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Dissertation sur l'élégie

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Par   •  5 Décembre 2015  •  Dissertation  •  2 704 Mots (11 Pages)  •  1 052 Vues

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James Sacré, dans un article intitulé « Le mot élégie dans un titre » (élégies d'aujourd'hui, textes rassemblés par Jean-Michel Maulpoix, Le Nouveau Receuil. Revue trimestrielle de littérature et de critique, décembre 2004-février 2005, p. 147), écrit :

        Cette solitude du poème, où s'accentue l'éloignement de tout objet aimé, et même le dire         du langage qui croyait dire cet éloignement, cette solitude sans objet finalement et sans         forme,         n'est-ce pas là ce qui pourrait le mieux décrire ce qu'est l'élégie ? Et tout poème un         peu inquiet de lui-même n'est-il pas en cela une élégie ? Pas exactement comme une plainte,         comme dit le dictionnaire […], mais le constat d'une impossibilité.

Au travers de cette citation, James Sacré, poète du XXème siècle, propose une redéfinition du genre de l'élégie. Selon lui, le poème est un genre à part entière qui pousse une réflexion sur la langage, sur l'incertitude de celui-ci ainsi qu'un questionnement sur lui-même. L'élégie rejoindrait la dimension méta-poétique, s'interrogeant sur son utilité, sa durée et son but. Elle serait également pour le poète, un moyen de s'exprimer lui-même individuellement. Avec l'utilisation de la rhétorique, James Sacré, semble considérer l'élégie comme un phénomène et non comme un objet. Un phénomène indéfinissable, pas concret, dont il ne peut y avoir de définition précise et générique. Celle-ci est toujours en mouvement, dans un cycle sans fin d'évolution et de renouveau, la rendant insaisissable.

Le poète tente donc de définir ce que lui-même cherche à saisir, et propose une nouvelle description de l'élégie bien qu'il admette que ça ne soit pas possible. La définition proposée ici par J.S. n'est-elle pas réductrice dans la caractérisation de l'élégie ? Car si en effet l'élégie est en constante évolution, est-ce possible d'en faire une définition générique tout en prenant en compte sa longue histoire ?

I. Une poésie qui semble sans objet lyrique qui réfléchit sur elle-même.

a) Le solipsisme est une « attitude » générale philosophique d'après laquelle il n'y aurait pour le sujet pensant d'autre réalité que lui-même. La question ici ne relève d'abord pas de « l'esprit », mais d'une constatation que le « moi » est la seule manifestation de conscience dont nous ne puissions pas douter. Seul l'ego peut donc être tenu pour assurément existant et le monde extérieur avec ses habitants n'existe dans cette optique que comme une représentation hypothétique, et ne peut donc pas être considéré autrement que comme incertain. Cette attitude permet d'isoler le sujet, ou plutôt de montrer qu'il n'y a pas de sujet.

 L’écriture lyrique tend au solipsisme. Nous pouvons dire que lorsqu'un auteur se plonge dans un solipsisme poétique, il écrit sous un « Je » poète, il est l'objet de son poème même s'il parle d'autre chose, il se réfère à lui-même en devenant le « je » suprême, fondateur de son propre poème. Il se place au dessus de tout, c'est lui qui guide le poème et tout ce dont il parle. Le solipsisme est l'individualisme poussé à son paroxysme, le poète devient l'entité la plus puissante de son propre poème. Ainsi, cela relèverait en un sens de la certaine solitude du poème mais également de celle du poète. Car si le poète est l'entité fondatrice du poème, est-il possible de séparer l'un de l'autre ?  Doit-on alors comprendre dans le sujet, le poème comme une entité à part entière ou bien la moitié indissociable de sa partie humaine ?

Chez Apollinaire, on retrouve cette attitude dans La maison des morts. Il faut savoir que ce poème extrait du recueil Alcools n'était pas un poème, il s'agissait d'un conte écrit par Apollinaire, intitulé « L’Obituaire ». C'est en passant de la forme littéraire à la forme poétique, qu'Apollinaire s'inscrit dans une attitude solipsiste. Dans ce poème, le « Je » poète est présent tout au long. Apollinaire place d'emblée la résurrection des morts sous le signe de « ma mémoire » (v.15). C'est également lui qui (comme Dieu) dit aux morts : « Oui tous vos péchés sont absous » (v.48) ; et qui rompt cruellement la chanson de la fiancée en écrivant : « Hélas ! la bague était brisée » (v.109 et 117). Le poète-narrateur est important, c'est lui qui guide les morts : « Je les invitai à une promenade »(v.44). Il devient ainsi une sorte d’Hermès, « conducteur des âmes », mais pour un trajet inversé, puisqu’il ramène les morts vers la vie. Le « Je » poète témoigne tout au long du poème et arrive à son apogée dans le dernier vers : « Et l'on n'a plus besoin de personne » bien que le poète n'utilise pas la première personne, il utilise la troisième personne indéfini « on » qui peut être vu comme un « je » ambiguë. Cette ambiguïté peut témoigner d'une forme d'incertitude du langage puisque le pronom « on » n'a pas de signification immuable. Apollinaire fait donc preuve d'une réflexion sur le langage comme outil d'expression de l'objet élégiaque.  

Dans les Élégies de Duino, de Rilke, on sent dès le début du recueil une flottement de sujet entre le « je » et le « nous », il peut s'agir du poète ou de l'homme en général, mais le thème récurrent du narcissisme nous fera plutôt pencher vers le « je » poète. C'est principalement dans la « Septième élégie » que nous pouvons parler de solipsisme. En effet, cette élégie est l'élégie du triomphe. L'égo lyrique du poète-créateur chante sa victoire sur l'Ange. Rilke, le poète-créateur, est le maître de son poème. Il a le pouvoir absolu et son point de vue est omniscient : « Vois, c'est alors que j'appellerais l'amante. Mais elle ne viendra pas seule. » (v.41-42). Rilke s'adresse directement à l'Ange, il l’apostrophe « Ange, je te le montre encore, le voici. », « Admire ô ange », le poète à pris le dessus sur la figure de l'Ange dans cette élégie, il le domine.

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