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Commentaire Composé du poème Charme pour le roi Robert d'Adalbéron

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Par   •  11 Mai 2013  •  3 253 Mots (14 Pages)  •  2 634 Vues

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L’oeuvre dont est extrait le présent texte est un poème intitulé « Charme (carmen) pour

le roi Robert ». Plus que d’un discours (puisqu’il n’a, semble-t-il, jamais été prononcé), il

s’agit d’un poème politique adressé au roi capétien Robert II le Pieux aux environs de 1025.

L’auteur en est Adalbéron, évêque de Laon, neveu de l’archevêque Adalbéron de Reims. Il

appartenait à un très puissant lignage : il était de sang royal, affilié à la fois aux Carolingiens

(il était descendant des ancêtres de Charlemagne) et aux Capétiens (il était cousin germain

des Ducs de Lorraine). Après avoir été chanoine de Metz, il fut établi en 977 évêque de Laon

par Lothaire. C’est donc vers la fin de sa vie que cet homme, rattaché par son histoire

personnelle et familiale aux deux grandes dynasties et à la tradition des Grands d’Eglise

soutien du trône, rédige ce poème politique, qui par bien des aspects peut être vu comme

une exorde adressée au roi Robert.

La situation de la toute nouvelle royauté est, en effet, critique dans ces années 1020.

Le pouvoir royal est complètement affaibli et a perdu toute autorité. Le propre père de

Robert, Hugues Capet, est arrivé sur le trône porté par l’élection des puissants du royaume.

Au début du XIe siècle, le principe électif est en effet du côté des rois, quand l’hérédité est du

côté des Grands. L’hérédité de la dynastie capétienne, encore jeune, n’est qu’une hérédité de

fait, qui repose sur le sacre du fils du vivant de son père. Or, au moment où est écrit ce

poème, les fils de Robert se disputent le droit d’être sacrés, dispute que tranche Robert en

faveur de l’aîné. Mais celui-ci meurt dès 1027, quelques temps après son sacre. Le poème,

que nous ne savons pas dater avec précision, est peut-être même écrit après la mort du fils de

Robert, quand la dynastie capétienne n’a plus d’héritier sacré en vie. La royauté n’est pas

seulement affaiblie par la perte de son autorité ou de sa crédibilité, elle est également

affaiblie par le rétrécissement du territoire sur lequel cette autorité pouvait encore s’exercer.

C’est à un véritable morcellement géographique, une décomposition territoriale que se

livrent les grands seigneurs en regroupant autour d’eux les pouvoirs et les fidélités. Plus

encore, les années 1020 voient le début du phénomène d’enchâtellement, c’est-à-dire la

construction de châteaux privés dits « adultérins », par des cadets de familles ou des

aventuriers que soutiennent quelques bandes armées. Ainsi, mêmes les grands seigneurs ne

maîtrisent plus l’espace et l’exercice de l’autorité publique sur cet espace morcelé.

L’effet corrosif de la féodalité atteint aussi le système ecclésiastique hiérarchique mis

en place par les Carolingiens : l’Eglise séculière est, elle aussi, en pleine crise. La crise est tout

d’abord morale. De plus en plus, les clercs vivent comme des laïcs : nicolaïsme, simonie,

baisse du niveau culturel. Inversement, de plus en plus de laïcs captent de façon détournée

profits et charges ecclésiastiques. La crise est ensuite une crise d’autorité : un véritable

sentiment de « régionalisation » frappe l’Eglise, où chaque paroisse, chaque diocèse perd de

vue l’idée de chrétienté universelle et surtout de hiérarchie ecclésiastique.

C’est dans ce contexte qu’Adalbéron, grand personnage important et vieillissant

rédige ce poème adressé à ce roi capétien tellement affaibli. Il y décrit une société divisée en

ordres (ordo signifie « mode de vie »), division qu’Adalbéron présente comme un état de fait

et dans laquelle s’inscrivent toutes les composantes de la société de l’époque, une société où

oratores, bellatores et laboratores se côtoient et se soutiennent les uns les autres, dans un ordre

traduisant l’ordonnancement divin. Pourtant, une analyse plus poussée du texte force à

s’interroger. La division que nous présente Adalbéron est ambiguë sur bien des points : en

insistant sur l’idée de hiérarchie, Adalbéron nous pousse à nous demander si cette division

est ternaire ou binaire. De la même façon, la description d’Adalbéron conduit à se demander

si toutes les situations qui peuvent exister dans la société du XIe siècle sont véritablement

prises en compte dans ce texte. De façon plus générale, à quelle réalité de la société du XIe

siècle correspond la société tripartite décrite par Adalbéron ? Cette question peut se poser

d’une autre façon : quel but poursuit Adalbéron en nous décrivant une division ternaire de la

société que nous suspectons de ne pas être le reflet de la réalité ? En effet, s’il est

incontestable que la société féodale est divisée en ordre (I), la description que nous en fournit

Adalbéron n’est pas dénuée d’ambiguïtés et force à s’interroger sur sa réalité (II).

I – Une société d’ordres

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