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Les défrichements décris par Suger

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Par   •  20 Mars 2020  •  Dissertation  •  2 105 Mots (9 Pages)  •  694 Vues

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Les défrichements décris par Suger


        Le texte qui nous est proposé est un texte écrit par Suger pendant la première moitié du XIIe siècle. Il est extrait de Liber de rebus in admnistratione sua gestis, qui a pour vocation à laisser traces de l’œuvre administrative de l’abbé. Ce dernier est un homme d’Église, qui devient abbé de l’abbaye de Saint-Denis en 1122. Il entame alors des réformes et une reconstruction de l’abbaye, celle-ci sera alors la première d’Europe à être de style gothique. Suger se rapproche du roi autour de 1130, en devant un proche conseiller. Régent de 1147 à 1149 pendant que Louis VII est parti en croisade, il s’éteint en 1151. L’abbé a théorisé la pyramide féodale, en plaçant le roi tout en haut de la hiérarchie sociale, et a rédigé un récit « biographique » sur la vie de Louis VI, élément déclencheur de la production historiographique de l’abbaye à venir. Les diverses localités énoncées dans le document sont localisées dans la Beauce et au sud de Paris. Suger parle toujours à la première personne du pluriel, désignant par là l’institution de l’abbaye de Saint-Denis dont il est dirigeant. La rédaction du texte prend place dans un contexte de forte croissance rurale, qui est la conséquence de l’amélioration globale des techniques cultures, la surexploitation des terres vacantes, et les terres nouvellement mises en culture.

Pour analyser le texte, nous proposons de commencer par aborder la gestion de la terre, pour continuer sur la puissance de l’abbaye, avant de terminer sur les rapports entre ecclésiastiques et laïcs.

Pour commencer, nous proposons d’aborder l’approche et les différentes actions mises en place et impulsées par l’abbaye de Saint-Denis sur ses terres.

Le texte parle des défrichements qui sont, au XIIe siècle et dans la Beauce, à leur apogée. On peut tout d’abord remarquer que ce mouvement, d’abord mené par les paysans seuls, est ici dirigé par l’abbaye qui décide de défricher une certaine quantité de terre. Il est à distinguer les défrichements individuels, souvent clandestins, menés par les paysans pour tenter d’échapper aux charges seigneuriales et qui ont laissé peu de traces écrites, des défrichements collectifs et plus importants, menés sur de grandes surfaces forestières ou marécageuses, dirigées par la puissance aristocratique seigneuriale. Le défrichement est à associer à la croissance rurale qui voit la démographie augmenter dans ces espaces, et les progrès techniques dans la métallurgie, qui permettent de gagner de l’efficacité dans la coupe d’arbres. Ces défrichements ont plusieurs objectifs. Déjà, la mise en culture de ces nouvelles terres (les terra nova) permet, au niveau des clercs, d’accroitre leur domination foncière et de voir la possibilité d’imposition augmenter de manière significative, permettant de comprendre pourquoi Suger organise cela sur ses terres. Un deuxième objectif vise aussi à gagner de l’espace pour la fondation de nouveaux monastères ou de nouveaux villages.

En effet, Suger parle de la fondation de plusieurs villages, à Vaucresson ou à Villaines. Ces nouvelles implantations sous forme de colonies gagnées par défrichement sont désignées par le terme générique de Villeneuve. Leur mise en place est motivée par l’essor démographique des campagnes d’une part, et pour des motifs économiques d’autre part, à travers le droit de ban qui pouvait s’exercer sur les habitants nouveaux venus. On peut voir que les villages fondés par l’abbaye de Saint-Denis semblent être attractifs, puisque Suger précise « [qu’il] y a déjà soixante hôtes et […] beaucoup d’autres veulent encore venir » : en effet, les seigneurs ont globalement l’habitude de distribuer des lots de terre et d’alléger les redevances (expliquant pourquoi l’abbaye « [remet] aux paysans le cens minime qu’ils payaient [sur le lieu] »). Mais l’objectif final restant des considérations économiques, l’impôt reste d’une importance capitale, Suger précisant que « [ils se sont] réservés le champart sur la terre » : le champart désigne un impôt seigneurial prélevé sur les récoltes (à l‘opposé du cens qui lui est un impôt sur la propriété foncière dû chaque année au seigneur).  

Par ailleurs, les efforts de l’abbé vont porter sur la restauration du terroir et sa mise en valeur. Cette mise en avant de l’impôt du champart sur celui du cens noté ci-dessus est aussi intéressant dans la mesure qu’elle s’explique par le fait que le champart favorisait les paysans détenteurs de champs à faibles rendements (puisque proportionnel à la récolte). Cela permet d’y voir les rendements globaux de ces terres, qui procurent dans un premier temps de faibles récoltes. En découle une volonté de la part des seigneurs de pousser la restauration des terroirs et la rationalisation de la gestion. Cela passe par une exploitation du réseau hydrographique, permettant de créer un « vivier » qui pallie à « la sécheresse du plateau de Beauce », des défrichages « à la charrue », etc. Cette volonté d’amélioration des rendements est aussi bien dirigée vers les terres nouvellement gagnées grâce au défrichement, que vers les « parties [s] anciennement cultivées [s] du terroir », et est explicité par l’auteur quand il parle de faire en sorte « que les retraites jadis habitées par les dragons voient grandir le roseau du jonc », phrase extraite d’un passage du Livre d’Isaïe.  

Cette restauration de terroir prend place dans une volonté administrative de développer les terres possédées par l’abbaye, dont le pouvoir et l’influence croissent d’autant.

Nous proposons de poursuivre sur une seconde partie traitant de la puissance de l’abbaye.

À partir de la deuxième moitié du XIe, l’Église favorise la constitution de seigneuries ecclésiastiques en opposition aux seigneuries laïques. Ces seigneuries ont plusieurs objectifs, qui se retrouvent au travers du texte : la restauration du prélèvement paysan, le rétablissement ou la création de centres d’exploitations foncières rentables et l’incitation au défrichement et à la colonisation. Il est aussi intéressant de noter que les localités abordées dans le texte peuvent être assez éloignées les unes des autres, faisant apparaitre le possible éclatement spatial des possessions d’une abbaye ou d’un seigneur. On peut relever le fait que Suger a un rôle de gestionnaire des terres de l’abbaye en tant qu’abbé, et il apparait donc normal qu’il souligne précisément les résultats de ses efforts : les revenus quintuples à Villaines de 20 livres à 100 ou 120 livres ; à Guillarval, « jadis de peu de rapport », il augmente « à cinquante muids de grain et plus ». Ceci est cependant à prendre avec précautions, compte tenu de la possible propension de l’auteur à surévaluer son action. À travers cette vision de l’auteur, on peut y déceler une volonté d’évaluer les rendements des terres, découlant sur une gestion adaptée (par exemple, l’imposition du champart au lieu du cens), le tout dans un souci clair de rentabilité.

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