Mémoire sur le viol conjugal
Mémoire : Mémoire sur le viol conjugal. Recherche parmi 303 000+ dissertationsPar rilou.ghd • 6 Octobre 2025 • Mémoire • 8 344 Mots (34 Pages) • 22 Vues
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Université de Vincennes - Saint-Denis
Institut d’Enseignement à Distance
Diplôme : DU Criminologie
Matière : Crimes Familiaux
Sujet : Le Viol Conjugal
SOMMAIRE
PARTIE 1 : UNE LENTE EVOLUTION VERS LA RECONNAISSANCE JURIDIQIUE ET SOCIAL DU VIOL CONJUGAL
- LES FREINS HISTORIQUES ET SOCIAUX
- LES PREMIÈRES ÉVOLUTIONS SOCIALES, LÉGISLATIVES ET JUDICIAIRES
PARTIE 2 : L’ENCADREMENT PÉNAL ACTUEL : LA MISE EN PLACE D’UN CADRE PRÉVENTIF ET RÉPRESSIF ET SES LIMITES
- L'ÉTAT DES LIEUX : UNE PREVENTION ET REPRESSION LIMITÉE
- LES PERSPECTIVES D'AMÉLIORATIONS A LA LUMIERE DU DROIT COMPARE
INTRODUCTION :
L’affaire Dominique Pélicot et le procès Mazan ont suscité un débat intense sur la notion de consentement et sur la manière dont le droit pénal appréhende les violences sexuelles dans le cadre conjugal. Ainsi, selon le magistrat Denis Salas, “l'introduction du consentement dans la définition du viol est une réponse possible à ce procès”[1]. Par ailleurs, cette affaire a soulevé beaucoup de questions et notamment celle de comment définir juridiquement le viol lorsqu’il survient dans un espace où, historiquement, le consentement était présumé ? Afin de répondre à cette question, ce dossier analysera ainsi l’évolution de la notion de viol et plus précisément de viol conjugal. Cependant, il est important de noter que ces deux notions sont étroitement liées et que la reconnaissance du viol conjugal passe d’abord par une reconnaissance et une consécration du viol.
Ainsi, il est vrai que jusqu’à une époque récente, le viol conjugal était un sujet tabou, nié à la fois par la société et par le droit. En 1810, le Code pénal napoléonien consacrait implicitement le devoir conjugal[2], selon lequel les époux devaient mutuellement consentir à des relations sexuelles, rendant inconcevable l’idée qu’un viol puisse avoir lieu entre un mari et une femme.[3] Le consentement à l’acte sexuel était ainsi présumé dans le mariage, reléguant toute contestation de ces relations à l’espace privé, hors du champ judiciaire. Cette situation a ainsi prévalu pendant près de deux siècles. Pourtant,il y a eu des affaires comme l’affaire Tonglet-Castellano (procès en 1978) , “où deux campeuses Belges ont déposer plainte pour viol contre trois hommes pour les avoir violées dans les Calanques de Marseille pendant une nuit entière, qui a été jugé en correctionnel pour coups et blessures, le viol a été requalifié d’atteinte à la pudeur car les auteurs arguaient que les victimes étaient consentantes. Ce procès a suscité un grand nombre de réactions et notamment des manifestations qui ont pu dégénérer comme en 1976. Grâce à cette mobilisation, les pouvoirs publics se saisissent de la question et modifient la définition du viol inscrit dans le Code pénal de 1810 qui le définissait jusqu’alors comme un “ coït illicite avec une femme qu'on sait ne point consentir”[4]. Grâce au dépôt d’une proposition de loi par la sénatrice Brigitte Gros, qui sera définitvement adopté par l'Assemblée nationale le 19 novembre 1980, la qualification juridique du viol voit le jour et remplace la législation de 1810 (cité juste avant). De plus, la Cour de cassation renforce cette pénalisation avec son arrêt du 5 septembre 1990, qui a pour la première fois reconnu qu’un époux pouvait être poursuivi pour viol envers son conjoint, affirmant que le mariage ne pouvait justifier une relation sexuelle imposée. Cette évolution jurisprudentielle a marqué un tournant historique, remettant en question la présomption de consentement marital et posant les bases d’un changement législatif. Ainsi, à la suite de cet arrêt fondateur, le législateur a progressivement renforcé la reconnaissance et la répression du viol conjugal (loi du 4 avril 2006, loi du 9 juillet 2010…). Ces réformes législatives traduisent une rupture avec le passé, où les violences sexuelles dans le mariage étaient souvent minimisées, voire ignorées. Aujourd’hui, le viol est défini comme étant “Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol.” Il est puni de 15 ans de réclusion criminelle d’après l’article 222-23 du Code Pénal.[5] Toutefois, malgré ces débuts de progrès, la répression effective du viol conjugal reste confrontée à des défis importants, notamment en matière de preuve et de traitement judiciaire. Ainsi, une des difficultés majeures du traitement du viol conjugal réside dans la preuve de l’absence de consentement. En effet, le viol conjugal, comme son nom l’indique se produit dans un espace intime (un couple) ainsi, ça rend la collecte de preuves matérielles plus compliquées. Il faut notamment d’autres éléments pour établir la culpabilité de l'accusé (certificats médicaux, témoignages indirects…).[6] Par ailleurs, le dépôt de plainte constitue également un autre défi majeur. Ainsi, une part significative des victimes de viol conjugal hésite à porter plainte, par crainte de ne pas être crues ou par peur de représailles. De plus, la correctionnalisation, qui consiste à requalifier des viols en délits pour les juger devant des tribunaux correctionnels plutôt qu’en cour d’assises, continue de poser problème aux victimes. Cette pratique, motivée par des impératifs de rapidité et d’efficacité, a pour effet de minimiser la gravité des actes et d’entraîner une victimisation secondaire. Enfin, sur le plan criminologique, le viol conjugal illustre une transformation profonde des rapports de pouvoir dans le couple. L’autonomie sexuelle, qui repose sur le principe du consentement mutuel, constitue aujourd’hui un pilier central des droits fondamentaux. Cependant, les normes sociales et culturelles, qui ont longtemps légitimé une forme de domination maritale, continuent d’influencer les perceptions collectives, freinant parfois l’évolution des mentalités.
Ainsi, il en convient de se demander : Comment l’évolution du droit français a-t-elle permis de reconnaître et de criminaliser le viol conjugal, passant d’une tolérance implicite à une répression effective ?
Pour répondre à cette problématique, nous analyserons dans un premier temps l’évolution historique et législative du viol conjugal en droit français, en étudiant les freins historiques et sociaux ainsi que les grandes réformes legislatives et le rôle des mouvements féministes pour arriver au droit positif actuel. Dans un second temps, à travers l’état des lieux du droit positif, nous examinerons les défis actuels liés à la preuve, au traitement judiciaire et aux perceptions sociétales, tout en mettant en lumière les perspectives offertes par le droit comparé (volet préventif et répressif).
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