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Recherche conceptuelle

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Par   •  26 Mai 2018  •  Commentaire de texte  •  2 685 Mots (11 Pages)  •  519 Vues

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                                                    LE TRANSFERT                                             
                                                       
Joseph ROUZEL                                                         

BIOGRAPHIE

Joseph rouzel, né à Rennes en 1949, est un ancien éducateur spécialisé ayant pratiqué pendant 20 ans et ayant travaillé auprès de populations très marginalisées tels que les psychotiques et toxicomanes. Diplômé en ethnologie de l’école des Hautes Etudes en Sciences Sociales, titulaire d'un DEA d’études philosophiques et psychanalytiques  , doctorat en cours, il est aujourd’hui formateur à l'IRTS de Montpellier et psychanalyste libéral  en cabinet. Il est reconnu dans le secteur social et médico-social pour ses ouvrages et ses articles dans la presse spécialisée.
Il a créé et anime l’Institut Européen «Psychanalyse et travail social »dont les formateurs, ainsi que lui même, dispensent des formations permanentes en travail social et interviennent à la demande dans les institutions sociales et médico-sociales. Il anime également le site ASIE consacré aux questions de supervision en travail social, est à l’origine de l’association « Psychanalyse sans frontière » (PSF) et a créé un réseau social : REZO-travail-social.com.


BIBLIOGRAPHIE (liste non exhaustive)

  • Parole d'éduc. Éducateur spécialisé au quotidien, Éditions Érès, 1995.
  • Le quotidien dans les pratiques sociales. Théétète, 1998.
  • Le transfert dans la relation éducative, Dunod, 2002.
  • La parole éducative, Dunod, 2005.
  • Le travail social est un acte de résistance, (Coll. Fanny Rouzel), Dunod, 2009.


LE TRANSFERT

ÉTYMOLOGIE

le terme transfert vient de la racine indo-européenne : bher- qui signifie « porter » et va donner pher- dans la langue grecque , phoros « le porteur » ; saint Christophe « le porteur du christ » ; amphore qui porte et emporte le vin ; métaphore, déplacement et transport de sens.
Dans la langue latine, on arrive au verbe 
ferre : « porter, supporter, rapporter ».partir de ferre on verra des composés comme circum-ferre:porter autour (circonférence) ; dif-ferre « porter dans un différents sens » « remettre à plus tard » (différer) ; in-ferre « porter dans » (inférer) ; praé-ferre « mettre en avant » (préférer) ; re-ferre « porter en arrière » « renvoyer » « rapporter » (référer, référent, référence) ; et enfin trans-ferre « porter à travers » « transporter » (transfert).Ce radical ancien produit un verbe dans la langue française au XIV siècle, transférer, puis un substantif au XVIII siècle, transfert, dans le registre du commerce. Le terme utilisé par Freud est directement issu de cette même origine : Uber-targung qui signifie « transporter » « transporter a travers un espace ». le transfert si on s' en tient à cette origine sémantique indique donc un déplacement, un transport.

DÉFINITIONS

1. PSYCHOL. Phénomène par lequel un sentiment éprouvé pour un objet est étendu, par association, à un autre objet.

2. PSYCHANAL., Mécanisme par lequel un sujet, au cours de la cure, reporte sur le psychanalyste les sentiments d'affection ou d'hostilité qu'il éprouvait primitivement, surtout dans l'enfance, pour ses parents ou ses proches. Transfert négatif, positif

3. PSYCHOL., PÉDAG. Transfert (d'apprentissage). Effet facilitateur ou inhibiteur d'une activité initiale sur une activité d'acquisition subséquente: le transfert est dit positif, si l'acquisition est facilitée par l' activité préalable (...); il est dit négatif, dans le cas inverse.

Pour définir ce qu'est le transfert pour lui, Joseph Rouzel prend appui sur les travaux de Sigmund Freud ainsi que de Jacques Lacan qui sont reconnus comme les pionniers de la psychanalyse.
 
