Dissertation Lettres d'une Péruvienne

Sujet :

En conclusion d’une étude sur les Lettres d’une Péruvienne, un critique fait la remarque suivante :

« Il n’est décidément pas si facile de désapprendre la prison : n’est-ce pas, en fin de compte, ce qu’essaie de dire ce roman de la précarité, tout à la fois ouvert et fermé ? »

Jean-Paul Schneider, « Les Lettres d’une Péruvienne, roman ouvert ou roman fermé ? » dans Vierge du Soleil / Fille des Lumières : la Péruvienne de Graffigny et ses suites, 1989

Schneider parle dans cette citation de « roman de la précarité ». Comment comprendre le terme « précarité » ? En effet on peut voir le roman comme un instable, qui évolue : l’histoire de Zilia est instable, elle n’est pas linéaire, bien au contraire, elle est d’abord enlevée, puis recueillie par Déterville, qui cependant la grade quelque peu sous son emprise, elle est également prisonnière de son amour pour Aza, qui est le destinataire des lettres et donc fil conducteur du roman. L’évolution du personnage de Zilia est sans cesse remise en cause : à travers son enfermement puis sa découverte du monde et son détachement progressif à Aza, Zilia s’ouvre sur le monde, sur les mœurs occidentales, qu’elle observe avec émerveillement autant qu’avec un regard critique.

« Il n’est décidément pas si facile de désapprendre la prison » : cette position passive de Zilia, qui tout en étant enfermée s’ouvre au monde, elle a surtout un rôle d’observateur. C’est justement par ce rôle d’étrangère et d’observatrice du monde que Zilia réussit à fuir la prison dans laquelle elle était coincée.

Et quand elle est enfin libre, elle se retire dans une petite maison de campagne. Cela montre tout de même sa difficulté à s’émanciper des chaînes qui la retenait. Elle aurait pu tenter de s’intégrer pleinement, conquérir cette société nouvelle qui s’offrait à elle, or ce n’est pas le cas : Zilia préfère s’isoler pour garder une distance avec ce monde nouveau qu’elle a découvert, plein d’artifices et de fausseté, où la place de la femme notamment est négligée.

Problématique :

Nous nous demanderons dans quelle mesure ce roman permet, notamment à travers le personnage de Zilia, de former une réflexion sur l’enfermement et l’ouverture au monde, pour arriver à une interrogation générale plus philosophique.

Nous verrons dans un premier temps que Zilia est un personnage prisonnier et renfermé, puis que Zilia est spectatrice de la vie occidentale, c’est un personnage ouvert sur le monde. Enfin nous nous intéresserons à la manière dont Françoise Graffigny nous propose un texte philosophique, ouvert sur le monde.

I. Zilia est un personnage emprisonné, elle est renfermée sur elle-même

a) Zilia est un personnage enfermé presque tout au long du roman

Son enfermement est quelque chose d’évident dans le roman car on peut le voir dès la première lettre lorsqu’elle explique la situation à son amant Aza : elle a été enlevée par les conquistadors espagnols et est retenue prisonnière. On va également apprendre que Zilia a en réalité toujours été prisonnière, mais à des niveaux différents. En effet, déjà au Pérou, elle était enfermée. Elle le dit à la lettre 12 : « Renfermée dans le Temple dès ma plus tendre enfance, je ne connaissais pas les beautés de l’univers ; tout ce que je vois me ravit et m’enchante. » Arrivée en France elle découvre la société française mais aussi le monde car depuis son plus jeune âge, elle était retenue au Temple du Soleil.

b) Zilia est également prisonnière de son amour pour Aza

On peut également voir Zilia comme un personnage prisonnier, en l’occurrence prisonnière de son amour pour Aza. En effet, la plupart de ses lettres lui sont destinée, c’est le fil conducteur du roman, un regroupement des lettres qu’elle écrit à l’homme qu’elle aime en attendant de pouvoir le retrouver. Et c’est également tout ce qu’elle recherche tout au long du roman, elle n’a qu’une hâte, celle de retrouver l’homme qu’elle aime. Mais lorsqu’elle apprend qu’il est infidèle, elle lui reste toujours fidèle, elle reste prisonnière d’un amour qui n’est pas réciproque. Nous pouvons prendre l’exemple de la dernière lettre à Déterville : « Le cruel Aza abandonne un bien qui lui fut cher ; ses droits sur moi n’en sont pas moins sacrés : je puis guérir de ma passion, mais je n’en aurai jamais que pour lui… »

c) Zilia est un personnage qui s’émancipe difficilement car elle est sans cesse sous la dépendance de quelqu’un

Quand Déterville la recueille, un chevalier français, on peut toujours percevoir son oppression car Zilia est étrangère et il la prend sous son aile, elle est dépendante de lui.

Tombant amoureux d’elle, on peut également voir en Déterville un personnage oppressant pour Zilia. On peut prendre l’exemple à la lettre 12 « Tandis que je le considérais avec surprise, et que je tâchais de deviner pourquoi Déterville nous enfermait si étroitement »

Même avec Déterville qui la sauvé des Espagnols, elle est toujours enfermée.

Transition :

Si Zilia est un personnage renfermé, notamment à cause de la trame du récit, mais également à cause de son amour pour Aza et du personnage de Déterville qui se veut oppressant, c’est un personnage étranger qui arrive dans le monde occidental. Ce point de vue extérieur lui permet une ouverture sur le monde et les mœurs occidentales.

II. Mais Zilia est aussi spectatrice : un personnage ouvert sur le monde

Le fait qu’elle soit enfermée engendre chez le personnage de Zilia une distanciation qui lui permet de s’ouvrir sur le monde et de découvrir cette société nouvelle qui s’ouvre à elle.

a) Elle découvre le monde occidental

Zilia est étrangère, son regard étranger lui permet la découverte d’une nouvelle culture, de nouvelles mœurs. On peut le voir avec l’exemple de la lettre 4 : Tout ce

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