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Comment la littérature, activité intellectuelle, peut-elle faire éprouver des sensations avant tout ?

Dissertation : Comment la littérature, activité intellectuelle, peut-elle faire éprouver des sensations avant tout ?. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  16 Octobre 2023  •  Dissertation  •  3 361 Mots (14 Pages)  •  74 Vues

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Sujet : « Je sentis avant de penser » ; c’est ainsi que Rousseau définit le pouvoir qu’eut premièrement la littérature sur lui. Vous direz ce que vous inspire cette réflexion.

Problématique : Comment la littérature, activité intellectuelle, peut-elle faire éprouver des sensations avant tout ?

La littérature s’adresse à la perception sensible et esthétique pour nous faire vivre une expérience

La littérature fait appel à la mémoire, et exprime des sujets au coeur de l’expérience personnelle pour mettre en relation la sensibilité de l’auteur et du lecteur

Les sensations sont le point de départ de l’acte créateur littéraire

«Tout commence par la sensation. Aucune idée innée, aucun sens intime, aucune conscience morale ne préexistent dans l’être à l'assaut des choses». Ainsi Jean-Pierre Richard définit dans Littérature et Sensation l’importance de la sensation dans notre perception du monde et de la littérature. Rousseau, écrivain et philosophe du XVIIIe siècle, écrit dans le livre I des Confessions, « Je sentis avant de penser » pour définir le pouvoir qu’eut premièrement la littérature sur lui. Cette citation interroge la relation entre penser - du latin « pensare », soupeser - qui signifie utiliser son esprit pour concevoir quelque chose ; et sentir, percevoir par les sens. Il établit à travers cette citation une hiérarchie de temps à travers l’adverbe « plus tôt » : lors de ses lectures, il a éprouvé avant de concevoir. Les premières choses qui lui soient venues sont des sensations, puis ces dernières se sont traduites à travers la réflexion. C’est un renversement de la hiérarchie classique de ces deux notions, particulièrement au siècle des Lumières, qui a souvent donné le primat à la raison plutôt qu’aux passions. À première vue, la lecture est une activité intellectuelle, qui nécessite une certaine culture et intelligence afin d’en comprendre les enjeux. Lorsqu’on lit, on exerce notre pensée et avant de pouvoir éprouver les potentielles sensations que peuvent nous procurer la littérature, il faut apprendre à lire, comprendre les concepts exprimés dans un livre, suivre le fil de la narration… Bref, il faut faire preuve de raison, de réflexion. C’est la capacité de lecture qui permet la sensation : un homme illettré ne ressentira jamais rien devant un ouvrage, si ce n’est de l’incompréhension. Il paraît alors évident qu’on pense avant de sentir. Cependant, Rousseau, affirme dans un ouvrage qui se veut biographique, donc proche de la réalité, qu’au contact de la littérature, il a senti avant de penser, ce qui paraît paradoxal. Comment la littérature, activité intellectuelle, peut-elle faire éprouver des sensations avant tout ? La littérature s’adresse à la perception sensible et esthétique pour nous faire vivre une expérience. Elle fait également appel à la mémoire, et exprime des sujets au coeur de l’expérience personnelle pour mettre en relation la sensibilité de l’auteur et du lecteur. Les sensations sont finalement le point de départ de l’acte créateur littéraire.

La littérature se définit comme l’ensemble des oeuvres écrites auxquelles on donne une finalité esthétique. On en dégage ainsi les oeuvres scientifiques, comme les ouvrages d’architecture ou de médecine par exemple. Ainsi, le mot d’ordre lors de l’écriture est l’esthétisme, qui passe par les sens. Notre perception sensible semble alors nécessairement stimulée lors de la lecture, et ce qui prime est l’attention aux sens, et à la sensation du beau. À travers cela, l’auteur décuple les sens, et peut nous faire vivre une véritable expérience.

Pour cela, les textes littéraires incluent très souvent des détails sensoriels. En décrivant des sensations perceptibles par le lecteur, l’auteur s’assure de lui faire ressentir les mêmes choses. Par exemple, Francis Ponge porte dans Le parti pris des choses une attention particulière à la description sensible de certains éléments banals. Une description qui passe par les sens, et qui crée des impressions fortes. En effet, les poèmes de Ponge sont dédiés à l’étude d’un objet spécifique, détail par détail, sens par sens, ce qui permet de donner l’impression d’être au plus près de l’objet. Ses textes retranscrivent la volonté de créer un regard nouveau sur les choses banales et surprendre le lecteur en le poussant à admirer la beauté dans les objets du quotidien. Tout devient alors sensation, un cageot, une huitre ou un papillon se transforment, et rendent au lecteur sa capacité à ressentir un monde sur lequel il s’est habitué à penser. Autre exemple : l’écriture des sensations de Claude Simon, notamment dans Le Tramway. Dans ce roman publié en 2001 qui décrit le voyage d’un tramway parallèlement au voyage vers la mort, Simon travaille sur la langue en privilégiant les sens et les sensations : «respirant les senteurs des pins et des figuiers ». « les petites cueilleuses impubères dont les jambes pendantes dorées par le soleil et tachées de mauve par les raisins se balançaient comme une frange couleur de fleurs et de rires.» L’auteur décrit ici un paysage champêtre au début de l’automne, et on peut recenser l’utilisation de trois sens différents : l’odorat, la vision, puis l’ouïe. À travers cette avalanche de sensations, l’auteur cherche à transmettre des impressions, à stimuler les sens. On s’imagine alors respirant l’odeur de pins et de figuier, ce qui propulse dans un monde jusqu’alors inconnu. L’écriture des saveurs est aussi sonore lorsqu’on les lit à voix haute. L’allitération en « f » dans « frange couleur de fleurs et de rires » traduit une volonté de s’adresser aux sens dans leur réception autant que dans leur expression. Inclure des détails sensoriels est certainement une manière privilégiée de s’adresser aux sens, mais ceux-ci sont trop rares et intenses pour s’adresser à la perception sensible dans son ensemble. La description le permet, et invite le lecteur à s’immerger complètement dans l’œuvre.

La description permet de se représenter plus ou moins précisément la nature, le lieu et le temps, mais également les émotions, les sensations et les passions qui traversent une oeuvre. On peut différencier plusieurs types de description, à commencer par la description narrative. Elle informe le lecteur des caractéristiques du lieu de l’action, et permettent alors de s’immerger dans le réel de l’oeuvre. L’auteur y fait un tableau de ses personnages, du lieu, de l’atmosphère du cadre et de l’époque, invitant celui qui le

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