Le premier sens du concept de transfert  selon la vision de Freud correspond à un déplacement de représentations inconscientes vers le conscient dans l' interprétation des rêves. Ce déplacement opère selon deux processus de traduction qui sont la condensation, plusieurs représentations confondues en une seule, (ex : une femme représentera toutes les femmes qu' a connu le sujet) et le déplacement, qui marche par association ou agglomération de représentations, soit une partie désigne le tout (une voile désigne un bateau), soit les éléments sont très proches comme le contenant et le contenu (boire un verre signifie boire le contenu du verre).Dans ces deux cas le transfert est un travestissement des représentations inconscientes.
Le deuxième sens, du concept de transfert correspond à un déplacement de l' affect liées aux représentations inconscientes, sur une personne, un objet. Ce qui n'est que la conséquence logique du premier sens, les personnes liées au transfert font partie des objets d' investissement du sujet. Un désir inconscient est à l' œuvre.
Lacan ajoute une troisième dimension par rapport a Freud : le noyau de réel qui résiste a toute représentation imaginaire ou symbolique. Pour lui le transfert correspond a une rencontre entre humains ou la question du corps est centrale. Une rencontre impossible entre deux corps humains ou se révèle la nature du sujet, celui d' être manquant. Le sujet a en lui un vide, un vide qu'il cherche a remplir, L' analyste soutient ce vide en supportant les mises en scènes fantasmatiques de l'analysant. Le transfert se construit sur cette recherche de « l'objet » objet du désir. Ce désir étant de combler ce vide. Pour Freud il nous faut nous contenter d' ersatz de cet objet, cet ersatz valant bien l' original car n' existant pas. La fonction paternelle, loi du père, est rencontrée car nous nous inscrivons dans l' ordre de la parole et du langage. Toujours selon Freud« l' être soumis à l' ordre du langage est manquant, il manque d' être . Si il n' en manquait pas, il pourrait jouir de la nature comme les animaux »
[1].
« Le transfert est amour » si l' on résume Freud « de l' amour qui s' adresse au savoir » rajoute Lacan. L' analysant vient chercher l' analyste car il lui suppose un savoir sur ce qui lui arrive. La ou son savoir est mis en échec par le symptôme, il s' aide de l' analyste pour récupérer ce savoir.
« le transfert est la réactualisation d'un lien à l' autre supposé savoir,faire ou être... ce qui manque au sujet. (…) Le transfert se présente sous sa face positive à travers les affects d' amour, d' admiration, de confiance ; ou négative quand il prend les couleurs de la haine, l' hostilité, la méfiance. »
[2].
La manœuvre du psychanalyste consiste a esquiver cette supposition et à supporter à même son corps l' objet de son désir.

Le transfert est omniprésent dans le quotidien du travailleur social qu'est l' éducateur spécialisé.
En effet la relation éducative opère sous transfert. De part sa proximité avec le public qu'il accompagne l' éducateur se retrouve aux avants postes de la relation éducative et de ce fait est une des premières cibles du transfert. Ce qui ne manque pas d' amener son lot d' incertitudes et de questionnements.
« Comment soutenir ce qui se présente comme une erreur ? Comment prendre appui sur cet égarement de l' amour du transfert, sans s'en considérer comme le destinataire, pour aider un sujet à s' acheminer vers le point de destination qu' indique le transfert ? »
[3]. Dans le champ éducatif, il s' agit s' appuyer sur le transfert pour permettre des remaniements identificatoires et travailler avec le sujet son rapport au monde aux autres ou à elle même. Ce transfert, imaginaire,par le biais du sujet, pose une image, un idéal sur la personne de l' éducateur. Le travail est de déconstruire cet idéal, cette image au risque de freiner l' acte éducatif. Si il est symbolique il vise alors à la dé-complétude du sujet de cette supposition qu' un autre dans le monde pourrait, saurait, ferait, serait à sa place, il n' y a ni dieu ni maître pour rendre compte de l' existence du sujet. Les éducateurs peuvent être vu en quelque sorte comme les agents de la fonction paternelle, qui tendent par l' éducation a sacrifier les pulsions des personnes accompagnées en trouvant des moyens d' en canaliser les effets. Il importe pour l' éducateur d' utiliser le transfert pour rencontrer le sujet, entendre comment il est en au travail du traitement de sa jouissance. Une fois que l'on remarque comment le sujet traite sa jouissance, il s' agit de mettre à disposition les moyens d' y remédier encore faut il que le sujet s' en sente responsable et ne rejette pas la responsabilité de ce qui lui arrive sur les autres, ce qui le consoliderait dans son travail d' autonomisation. Il faut lui rendre le savoir qu' il nous supposé dans le transfert en bon état, afin qu'enfin il puisse parler en son propre nom et assumer ses actes. Il ne faut pas attendre la demande explicite et orale du sujet, il s' agit d' être à l ' écoute, lorsque le transfert est engagé, afin de voir se profiler la demande qui peut prendre des formes inentendues. Cette demande correspond au savoir que le sujet, la personne accompagnée, nous attribue. Le risque réside dans la possibilité pour l' éducateur de se prendre pour celui qui possède le savoir que l'on lui suppose. Il importe de réussir à traiter notre propre jouissance qui nous pousse à la toute puissance.

