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Colonialisme et anticolonialisme

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Par   •  1 Mars 2013  •  5 554 Mots (23 Pages)  •  1 235 Vues

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L'expansion coloniale est un fait d'une ampleur considérable, dont les conséquences dominent encore le monde contemporain. Un tel mouvement a fait naître des doctrines. À côté des colonisateurs proprement dits sont apparus des théoriciens. Les colonisateurs eux-mêmes ont parfois présenté des justifications de leurs entreprises. Des hommes d'État ont motivé la politique coloniale dans laquelle ils engageaient leur gouvernement. Ces efforts ont été d'autant plus nécessaires et systématiques que le pouvoir de l'opinion publique augmentait et qu'il fallait la convaincre. Le fait colonial s'est donc accompagné d'une doctrine : le colonialisme. En réaction est apparue très tôt une critique de la colonisation, qui pouvait être soit une attitude morale, soit une position politique allant de la simple réprobation au scepticisme, puis à la condamnation. Des doctrines ont surgi visant à légitimer cette critique : c'est l'anticolonialisme. Cette étude ne se fixe donc pas pour objet l'histoire de la colonisation, mais l'analyse des deux mouvements doctrinaux qui se sont affrontés : le colonialisme et l'anticolonialisme ; et cette analyse ne peut être menée que suivant un plan historique, car, à chaque étape de l'expansion coloniale, correspondent un certain type de colonialisme et un certain type d'anticolonialisme. L'affrontement colonialisme-anticolonialisme est constant. Mais les caractéristiques en varient avec le contexte historique comme aussi avec la nature des arguments opposés.

+ sur internetLes mots et les choses

L'apparition des mots est toujours signifiante pour l'historien. Les mots colonie et colon, hérités du latin, sont utilisés dans la langue française dès le xive siècle. Le mot « colon » désigne alors le cultivateur d'une terre dont le loyer est payé en nature. Il ne s'appliquera qu'au xviiie siècle à la personne qui va fonder ou peupler une colonie et qu'on opposera ainsi à l'habitant de la métropole. On ne parle de colonisation qu'au xviie siècle, pour définir l'action de coloniser ou le résultat de cette action. Puis, greffés sur cette souche, surgissent l'adjectif colonial, le verbe coloniser et, beaucoup plus tard, le substantif colonisateur. En France, autour de 1834, on appelle colonistes les partisans du maintien de l'occupation de l'Algérie et anticolonistes les adversaires. Par contre, les mots colonialisme et colonialiste n'apparaissent qu'au début du xxe siècle. Ils prennent très vite une nuance péjorative et, par réaction, provoquent l'apparition des termes anticolonialisme et anticolonialiste. À la différence du terme de colonisation qui concerne une action et son résultat, celui de colonialisme s'applique à la justification du fait colonial et l'anticolonialisme définit une attitude d'hostilité à la colonisation. À partir de 1960, on forgera le mot néo-colonialisme pour caractériser l'ensemble des méthodes qui visent à maintenir une domination économique sur un pays anciennement colonisé. Le vocabulaire s'est donc enrichi pour tenir compte, d'une part, du développement et de la diversité des colonisations, d'autre part, des réactions de l'opinion, d'abord indifférente, puis de plus en plus sensibilisée à l'événement.

Bien que la distinction soit parfois délicate, il convient de ne pas confondre les causes de l'expansion coloniale avec les arguments avancés pour la justifier. Les premiers fondateurs de colonies obéissent en effet à des mobiles très divers et ne donnent aucun sens à leur action. Les tentatives de justification ne surgissent que lorsqu'il faut légitimer une expansion coloniale face à ceux qui la condamnent ou n'en comprennent pas l'intérêt. Le conflit colonialisme-anticolonialisme se manifeste donc bien avant l'apparition de ces deux vocables. Toutefois, c'est jouer sur les mots que d'en chercher les origines dans l'Antiquité grecque ou romaine, voire phénicienne. L'origine latine du vocabulaire relatif à la colonisation ou à l'impérialisme a favorisé ce glissement anachronique. En fait, l'affrontement des doctrines ne commence vraiment qu'avec les grandes découvertes, mais il met en jeu des arguments qui varient avec le devenir du fait colonial lui-même. Un certain anticolonialisme ne met en cause que les formes de la colonisation, en dénonçant la violence envers les indigènes dont il prend la défense contre « colons », « affairistes » ou « militaires ». Parfois, il s'agit d'un anticolonialisme systématique, doctrinaire, qui récuse, quelles qu'en soient les modalités, le principe même de la colonisation. Dans d'autres cas, l'anticolonialisme ne se manifeste qu'en faveur des habitants d'origine européenne. Telle est la signification des effets de la révolution américaine du xviiie siècle en Europe. Il peut arriver que coexistent paradoxalement anticolonialisme et colonialisme. En Afrique du Sud par exemple, les Boers se dressent contre l'expansion britannique, mais nourrissent à l'égard des Noirs un racisme de type colonialiste. L'anticolonialisme caractérise aussi la politique d'une puissance. Nés d'une insurrection contre une métropole, les États-Unis se sont présentés, tout au moins jusqu'en 1898 environ, comme anticolonialistes. Il leur est arrivé d'ailleurs de jouer de cette attitude à des dates plus récentes, quand elle servait leurs intérêts. Il faut enfin, pour éviter toute confusion, réserver le mot d'anticolonialisme aux résistances qui se manifestent à l'intérieur des pays colonisateurs. Les résistances et les mouvements de libération des peuples colonisés ne relèvent pas de cette analyse.

D'où, pour toutes ces raisons, la nécessité de distinguer quelques moments caractéristiques dans l'histoire de ce débat.

L'affrontement des théologiens

L'affrontement commence avec les grandes découvertes et les premières occupations territoriales, et oppose alors des théologiens. C'est d'ailleurs le pape Alexandre VI qui, par la bulle Inter caetera, a, le 3 mai 1493, partagé les mondes découverts et à découvrir entre l'Espagne et le Portugal afin que « la loi catholique et la religion soient exaltées et partout amplifiées et répandues [...] et que les nations barbares soient subjuguées et réduites à la foi ». Jusqu'où pouvait-on aller dans l'oppression d'un peuple par un autre ? Pouvait-on légitimer le droit de colonisation ? Ainsi

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