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La place ANNIE ERNAUX

Dissertation : La place ANNIE ERNAUX. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  11 Octobre 2023  •  Dissertation  •  1 663 Mots (7 Pages)  •  115 Vues

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« La Place » est un récit autobiographique rétrospectif publié en 1983 par Annie Ernaux aux éditions Gallimard et récompensé par le prix Renaudot en 1984. L’auteure évoque notamment son père. A travers ce portrait, elle rend compte du milieu social de son enfance, celui où elle est née, où elle a grandi et qu’elle a quitté pour un autre milieu, une autre culture. Elle explore les thèmes de l'identité, de la classe sociale et de la mémoire.

Son récit débute par une citation de Jean Genet : « Je hasarde une explication : écrire c’est le dernier recours quand on a trahi. », cette épigraphe est-elle représentative de notre ressenti de lecture ?

Il est vrai que l’auteure trouve dans cette autobiographie un moyen efficace de dénoncer la distance qu’elle a prise avec sa famille et ses origines. Mais pour autant, peut-on qualifier ces écrits de trahison ? Ne pourrait-on pas évoquer plutôt des remords pour parler de cette œuvre ?

L'épigraphe sert à nous éclairer sur les intentions de l’auteur : c’est un aveu : le sentiment d’avoir trahi. Dans « La Place », Annie Ernaux suggère que l'écriture est une forme de rédemption pour ceux qui ont cessé d’être fidèles. Cela peut sembler être un point de vue pertinent pour ce livre, dans la mesure où l'auteur tente de se réconcilier avec le souvenir de son père, qu'elle avait en quelque sorte trahi en s'éloignant de ses racines. En effet, dans ce texte, l'auteure exprime une certaine sensation de trahison envers son père pour plusieurs raisons.

D’une part Annie Ernaux pense rompre avec son père car elle fait le constat d'une différence sociale et culturelle entre eux. Son père, ouvrier, représente pour elle un monde ouvrier et une classe sociale inférieure à la sienne. Elle écrit : « Mon père est entré dans la catégorie des gens simples ou modestes ou braves gens ». Elle-même, en tant qu'étudiante et intellectuelle, s'est éloignée de cette condition ouvrière et a cherché à s'élever socialement. La citation renvoie à ce milieu modeste où elle a été élevée, et qui n’est plus le sien désormais ; elle s’éloigne à l’adolescence de ses goûts populaires « tout ce que j’aimais me semblait péquenot, Luis Mariano, les romans de Marie Anne Desmarets, Daniel Gray, le rouge à lèvres et la poupée gagnée à la foire qui étale sa robe de paillettes sur mon lit ». Elle a eu honte du milieu où elle a grandi, elle souligne le mauvais goût, la dimension populaire de cet environnement dont elle veut se distinguer. Le sentiment d’avoir trahi son origine modeste quand on devient intellectuel est pour l’auteure accablant.

De plus, ce sentiment de trahison peut également être lié à l'ambition d'Annie Ernaux de s'affranchir des valeurs et des attentes de sa classe sociale d'origine. La culture l’a écartelée. Elle éprouve « comme une distance de classe, mais particulière, qui n’a pas de nom. Comme de l’amour séparé ». Elle perçoit sa volonté de s'élever socialement comme une rupture avec les aspirations et les valeurs de son père. « Quand je disais, « il y a une fille qui a visité les châteaux de la Loire », aussitôt fâchés, « Tu as bien le temps d’y aller. Sois heureuse avec ce que tu as ». Un manque continuel, sans fond ». Par conséquent, elle peut se sentir coupable de trahir ou d'abandonner ce à quoi son père et sa famille étaient attachés.

D’ailleurs, Annie Ernaux décrit son père comme un homme simple, aux ambitions modestes (« Leitmotiv, il ne faut pas péter plus haut qu’on l’a »), qui a consacré sa vie au travail et à la famille. Elle prend conscience de la distance qui les sépare lorsqu'elle entreprend des études et s'engage dans des activités qui ne correspondent pas aux valeurs et aux attentes de son père : « maintenant, je suis vraiment une bourgeoise ». Cette différence de parcours et d'aspirations peut créer un sentiment de trahison chez Annie Ernaux, qui se sent éloignée de son père et de ses valeurs.

Enfin, la romancière remet en question les valeurs traditionnelles auxquelles son père adhérait. Elle analyse les relations de pouvoir dans la société et souligne les inégalités sociales auxquelles son père était confronté. En exposant ces aspects, elle remet en cause l'ordre établi et peut donc manifester une forme de trahison envers son père qui avait peut-être des attentes différentes pour elle.

En somme, Annie Ernaux ressent une forme de trahison envers son père dans « La Place » en raison de la différence sociale, culturelle et des aspirations divergentes entre eux. Ce sentiment de trahison est lié à la prise de conscience de son éloignement de la condition ouvrière et des valeurs de son père : un fossé s’est créé entre eux. La culpabilité que ressent l’auteure, la honte sociale et la prise de conscience des différences entre leurs parcours de vie respective lui inspirent une forme de honte.

Enfin, si « écrire est son seul recours », c’est aussi pour souligner que, son père étant mort,

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