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Les Etats-Unis et le monde depuis les 14 points de Wilson

Fiche : Les Etats-Unis et le monde depuis les 14 points de Wilson. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  24 Mars 2019  •  Fiche  •  1 639 Mots (7 Pages)  •  604 Vues

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Séance 5 – Les fins de non-recevoir (l'estoppel)

Commentaire d'arrêt

Assemblée plénière 27 février 2009

Robert Sabatier, poète français du XXème siècle, écrivait « la loyauté d'un adversaire est la promesse d'une amitié ». La transposition de cette expression dans un contexte juridique n'est pas sans être dénuée de sens. En procédure civile notamment, lorsque l'on touche aux fins de non-recevoir, la loyauté procédurale gagne peu à peu du terrain et le droit français à été amenée à envisager l'introduction de la théorie anglo-saxonne de l'estoppel en droit français, théorie qui prohibe une partie de se prévaloir d'une position contraire à celle qu'elle aurait prise antérieurement lorsque ce changement se produit au préjudice d'autrui. L'assemblée plénière de la Cour de cassation a été confrontée à une tentative de consécration d'un principe d'interdiction de se contredire au détriment d'autrui, via la théorie de l'estoppel, dans un arrêt en date du 27 février 2009.

Dans les faits, une société S avait demandé en référé que sa cocontractante, la société P, soit condamnée sous astreinte à lui livrer du matériel numérique dont cette dernière assurait la fabrication. En outre, la même société avait acquis les mêmes récepteurs auprès de la société K. Un quatrième intervenant, la société V, informe par la suite la société S que la société P n’avait pas la licence nécessaire à la fabrication d'un des éléments du matériel numérique. Le premier procès en référé toujours en cours, la société S saisit parallèlement le tribunal de commerce de demandes formées contre les sociétés P et K tendant respectivement à la nullité ou, à défaut, à la résolution de la seconde vente, ainsi que des dommages et intérêts pour compenser le préjudice subi du fait du stock de produits invendables qu’elle possédait. En d’autres termes, dans deux procès différents, mais dans le même temps, la société S exigeait la livraison des récepteurs et la condamnation à des dommages et intérêts pour compenser le préjudice du fait du stock de récepteurs invendables. La Cour d'appel de Grenoble, dans un arrêt du 21 avril 2004, va déclarer ces demandes irrecevables, estimant que, par les différentes procédures menées successivement en référé et au fond, la société demanderesse s'était manifestement contredite au détriment de ses adversaires. Elle en déduit que le comportement de cette dernière doit être sanctionné en vertu du principe d'interdiction pour une partie de se contredire au détriment d'autrui. Ce cheminement procédural ayant mené la Cour d'appel à soulever l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui, par le biais de la théorie de l'estoppel, a conduit la Cour de cassation à se rassembler dans sa formation la plus solennelle, amenée à se demander si la seule circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui emportait nécessairement fin de non-recevoir.

Il conviendra tout d'abord de se pencher sur le constat de la réception jurisprudentielle d'une interdiction de se contredire au détriment d'autrui (I), avant de traiter des restrictions posées par la Cour de cassation à la portée du mécanisme de l'estoppel (II).

  1. La réception jurisprudentielle d'une interdiction de se contredire au détriment d'autrui

Jugeant l'attitude de la société demanderesse contradictoire, la Cour d’appel déclare sa demande purement et simplement irrecevable en se fondant sur la règle de l’estoppel, dont elle a expressément relevé le fondement (I). La Cour de cassation a cependant cassé cette décision, au motif que les conditions de l’irrecevabilité n'étaient pas ici satisfaites (II).

A) L’accueil de la théorie de l'estoppel

La Cour d'appel, dans sa décision rendue, a visé directement la théorie de l'estoppel. Elle retient en effet, que le comportement de la société demanderesse, était contradictoire et de nature à induire en erreur ses adversaires, par la demande en référé de la condamnation sous astreinte à la livraison des récepteurs en parallèle d'une demande, au fond, de résolution des ventes conclues avec les autres sociétés intervenantes, demandant réparation du préjudice résultant de l’impossibilité de vendre les produits en stock. Par ce biais, la Cour d'appel va estimer que ce comportement doit être sanctionné « en vertu du principe suivant lequel une partie ne peut se contredire au détriment d'autrui ». L'estoppel trouve son origine dans le droit anglo-saxon et se déduit du principe de la loyauté des débats. La théorie de l'estoppel a été définie positivement par la suite en droit français, dans un arrêt de la première chambre civile en date du 3 février 2010. Il s'agit d'un « comportement procédural constitutif d'un changement de position, en droit, de nature à induire autrui en erreur sur ses intentions ». Une partie se trouve ainsi dans l'impossibilité de se contredire au détriment de son adversaire, sous peine de se voir opposée une fin de non-recevoir de sa prétention. Il faut cependant noter que cette interdiction de l’auto-contradiction n’empêche cependant pas le plaideur de changer sa stratégie de défense. Tout en accueillant l'idée d'une sanction de la contradiction au détriment d'autrui par la fin de non-recevoir, l'assemblée plénière va toutefois ici rejet la qualification de fin de non-recevoir.

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