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Commentaire du poème Élévation de Baudelaire

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Par   •  1 Juin 2015  •  1 640 Mots (7 Pages)  •  1 371 Vues

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Commentaire

‘’Élévation’’, poème, composé de cinq quatrains d'alexandrins aux rimes embrassées, est avant tout remarquable par la sensation de mouvement qu’il fait naître chez le lecteur. Cela tient à une forte utilisation du champ lexical du mouvement («au-dessus», «par delà», «tu te meus avec agilité», «Tusillonnes gaiement l’immensité profonde», «Envole-toi», «Va te purifier dans l’air supérieur», «peut d’une aile vigoureuse / S’élancer vers les champs lumineux et sereins», «plane sur la vie»), au fait aussi qu’une seule phrase constitue les deux premiers quatrains (d’où un enjambement hardi de strophe à strophe) et une autre les deux derniers. Et, comme un sonnet, l’esprit d’une première partie, formée des trois premiers quatrains, s’oppose à celui d’une seconde, formée des deux derniers.

Le premier quatrain est particulièrement marqué par la gradation d’une ascension vertigineuse et d’un élargissement spatial. On peut y voir un souvenir de Platon qui décrivit dans ‘’Le Phédon’’ l'ascension des âmes vers Ie pur séjour supra-terrestre ; qui déprécia le bas et idéalisa une lumière ou une chaleur empyréenne. Par une longue énumération, faite de répétitions et d’accumulation de compléments circonstanciels de lieu, dans des alexandrins parfaitement équilibrés du fait de leurs coupes régulières, l’esprit du poète, auquel il s’adresse se dégage d’abord de la nature terrestre, des «étangs» (qui stagnent), des «vallées» et des «bois» (qui enferment), milieux qui pourraient très bien représenter cette société médiocre que Baudelaire méprisait et qui le méprisait ; puis il s'élève de plus en plus haut : il franchit les «montagnes» (qui se dressent vers l’immensité du ciel), atteint les «nuages» et survole les «mers» (qui évoquent la liberté) ; enfin, dans une véritable «odyssée de l’espace» avant la lettre, il dépasse le «soleil» (premier mot d’un champ lexical de la lumière, où figurent encore «étoilées», «clair», «limpides», «brumeuse», «lumineux»), parcourt les «éthers» (pluriel poétique, l’éther étant, pour les Anciens, le fluide très subtil qu’on supposait régner au-dessus de l’atmosphère), s’éloigne même des «confins des sphères étoilées» ! On peut remarquer l’opposition dans les vers de cette strophe entre les rimes embrassées, «vallées» et «mers» représentant le monde du bas, «éthers» et «étoilées» représentant le monde du haut.

Au premier vers du deuxième quatrain seulement, vers coupé irrégulièrement, ce qui lui donne beaucoup de dynamisme, apparaissent le sujet de la phrase, l’«esprit», et un premier verbe, «tu te meus», qui le décrit donc par un mot qui concerne le corps. Cela se continue, dans un vers lui aussi coupé très irrégulièrement, avec l’idée du «bon nageur qui se pâme dans l’onde», c’est-à-dire qui ressent dans l’eau une émotion si forte qu’il en est comme paralysé, mais sans risque puisqu’il s’agit d’«un bon nageur», qui éprouve d’ailleurs «une indicible et mâle volupté», le poète semblant vouloir indiquer que cette jouissance quasi érotique, dans un élément liquide, donc féminin, si grande qu’elle ne peut être dite, n’en est pas moins virile. L’idée de la nage est peut-être un souvenir de certainesphrases de ‘’La peau de chagrin’’ prononcées par le héros : «Le plaisir de nager dans un lac d'eau pure, au milieu des rochers, des bois et des fleurs, seul et caressé par une brise tiède, donnerait aux ignorants une bien faible idée du bonheur que j’éprouvais quand mon âme se baignait dans les lueurs de je ne sais quelle lumière, quand j’écoutais les voix terribles et confuses de l’inspiration, quand d’une source lumineuse les images ruisselaient de mon cerveau palpitant.» ; et il veut goûter le «plaisir de se mouvoir sans être garrotté par les liens du temps ni les entraves de l’espace», goûter aussi l’orgueil «de faire comparaître en soi l’univers». L’idée de plaisir, et même d’exubérance, d’euphorie, est bien rendue par l'adverbe «gaiement». Cet esprit, qui sillonne «gaiement l’immensité profonde», rappelle l’albatros, le poème de ce titre étant venu, mais dans la seconde édition du recueil seulement, précéder ‘’Élévation’’. Comme ‘’L’albatros’’ relate la chute du poète et le malaise qui le prend à vivre parmi les gens du commun, ‘’Élévation’’ peut paraître un poème inverse. Dans ce quatrain aussi, on remarque l’opposition des rimes qui, étant embrassées, forment ici un chiasme : «agilité» et «volupté», qui représentent l'abstrait, enserrent «onde» et «profonde», qui représentent le concret.

Pourquoi, si l’esprit s’est déjà libéré dans l’espace, faut-il que, dans le troisième quatrain, Baudelaire lui adresse trois injonctions. Pour la première injonction, on remarque le contraste sonore entre la liquidité dynamique de : «Envole-toi bien loin», et la lourdeur, due à l'allitération en «m», des «miasmes morbides» (émanations de substances en décomposition provoquant des maladies). Pour la deuxième injonction sont ménagées deux de ces significatifs allongements de mots qui sont provoqués par la diérèse qu’il faut faire pour que chaque hémistiche ait ses six syllabes : ainsi, «purifier» doit se prononcer «purifi-er» et «supérieur» doit se prononcer «supéri-eur». Pour la troisième injonction, qui s’étend sur deux vers dont le premier est, lui aussi, coupé de façon dynamique, le commandement de boire «Le feu clair

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