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Dissertation sur le personnage

Dissertation : Dissertation sur le personnage. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  20 Août 2020  •  Dissertation  •  4 459 Mots (18 Pages)  •  560 Vues

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Introduction

En 1992, dans Lire du texte au sens, Gérard Vigner écrivit : « La notion de personnage est assurément une des meilleurs preuves de l'efficacité du texte comme producteur du sens puisqu'il parvient, à partir de dissémination d'un certain nombre de signes verbaux, à donner l'illusion d'une vie, à faire croire l'existence d'une personne douée d'autonomie comme s'il s'agissait réellement d'êtres vivants ». Il considérait donc le personnage comme le reflet de l'être humain. Comme la personne réelle, le personnage porte toutes les caractérisations qui le rendent aussi réel que possible. Cette affirmation concernant la conception du personnage figurait déjà en plus détaillée et en plus approfondie, dans l'ouvrage intitulé L’École du refus (1958) de Bernard Pingaud. Il soutient en effet « Le personnage est un être unique, exceptionnel, « inoubliable » : mais il est en même temps, à son rang, à sa place, représentatif du genre humain. En lui se réalise un équilibre entre les exigences de l'individu – exigences qui le définissent de l'intérieur, qui lui donne son « caractère » – et les nécessités de la vie sociale, qui le définissent du dehors : il a un nom, un titre, une fonction, des biens. Cet équilibre, qui illustra peut-être les idées de la bourgeoisie triomphante, qui fut moins contemporain d'un certain ordre bourgeois, est aujourd'hui rompu. Nous assistons à la lente agonie d'un monde qui ne tient plus debout que par la force des apparences, et personne n'oserait plus prétendre, dans l'état actuel des connaissances sur l'homme et sur la société, que le personnage ne soit pas devenu une fiction parfois commode et parfois encombrante ». Cette affirmation confirme celle de Gérard Vigner, car elle annonce l'adéquation possible et la ressemblance entre le personnage, en tant qu'être fictif, et l'individu comme une personne réelle. Mais elle la dépasse en même temps, vu que Bernard Pingaud, partant de ces observations, soutient que l'équilibre existant entre l'univers intérieur du personnage et les exigences extérieures est aboli. Cela signifie que la définition du personnage en général et du personnage du roman en particulier ne va pas de soi. Malgré son évidence apparente, cette notion dépend des évolutions vécues dans telle ou telle époque dans laquelle est parue l’œuvre littéraire. Comme on peut le constater, l'auteur de la citation opère une distinction d'ordre temporelle et circonstancielle révélatrice : une différence entre un temps révolu, à travers l'emploi du passé simple : « illustra » et « fut » , et un temps vécu (contemporain), d'où le recours au présent : « est », « assistons » et l'adverbe « aujourd'hui ». Loin de s'opposer radicalement à la conception traditionnelle du personnage, Bernard Pingaud affirme en premier temps l'importance de ce point de vue, en développant de façon explicite les caractéristiques. En second temps, il insiste sur l'évolution du personnage et de son statut. Ce dernier est en perpétuelle évolution, d'où la difficulté de mettre en place une théorie définitive, qui le définit de manière exhaustive. Par conséquent, il y a lieu de changer la question : il faut désormais s'interroger sur la métamorphose du personnage ainsi que la place qu'il occupe dans notre monde. Ainsi, longtemps considéré comme un être autonome, comme une personne à part entière, le personnage a subi au XX e siècle une véritable crise.

A la lumière de ce point de vue, on pourrait se poser les questions suivantes : en quoi consiste la notion de personnage selon Bernard Pingaud ? Quels sont les différents facteurs qui entrent en jeu ? Existerait-il nécessairement une coïncidence entre le personnage et l'époque historique ? Le personnage est-il le produit d'une société maintenant révolue ? Comment pouvons-nous résoudre ces ambiguïtés ?

Face à ces interrogations, nous élaborerons une réflexion en trois temps. D'abord, nous défendrons la thèse soutenue par l'auteur, à savoir que la notion de personnage a évolué progressivement, d'une époque à une autre, au point d'atteindre une crise liée à notre monde, qui est devenu moins sûr de lui-même, et dont les certitudes sont ébranlées. Néanmoins, nous montrerons les limites de la conception de B. Pingaud à propos du personnage. Autrement dit, le personnage est l'une des composantes essentielles dans une œuvre littéraire (un roman, une pièce de théâtre), d'où la renaissance qu'il a vécu surtout après l'époque du Nouveau Roman. Enfin, nous verrons que le personnage est une notion complexe, qu'on ne peut pas réduire à un simple dualisme d'opinions différentes.

Outre qu'il n'est pas la clé d'interprétation du monde, l'homme n'est pas fait d'un seul bloc. Le temps qui postulait l'existence de l'individu est révolu, c'est-à-dire, étymologiquement, de l'être indivis. En faisant référence au nouveau roman, B. Pingaud est conscient de l'impact des changements qui ont eu lieu sur la place de l'homme dans l'univers. Ainsi, l'individu est noyé aujourd'hui dans une société de masse qui relègue chacun dans un anonymat généralisé.

Partant de ces éléments, les Nouveaux Romanciers se refusent à faire reposer le récit sur la figure traditionnelle du personnage, et plus précisément celle du héros, acteur principal d'une période dépassée. Il était clairement identifiable, suffisamment universel pour que le lecteur puisse s'identifier à lui et individualisé pour constituer un type irremplaçable, un caractère, oscillant ainsi entre les deux modèles contradictoires de l'individu et de la personne (Personna signifie le masque du théâtre). Pour ce faire, le roman réaliste recourait à deux sortes de caractérisation : les caractérisations intrinsèques (nom, prénom, profession, description physique, pour l'essentiel) et les caractérisations obliques (comportement, faits et gestes, propos, …). Ce double système a longtemps permis d'entretenir l'illusion que le personnage avait une existence en dehors du livre et qu'il accédait progressivement à l'autonomie d'une personne réelle : « Plus nos personnages vivent et moins ils nous sont soumis », affirmait ainsi François Mauriac dans Le Romancier et ses personnages (1934). De même, il est utile de rappeler que la notion de personnage, malgré sa simplicité apparente, demeure sujette à diverses interprétations

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