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Manon lescaut, la rencontre à Amiens

Commentaire de texte : Manon lescaut, la rencontre à Amiens. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  8 Avril 2024  •  Commentaire de texte  •  1 846 Mots (8 Pages)  •  51 Vues

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Analyse linéaire : Manon Lescaut, l’Abbé Prévost la rencontre amoureuse

Introduction :

    Antoine François Prévost (1697-1763) eut une vie aventureuse et rocambolesque, en contradiction avec son titre ecclésiastique d'abbé. Sa naissance dans une famille aisée de la noblesse de robe lui a permis de suivre une éducation soignée. Il fut un érudit à l'incroyable ardeur de vivre, qui s'est lancé à découverte du monde : il s'est engagé plusieurs fois dans l'armée, a effectué plusieurs noviciats chez les jésuites, est devenu bénédictin en 1721, a effectué de nombreux voyages en Europe, notamment en Hollande ou à Londres en Angleterre : il était criblé de dettes et victime d'une lettre de cachet. Il meurt d'apoplexie en 1763. Manon Lescaut, dont le titre original est Histoire du Chevalier des Grieux et de Manon Lescaut est le septième tome des Aventures et Mémoires d'un homme de qualité qui s'est retiré du monde. Publié une première fois en 1731 puis une deuxième fois en 1753, Manon Lescaut est une œuvre majeure du XVIIIème siècle qui s'inscrit dans le mouvement du retour de la sensibilité après le rationalisme des Lumières. L'abbé Prévost, mettant à profit son art du récit et de la mise en scène, dépeint un « exemple terrible de la force des passions ». Le personnage de des Grieux, soumis à l'amour irrésistible de Manon, est peu à peu entraîné vers la déchéance. Cet extrait de Manon Lescaut, de l'abbé Prévost, constitue une scène attendue du roman : la rencontre amoureuse. Dans cette scène inaugurale, le lecteur peut déjà imaginer la destinée de ceux qui ne sont pas encore amants. Le hasard d’un évènement (la flânerie désœuvrée de Des Grieux qui, en compagnie de son ami Tiberge, attend son départ fixé au lendemain) met en présence Des Grieux et Manon qui débarque du coche d’Arras. C’est le coup de foudre immédiatement. Ce récit du premier souvenir est placé tout entier sous l’éclairage des suites fatales de l’aventure. Deux regards se superposent : celui du jeune chevalier, charmé par Manon et celui d’un narrateur mûri par l’expérience douloureuse de la passion : récit et confession se conjuguent pour poser pour la première fois l’une des questions fondamentales du roman : Qui est Manon ? La scène est donc l'objet d'un récit rétrospectif : avec le recul du temps, le narrateur se montre capable de porter un jugement critique sur sa vulnérabilité d'alors. Pour cette raison, le récit nous fait l'analyse psychologique, lucide et ironique de cette rencontre amoureuse. 


Annonce du plan :

I. Une rencontre sous forme de coup de foudre

1. Un portrait allusif de Manon

2. La rencontre

II. Le plaidoyer et le travail du souvenir

1. Une apologie personnelle

2. L'annonce d'une passion fatale

  1. Une rencontre sous forme de coup de foudre
  1. Un portrait allusif de Manon

Seuls quelques mots esquissent la silhouette de Manon. Le narrateur déjoue l'attente en ne donnant aucun portrait de Manon : « charmante », « fille », « moins âgée », « plus expérimentée ». Aussi ténue que soit l'évocation de Manon, sa présence n'en est pas moins forte. L'emploi de l'intensif « si charmante » donne un caractère hyperbolique à cette apparition. L'adjectif « charmante », qui qualifie Manon, peut se lire de deux façons : jolie ou ensorceleuse. Manon semble jeter un sort au narrateur. Les mots « charmant » et « charme » sont utilisés trois fois dans le passage. Le texte repose sur un balancement avant/après la rencontre. On passe ainsi d'un champ lexical de la timidité à un vocabulaire de la passion : « sagesse », « retenue », « excessivement timide » s'opposent à « enflammé », « transport », « amour », « cœur », « désirs ». Le narrateur emploie le registre lyrique. L'apparition de Manon dessine une fracture dans l'existence de des Grieux : le pronom « moi » répété en incise dans la phrase « Elle me parut si charmante que moi, […], moi, dis-je, … » le souligne. Cette rencontre est aussi la première étape d'un apprentissage amoureux (semblable au roman picaresque) où la femme séductrice mène le jeu alors que le jeune héros, passif, subit le charme. Noter la longueur inhabituelle de la phrase qui permet de décrire le processus de métamorphose du candide en amant passionné (« Elle me parut si charmante que moi, qui n'avais jamais pensé à la différence des sexes, ni regardé une fille avec un peu d'attention, moi, dis-je, dont tout le monde admirait la sagesse et la retenue, je me trouvai enflammé tout d'un coup jusqu'au transport. »). Un seul instant modifie immédiatement et pour toujours l'ordre des choses : la reprise de l'adverbe « déjà » le souligne (« L'amour me rendait déjà si éclairé » et « qui s'était déjà déclaré »).

2. La rencontre

Le narrateur est là par hasard avec un ami. Il agit au début par simple curiosité, sa démarche est complètement innocente. La rencontre appartient au domaine de l'instant, du coup de foudre : l'adverbe « tout d'un coup » et l'emploi du passé simple « je me trouvais » le confirment. Phénomène d'isolement exprimé par le parallélisme « Il en sortit » / « Il en resta une ». Le connecteur d'opposition « Mais » souligne le caractère exceptionnel de cette rencontre. Manon est désignée comme unique par la comparaison avec d'autres femmes.
Le récit inscrit d'emblée un amour fondé sur la sensualité comme le montre la comparaison, l'hyperbole « coup mortel » et l'emploi du mot « désirs ». La communication établie entre les deux personnages passe par le regard mais aussi par la parole : verbes de parole « demandait », « répondit ». L'échange se fait d'autant plus facilement que des Grieux a perdu sa timidité. Un jeu de proximité dans la passion et de recul ironique s'établit entre le narrateur et cet autre lui-même qui appartient au passé. Ainsi, le vocabulaire de la passion avec la périphrase « maîtresse de mon cœur », et le vocabulaire de la préciosité avec « enflammé », « transport » témoignent d'une connaissance de l'amour qui est celle du narrateur plus âgé, et non celle du jeune des Grieux. L'utilisation d'une allitération douce en [m] dans la phrase « je m'avançai vers la maîtresse de mon cœur » montre déjà l'amour de des Grieux. La métamorphose due à cette rencontre nous est d'ailleurs présentée comme le fruit d'une puissance capable « d'éclairer ». Cet amour fait basculer le jeune des Grieux dans l'âge adulte, l'âge de la connaissance, en ne lui inspirant que des intentions élevées.


II. Le plaidoyer et le travail du souvenir

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