Manon lescaut, l'Abbé Prévost

Introduction : En 1731, l’Abbé Prévost, homme d’église à la vie sulfureuse, publie le dernier tome des Mémoires et aventures d’un homme de qualité qui s’est retiré du monde dans lequel un « homme de qualité », Monsieur de Renoncour, relate l’Histoire du Chevalier des Grieux et de Manon Lescaut. Ce roman fera scandale et sera condamné par deux. Pourtant, ce roman devait constituer pour les lecteurs, « un traité de morale». En montrant les ravages de la passion sur ces personnages, l’Abbé Prévost souhaitait encourager le lecteur à résister à la passion et à se préserver du péché.

Présentation de l’extrait : Dans cet extrait, nous assistons à la première rencontre, fortuite, entre DG et ML. En effet, DG raconte au moyen son histoire d’amour avec ML à R. Il raconte ici leur première rencontre et fait part de son coup de foudre pour ML.

Problématique : Nous nous demanderons comment s’organise cette scène de rencontre et dans quelle mesure elle annonce la fin tragique du roman.

Plan : Nous distinguons trois mouvements dans ce texte :

- De la ligne 1 à la ligne 5 : Le cadre dans lequel a lieu la rencontre entre CDG et ML.

 - De la ligne 5 à la ligne 12 : Le coup de foudre de CDG pour ML.

- De la ligne 12 jusqu’à la fin : L’échange entre CDG et ML.

Mouvement 1 : Dès la première phrase de son récit, DG insiste sur les circonstances remarquables de la rencontre à venir. L’utilisation du verbe “avait marqué” est significative car il souligne un destin inévitable (c’est parce que CDG retarde son départ qu’il rencontre ML) et il marque le début de sa relation amoureuse avec Manon. L’interjection « Hélas » dès la seconde phrase confirme l’importance de cette rencontre et l’oriente vers le registre pathétique et tragique. L’interjection et la phrase exclamative et négative qui suivent, préviennent le lecteur que le récit débute sous le signe du regret.

Elles créent aussi un effet d’attente : le lecteur se demande ce qui peut bien provoquer un tel regret. Cet effet d’attente trouvera une forme de réponse à la ligne suivante avec l’hyperbole « toute mon innocence » à la fin de la phrase : DG regrette la perte de son innocence due à sa rencontre funeste avec ML.

Des lignes 2 à 4, DG retarde le moment d’évoquer la rencontre, comme pour créer un effet d’attente. Il a recours à une phrase complexe qui permet d’introduire un autre personnage important, Tiberge, l’ami qui saura le sortir de nombreuses situations. On retrouve certains éléments rendent le récit authentique comme « coche d’Arras ». L’emploi du « nous », qui inclut Tiberge et lui, le dégage de toute responsabilité pour ce qui va suivre. Par contraste, la phrase courte qui suit lance véritablement l’action et concentre l’attention du lecteur sur les femmes.

Mouvement 2 : A partir de la ligne 7, CDG évoque son coup de foudre avec l’hyperbole « si charmante » et le verbe « me parut », qui montre qu’il subit ce coup de foudre. Le point de vue est interne et le lecteur vit la scène à travers les yeux de CDG. L’utilisation de l’adjectif qualificatif « charmante » est polysémique car le charme désigne non seulement la beauté de la jeune femme, mais aussi le pouvoir ensorceleur de ML. L’utilisation de la proposition subordonnée « si…que » montre que le personnage se transforme sous le sort de l’héroïne. Nous remarquons une description très méliorative, avec l’emploi des termes « sagesse », « retenue », « admirait », et le lexique de la passion : « enflammé tout d’un coup jusqu’au transport ». Des lignes 7 à 10, CDG dessine son autoportrait mélioratif et fait de lui un jeune homme innocent, vertueux, subitement possédé par la passion. La périphrase « maîtresse de mon cœur » renforce encore la relation amoureuse entre DG et ML.

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