Pour cela  l' exercice du maniement du transfert est essentiel, ce maniement passe en premier lieu par un travail sur ce que l' éducateur ressent dans ce transfert, le travail commence par l' éducateur lui même. «En effet un éducateur ne peut exiger d' une personne dont on lui confie l' accompagnement, un déplacement subjectif dans son rapport au monde, aux autres et à elle même, si lui même n'est pas engagé dans un déplacement du même type. »
[4], Cette première phase du maniement est un travail sur le lien entre sa place d' éducateur et le savoir que l'on lui attribue. Il se doit de mettre au travail ce qu'on appelle le contre transfert c'est dire ce qui l' affecte dans cette relation, le mettre à l' épreuve du symbolique, c'est a dire se soumettre aussi a la loi du père, par le biais de la parole et de l' écriture. C'est la phase d'élaboration qui tend a désencombrer l' éducateur de ce qui l' affecte dans la relation ayant pour but de lui faire perdre l' illusion qu'il possède ce qu'il manque au sujet. Cette illusion est tenace. Et ce travail nous ramène a notre propre incomplétude. Cette phase du maniement, est un temps de régulation de la jouissance de l' éducateur, lui comme le sujet n'en auront jamais fini avec la jouissance qui les habite. Ces rencontres interhumaines par l' implication mentales et physiques qu' elles imposent au travailleur social, par le fait entre autre qu'il y joue quelque chose de sa propre histoire, de ses affects, de son vécu l' usent. D' ou l' importance de pouvoir le verbaliser, d'en parler, de l' écrire, afin d' entretenir ce que Sigmund Freud appelle l' appareil psychique. Ce peut être par le biais de l' entretien, entre le psychanalyste et le professionnel, qui vise à opérer un déplacement, dans le but de d' ouvrir des voies de communication. y introduire un vide, afin que chacun, de sa place, puisse opérer sa fonction sans s'y engloutir et s' y réduire. Un des  travaux de l' éducateur est d' arriver à permettre le transfert du transfert. À accompagner l' usager dans le but qu'il investisse d' autres objets que la personne du travailleur social. Ceci n'est possible que si le travailleur est lui même au travail sur ce que produit en lui la rencontre à l' usager, sur ce qui se transfert sur lui. La phase d'écriture ,quant elle, permet de voir se qui se passe dans la relation, de prendre assez de recul afin d' en capter les contours et la structure.« il faut écrire pour survivre, pour ne pas perdre la tête, pour sauver sa peau, pour conserver un minimum de sens et de cohérence dans les actes éducatifs »[5].

La seconde phase du maniement se passe entre la personne prise en charge et le sujet supposé savoir. Il s'agit ici de mettre l'illusion du savoir supposé au travail. « si l' objet est illusoire , la force désirante qu'il cause est ,elle, bien réelle. »
[6]. Pour que la personne accompagnée puisse se construire un rapport à soi, aux autres ou au monde, elle doit passer par ce sujet supposé savoir que représente l' éducateur  dans ce transfert. Il faut pour l' éducateur, laisser se déployer le désir du sujet dans des activités éducatives, dans des espaces de médiations, des ateliers ou il pourrait mettre en scène sa question, se l' approprier. Cela réclame attention et disponibilité. Le sens de ces médiations est la transmission de la castration (sacrifice de la pulsion). Par la mis en œuvre de la castration, le résultat recherché est de ^permettre à la pulsion de s' exprimer de manière plus vivable pour le sujet. Les règles et le cadre qui structurent l' activité s’oppose à sa jouissance. « Il va se rendre compte que l' éducateur, lui aussi, est castré, soumis à la loi, à la règle, au règlement, aux limites etc... »[7].   Cette castration n'est effective que si le sujet s' y soumet encore une fois c'est le sujet qui est maître.

La troisième phase du maniement est ce qui se trouve entre la personne prise en charge et l' éducateur, c'est à dire l' institution. L' institution au sens large peut être vu comme ce qui lie  et fait tenir un groupe d' humains entre eux. « La question du sujet, comme surgissant dans la parole, n'est pas pensable sans l' environnement qui l'a fait naître en son sein :famille,,société, collectifs, culture,ou organisations diverses et variées »
[8]. La machine institutionnelle, c'est ce que chacun institue par ses actes et ses paroles. En effet contrairement à une organisation, une institution correspond au lieu plus tous les éléments y gravitant autant les usagers que les professionnels qui de par leur implication transforment l' ensemble institutionnel multipliant les possibles. Des lieux et des hommes. L' institution sert de lieu d' expression du transfert avec l' aide des éléments humains qui la compose. Il s' agit pour l' éducateur engagé dans le travail du transfert de s' appuyer sur les ressources tant humaines que matérielle de l' institution, car l' éducateur ne travaille jamais seul.

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