation cinématographique par Pier Paulo Pasolini permettent d’opposer la parole théâtrale et l’image cinématographique sur certains points. En effet, la parole sophocléenne peut être considérée comme un spectacle à elle toute seule, thèse défendue par Aristote. Les scènes d’ouverture et de clôture de la tragédie en sont la preuve car elles sont très visuelles. En effet, les premiers mots de la pièce sont prononcés par Œdipe et ses mots donnent à voir au lecteur le spectacle auquel il assiste : « Enfants, jeune lignée de notre vieux Cadmos, que faites-vous là assis, devant moi, pieusement parés de rameaux suppliants ? » Le lecteur comprend donc qu’il est entouré par son peuple et qu’Œdipe est auréolé de lumière au moment où il prononce ces mots car la suite du prologue montre bien qu’il est considéré par les thébains comme un héros : « moi, Œdipe – Œdipe, au nom que nul n’ignore », dit Œdipe au début de la pièce. La scène finale de la pièce présente le même caractère visuel. En effet, Œdipe rentre sur scène après s’être mutilé et c’est le messager qui précise la scène de l’aveuglement pour que le lecteur/spectateur puisse bien comprendre ce qu’Œdipe vient de s’infliger, notamment à l’aide de métaphores : « Ce n’était pas un suintement de gouttes rouges, mais une noire averse de grêle et de sang, inondant son visage ! » Ces deux exemples de scènes théâtrales très visuelles prouvent donc que le pouvoir évocateur des mots suffit et que c’est un spectacle en lui-même car chaque lecteur/spectateur peut s’imaginer les scènes. De plus, le fait que notamment ces deux scènes (d’ouverture et de clôture) soient très visuelles permet bien de montrer que la parole théâtrale chez Sophocle est utilisée afin de faire de ses tragédies des spectacles complets dans lesquels les mots permettent à la fois de s’exprimer mais aussi de voir et d’entendre ce que les personnages vivent et ressentent.

Cependant, si la parole théâtrale et l’image cinématographique peuvent s’opposer, Pasolini prouve qu’elles peuvent surtout se compléter, raison pour laquelle il a choisi d’adapter une tragédie grecque de l’Antiquité au cinéma. Cette complémentarité s’exprime notamment par deux ajouts que fait Pasolini au texte de Sophocle dans son film. En effet, le cinéaste ajoute à la tragédie une dimension mythique en s’inspirant du mythe d’Œdipe ainsi qu’une dimension autobiographique. Ces deux ajouts sont particulièrement remarquables dans un passage particulier du film : son prologue, moderne, qui se passe dans un village italien durant les années 1920. Ce prologue correspond à la genèse moderne du mythe d’Œdipe car il montre la relation affectueuse qu’ont une mère et son jeune fils. Dans ce prologue, Pasolini cherche à montrer ce que Sigmund Freud a théorisé comme étant le « complexe d’Œdipe » : il s’agit du désir inconscient d’entretenir un rapport sexuel avec le parent du sexe opposé (inceste) et celui d’éliminer le parent rival du même sexe (parricide). Les premières séquences du film de Pasolini permettent donc de moderniser l’histoire d’Œdipe et de compléter l’écriture théâtrale en ajoutant une dimension très universelle à la tragédie de Sophocle car le complexe d’Œdipe est un phénomène qui peut toucher un plus grand nombre de personnes que l’histoire même de ce roi thébain incestueux et parricide. En effet, Pasolini le prouve lui-même en prononçant la phrase suivante : « L’enfant du prologue, c’est moi, son père est mon père, officier d’infanterie, et sa mère, une institutrice, est ma mère. » Il avoue donc ici que son film a une dimension autobiographique. Ainsi, il va se permettre d’ajouter des éléments de sa vie personnelle à l’adaptation de la tragédie de Sophocle par le biais d’images cinématographiques. On comprend donc que le choix d’ouvrir son film par des scènes montrant la genèse

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