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Historiographie de l'histoire militaire à l'époque moderne

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Par   •  6 Décembre 2016  •  Fiche  •  2 939 Mots (12 Pages)  •  1 101 Vues

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Historiographie de l'histoire militaire à l'époque moderne

  1. Le temps de la relégation : 1945-années 1960

Le premier temps concernant l'histoire militaire est celui de la relégation. Dans la période allant de 1945 aux années 1960, l'école des Annales était le mouvement qui dominait la discipline historique. L'histoire militaire n'était pas son genre. Pourtant, le genre était très à la mode au XIXe siècle. Elle préfèrait étudier l'histoire événementielle et politique. Les différentes défaites de la France, en 1940 ou pendant les guerres coloniales, expliquent ce phénomène. Cela n'incite pas à s'y intéresser. Cependant, l'histoire militaire est beaucoup pratiqué par les militaires eux-mêmes, concernant les questions de tactique et de stratégie. Il y a quand même des exceptions, notamment à travers la figure d'Emile Léonard. Il publie en 1958, L'armée et ses problèmes au XVIIIe siècle. Il s'agit d'une étude du "moral" de l’armée et de la nation, sous l’effet des diverses conceptions militaires qui se sont succédé, depuis la stratégie d’attentisme et d’économie des dernières années de Louis XIV jusqu’aux réformes de Louis XV, marqué par la remontée militaire de la France au XVIIIe siècle.

  1. Le temps de l'adaptation : années 1960-1985

Le deuxième temps est celui de l'adaptation durant la période 1960-1985. Les historiens qui s'intéressent à l'histoire militaire, afin de gagner en audience et d'élargir le nombre de chercheurs, reprennent les méthodes de l'école des Annales. La discipline devient, de ce fait, sociale et quantitative. Une nouvelle histoire militaire apparaît. Le père de cette tendance est André Corvisier, né en 1918. Il a publié une thèse en 1964 qui montre les nouvelles orientations : L'armée française de la fin du XVIIe siècle au ministère Choiseul, le soldat. Il s'agit d'un véritable travail de bénédictain. Sa source est le fond du contrôle des troupes de l'armée royale pour le XVIIIe siècle. Il étudie 70 000 fiches de soldats. C'est une tendance des Annales qui s'intéressent essentiellement au groupe. Aussi, il s'intéresse à la base, c'est-à-dire aux soldats et non plus à la figure des grands chefs militaires. C'est à ce moment-là qu'il y a des rencontres qui se font entre historiens et militaires. En 1968, le Centre d'histoire militaire de Montpellier est créé. Une commission française d'histoire militaire voit également le jour avec des militaires et des civils.

        Le travail d'André Corvisier incite à faire d'autres études sur le sujet, avec, notamment, deux perspectives :

  • Une histoire sociale d'abord. On peut prendre l'exemple d'Anne Blanchard qui publie Les ingénieurs du roi, de Louis XIV à Louis XVI en 1971. Elle a fait également une biographie de Vauban. On peut citer également Jean-Pierre Bois qui a fait une étude sur Les anciens soldats dans la société française au XVIIIe siècle, publié en 1990. Selon lui, La réhabilitation puis la réinsertion dans la société civile des soldats "estropiés et caducs" ont été engagées par Louis XIV avec la fondation de l'Hôtel Royal des Invalides en 1670. Cela a été poursuivie par Louis XV avec la création des pensions d'invalidité en 1764 et par Louis XVI avec la récompense militaire en 1776. L'Ancien Régime a su faire de l'armée un instrument décisif de progrès social : là se trouve en effet l'origine d'une politique générale de la retraite, dont l'Assemblée Constituante proclame les principes en 1790, et que les siècles suivants développeront. Il utilise les archives des Invalides. La démarche prosopographique peut être aussi mis en avant, ce qui suppose une base de donnée informatique. Gilbert Bodinier a fait ce genre d'étude concernant les officiers français pendant la guerre d'indépendance américaine. Il y a toujours une logique sociale et quantitative.

  • La deuxième perspective envisage la réflexion sur l'attitude et la psychologie du militaire, notamment sur l'attitude du soldat devant la mort. L'histoire militaire universitaire appréhende l'armée essentiellement à travers la société, la culture ou encore la politique. Les travaux consacrés à l'armée ou à la pensée de la stratégie militaire n'est plus l'apanage des militaires eux-mêmes. Il y a une histoire écrite par des militaires et une histoire des militaires écrites par les historiens. Ces deux histoires se croisent mais ne se mélangent pas constamment. Dans cette optique, on peut citer l'historien Jean Chagniot qui publie Paris et l'armée au XVIIIe siècle, étude politique et sociale en 1993. Ici, il s'intéresse davantage à l'intégration des troupes dans la capitale plutôt qu'à l'armée seule.

        Cette phase aboutit à l'écriture d'une histoire militaire de la France en plusieurs volumes, publiée en 1992, sous la direction d'André Corvisier. Concernant le premier tome, c'est Philippe Contamine qui le dirige.

        Durant l'année universitaire 1990-1991, le sujet du CAPES en Histoire Moderne est le suivant : Guerre et paix au XVIIe siècle en Europe centrale et orientale (1618-1721). Le sous-titre a constitué une petite révolution : aspect militaire, politique, culturel, religieux et économique.

  1. Le temps de l'émancipation : fin des années 1980 jusqu'à nos jours

Le troisième temps de cette historiographie est celui de l'émancipation de la fin des années 1980 jusqu'à nos jour. C'est une période qui voit la multiplication des travaux. L'histoire militaire acquiert sa pleine dignité et tout le monde s'y met.

        Les premiers historiens qui ont travaillé sur le sujet, continuent et évoluent comme Jean-Pierre Bois. Il quitte l'histoire sociale et empiète sur le domaine des militaires pour se consacrer à l'étude des guerres proprement dite (tactiques et batailles). Il a fait des études de bataille, dont celle de Fontenoy, mais également des biographies de militaire, notamment celle sur Maurice de Saxe. Le genre biographique devient à la mode. André Corvisier lui avait montrer l'exemple car, dès 1983, il est passé de l'étude globale à celle individuelle. Il a écrit une biographie de Louvois, le créateur de l'armée moderne sous Louis XIV.

        Ce qui marque le succès du genre, c'est que des historiens non spécialistes de l'armée, écrivent sur la guerre et les militaires, notamment Joël Cornette qui publie Le roi de guerre, essai sur la souveraineté dans la France du grand Siècle en 1993. Il fait le lien entre la guerre et la construction du système absolutiste en France avec l'analyse de la galerie des Glaces. Selon son idée, un pays en guerre entraîne un renforcement de la centralisation du pouvoir. La guerre favorise un pouvoir fort. L'absolutisme est fort car Louis XIV est un roi de guerre. Il fait un parallèle avec les Provinces-Unies indépendantes depuis 1648 et montre que l'engagement de ce  pays est contraint et  forcé dans la guerre à partir de 1672, ce qui entraîne la crise du système républicain. Celui qui bénéficie du pouvoir à ce moment précis est le stathouder qui est le chef militaire responsable de la défense. Autre historien, Arlette Farge écrit un ouvrage en 1996 sur les fatigues de la guerre. Elle étudie l'image de la guerre à travers l'iconographie et les oeuvres du peintre Watteau. L'intérêt grandissant de cette histoire permet de prendre le chemin qu'avait suivit l'historiographie anglo-saxonne.

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