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La Bruyère, Les Caractères, "De l'homme", livre XI, fragment 35

Commentaire de texte : La Bruyère, Les Caractères, "De l'homme", livre XI, fragment 35. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  6 Mars 2024  •  Commentaire de texte  •  2 641 Mots (11 Pages)  •  56 Vues

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LA BRUYERE

LES CARACTERES « DE L’HOMME »

IRENE LIVRE XI FRAGMENT 35

Projet de lecture :

Analysez la mise en scène d’une malade imaginaire (hypocondriaque) qui derrière la légèreté permet de délivrer de sombres réflexions sur la nature humaine

INTRODUCTION

Dans « les caractères » publié en 1688 La bruyère dresse une série de portraits qui présentent des contre modèles pour la société classique portée sur des valeurs de mesure, de modération, de civilité et de vérité.

La Bruyère propose ainsi dans son œuvre un regard critique sur les hommes

Dans le livre XI des Caractères, intitulé « De l’Homme », il brosse un portrait pessimiste « d’après nature » de l’être humain, ainsi que l’auteur le formule dans sa préface. S’appuyant sur ses propres observations de la vie de cour, le moraliste rédige des maximes et des portraits de types sociaux incarnant des défauts et des vices communément répandus.

L’homme est vaniteux, inconstant, égoïste , il craint la mort sans avoir apprécié la vie.

Le portrait d’Irène, fragment 35 du livre XI,   se distingue pourtant des autres à bien des égards.

Cette femme hypochondriaque  ( personne ayant une crainte excessive ou croyance d’etre atteinte d’une maladie grave ) vient consulter un oracle pour trouver une solution à ses maux

En effet, le fragment 35 prend la forme d’un dialogue plein de vivacité, qui joue du décalage burlesque entre le ton familier d’une banale consultation médicale et la noblesse du sujet puisque Irène, dans le sanctuaire d’Épidaure, converse avec un dieu.

Nous étudierons comment La Bruyère met en scène le type de l’hypochondriaque pour délivrer, sous des apparences de légèreté des réflexions assez sombres sur la nature humaine.

1/ UNE CONSULTATION MEDICALE BURLESQUE (l. 2 à 10)

La première phrase est une introduction

Le présent de narration des trois verbes en donnant du dynamisme à cette phrase est une façon d’accélérer le récit et d’en finir au plus vite avec la présentation des circonstances « se transporte » « voit » « consulte »

Cette scène semble se situer dans l’Antiquité comme le montrent les éléments renvoyant à la Grèce Antique: «Épidaure», «Esculape» (dieu de la médecine), «temple», « le dieu », « l’oracle », « Fils d’Apollon».

L’auteur installe un cadre antique , celui de la consultation des oracles religieux da la Grèce antique , le sanctuaire d’Epidaure était situé en Argolide et était l’un des plus fréquentés de l’époque classique.

Néanmoins Irène pourrait être une contemporaine de La Bruyère car des éléments renvoyant à la France du XVIIe siècle sont présents: si l’on excepte les quelques termes renvoyant à l’Antiquité, tout le reste de l’échange renvoie à une consultation médicale parfaitement semblable à celles qui se pratiquent à l’époque de l’auteur, comme le montre le champ lexical de la médecine : « consulte », « ordonne», «insomnie», «prescrit», «remède», «guérir», «diète», «conseils», «science».

Les maux dont se plaint Irène sont eux aussi fort universels: « lasse et recrue de fatigue», «insomnies», «sans appétit», «pesante», «indigestions».
Par ailleurs, Irène est un prénom qui, en grec, signifie « paix » ; il est ici utilisé de manière parfaitement ironique par La Bruyère, parce qu’Irène, hypocondriaque,  est inquiète pour sa santé,

De plus, l’accumulation de la longueur du passage allant de « d’abord elle se plaint » jusqu’à « si saine que j’ai été » , + des nombreuses questions au dieu médecin, + des propositions,  renforce l’impression qu’Irène est loin d’être en paix sur sa santé.

Ce mélange permet à La Bruyère de créer un effet de pittoresque et d’exotisme en installant sa saynète dans un décor situé dans une époque et un espace différents , mais c’est pour mieux souligner la réflexion qu’il propose sur la peur de vieillir.

La Bruyère écrit cette consultation médicale à la manière d’un dialogue de comédie, même s’il conserve le discours indirect 

À chaque question de la patiente, qui est aussi une jérémiade (fatigue, manque d’appétit, insomnies, poids, indigestions), le dieu répond nettement, directement et, pour chaque mal, apporte une solution pleine de bon sens mais qui ne répond pas du tout aux espérances d’Irène qui espère un miracle

On notera que les réponses de l’Oracle qui entrent systématiquement en opposition aux questions d’Irène,   elles sont simples, rapides , invitant à la mesure  

« Ma vue s’affaiblit…..prenez des lunettes dit Esculape »

Elle se plaint → interprétation  → l’homme se complait dans la plainte sur son sort

° Lasse et recrue de fatigue → redondance +champs lexical des  maux .                                     Termes négatifs et péjoratifs comme « sans appétit » « ni ni » « maux » « lasse »

Dans ce fragment, à travers Irène La Bruyère fait la peinture du mode de vie des courtisans, avec ses excès, ses nuits sans sommeil, ses fêtes et sa paresse.

Le moraliste joue du burlesque parce qu’il s’agit ici d’une consultation d’un dieu du panthéon grec à travers le rituel mystique de l’oracle, dans un temple sacré, moment nécessairement empreint de solennité et de noblesse :

  • Or le sujet est trivial, ( que tous le monde connait ) Irène est une patiente geignarde et pénible qui ne

souffre pas de maux véritables; quant au dieu exaspéré par Irène, il apparaît plutôt comme l’expression du sens commun, à l’intelligence pratique et terre à terre et non abstraite et métaphysique, ce qui crée un décalage fort drôle.

2/ DE L’HUMOUR AU SERIEUX

Progressivement, La Bruyère fait basculer son texte du discours indirect («elle lui déclare que », l. 415) au discours direct, le récit prend des allures de dialogue de théâtre   (« ma vue s’affaiblit, dit Irène ; - Prenez des lunettes, dit Esculape ;- je m’affaiblie moi-même, continue-t-elle, et je ne suis ni si forte ni si saine que j’ai été ;- C’est, dit le Dieu , que vous vieillissez ;- Mais quel moyen de guérir de cette langueur ?»

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