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Regarde les lumières mon amour, Annie Ernaux

Dissertation : Regarde les lumières mon amour, Annie Ernaux. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  1 Mars 2024  •  Dissertation  •  2 174 Mots (9 Pages)  •  34 Vues

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Annie Ernaux sait rendre visible ce que nos yeux, nos esprits et nos cœurs ne voyaient plus.

Regarde les lumières mon amour est une œuvre dite « auto-socio-biographique » écrite par Annie Ernaux et publiée en 2014. Ce livre est un journal d’observation qui raconte les sorties récurrentes de l’auteure au supermarché, entre novembre 2012 et fin octobre 2013, soit sur une période d’un an. Bien que ce livre soit centré sur le présent, il comporte aussi une partie centrée sur les expériences passées de l’auteure dans des supermarchés, mais aussi un épilogue post publication qui revient sur cette œuvre (3 ans après). C’est dans ce contexte que nous allons montrer que « Annie Ernaux arrive à orienter l’attention des lecteurs sur des aspects de leurs vies qu’ils ne remarquaient plus » dans cette œuvre. Nous commencerons donc par parler du choix du style d’écriture pour faire figurer les idées de l’auteure, puis nous étudierons comment Annie Ernaux critique notre société de consommation, mais aussi la culture de l’oubli, aujourd’hui omniprésente dans notre société, enfin nous verrons comment la littérature, dans un sens plus large, permet de changer sa vision des choses et de nous interroger sur ce qui nous entoure.

Premièrement, on observe qu’Annie Ernaux nous décrit des scènes de la vie quotidienne assez banales, pourtant rares dans la littérature. En effet, le « lecteur moyen » a davantage l’habitude de lire des romans fantastiques et/ou retraçant des histoires palpitantes, plutôt qu’une longue description d’une « corvée » de la vie quotidienne dans les centres commerciaux d’une banlieue. Cela crée à la fois un décalage, car le lecteur ne s’attend pas à ce sujet, mais aussi une identification du lecteur à l’auteure et à l’histoire, car nous fréquentons tous ces mêmes centres commerciaux. Celui-ci est donc plus facilement intrigué et captivé par ce récit. De plus, on comprend, par les descriptions de l’auteure, que le centre commercial est le reflet de la société, abordant des questions de la lutte des classes à celles du mélange culturel, et de la cohabitation entre tous les citoyens. Par exemple, lorsqu’elle écrit « Le centre commercial est le lieu où se côtoient toutes les couches de la société, où se mêlent toutes les cultures, où se confrontent toutes les identités. C'est un microcosme de la société ». Ce qui montre bien la dimension sociologique de son œuvre, les centres commerciaux accueillent tout le monde, même si on y retrouve peu de personnes très aisées ou très pauvres.

Ensuite, on remarque qu’Annie Ernaux observe chaque détail, même les plus insignifiants tels que les publicités, annonces, couleurs et sons du magasin dans le but de décrire de manière précise et objective la réalité du centre commercial, pour impliquer le lecteur dans son récit. Annie Ernaux a aussi pour but de montrer au lecteur les mécanismes de ces centres commerciaux qui poussent les clients au maximum d’achats possibles, de par l’abondance de ces couleurs, sons et annonces. On le comprend très bien quand l’auteure écrit « Tout, ici, est fait pour donner l'illusion d'un choix immense. Les couleurs, les musiques, les noms de produits criés à la sonorisation. » et « Les hypermarchés ont tout pour que l'on y passe des heures et que l'on y achète tout, sans s'en rendre compte. [...] Des sons et des images ont pour rôle d'orienter le consommateur vers les produits, de le faire rêver ». Cela met en avant la volonté de ces franchises de faire consommer et donc de générer du profit, et ce sans aucune morale, mais cela met aussi en avant la tentation que nous subissons tous, sans nous en méfier, de consommer et bien sûr de posséder de nouveaux biens.

Enfin, on remarque que l’auteure utilise un style d’écriture sobre et très simple, sans artifice, avec des phrases très courtes qui viennent, entre autres, rythmer le récit : on le remarque quand Annie Ernaux écrit « Je suis entrée dans le centre commercial. J'ai regardé les lumières. » ou alors « Je suis restée là un moment. ». Ces phrases très courtes, simples et directes permettent à l’auteure de décrire simplement ce qu’elle observe, de sorte à le rendre facile à comprendre et à mettre en avant le fond de sa pensée sans le cacher derrière un style élaboré. De plus cela renforce aussi l’impression de proximité du lecteur vis-à-vis de ce livre. Pour finir, cette écriture directe et dénuée d’artifice pour décrire un quotidien simple et sobre crée un parallèle entre le fond et la forme de ce livre.

En somme, le style d’écriture d’Annie Ernaux est très particulier, on comprend que le livre a une dimension sociologique importante grâce à la description du quotidien. On remarque aussi que l’auteure cherche à nous montrer les mécanismes cachés qui régissent notre société de consommation par le biais d’observations minutieuses de l’environnement du centre commercial. Puis, on observe que le style direct et sobre d’Annie Ernaux nous permet d’accéder plus facilement au message qu’elle veut véhiculer, et donc d’augmenter la portée du livre et de sa critique en touchant un public le plus large possible.

Ensuite, la critique qu’Annie Ernaux effectue sur notre société représente l’élément central du livre. En effet, elle dénonce notamment la manière dont les centres commerciaux, qui reflètent notre société de consommation, créent une culture de l'oubli. La « culture de l’oubli » passe avant tout par la suppression de l’identité des clients, au profit d’une identité collective, impersonnelle et consommatrice, et ce par le biais de l’abondance de sons, de couleurs et d’annonces. Elle écrit : « Le décorum culturel déverse ses fragments : représentations, citations, allusions, incitations, échos de la télévision, du cinéma, de la musique ». Cela est pourtant l’exact opposé de la banlieue aux cultures diverses où le récit se déroule. On voit aussi l’accueil à contrecœur des personnes en marge de la société, de par leur culture ou le manque d’argent, et donc moins enclins à rentrer dans la norme et à consommer. Ceux-ci ne se sentent pas les bienvenus dans ces centres commerciaux. Annie Ernaux nous dit « Comme d’habitude, je remarque que la clientèle du soir, plus jeune, plus diverse ethniquement, contraste avec celle du jour. L’heure des courses ségrégue les populations de l’hyper » mais s’interroge aussi (ainsi que le lecteur) « Est-ce que (ils) choisissent le soir par commodité ou parce qu’ils se sentent moins dévisagés à cette heure tardive et de moindre fréquentation ? ». Cela montre bien le sentiment de non-appartenance

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