Les dessous d'un monde flou

Les dessous d’un monde flou

Je cours aussi vite que je peux. Je ne veux pas qu’ils me rattrapent. Je sens les larmes couler sur mes joues. Mes pieds en sang me font mal, j’ai été obligé d’abandonner mes souliers en chemin pour courir plus vite.

Je les entends crier mon nom, me supplier de revenir, me dire que j’ai fait une erreur en m’enfuyant. Mais je ne les écoute pas, je suis près de mon but, de la liberté. Je cours plus vite, je mets toutes les forces qu’il me reste pour aller plus vite. Je vois un village au loin, ma délivrance est proche.

Je sens ma robe s’accrocher à des branches et se déchirer, le bas n’est plus blanc, mais gris et brun, rempli de poussière et de boue. Les roches égratignent mes pieds et les rendent en sang. Mes bras sont écorchés à force de me frotter aux branches pour éviter un trou dans le sol. Mes cheveux sont emmêlés et s’accrochent eux aussi aux branches.

Mes larmes m’aveuglent et je ne vois plus rien. Je ne vois pas la route qui est proche de moi, je ne vois pas le camion qui approche à une grande vitesse. Tout ce que je sens est le choc de l’impact et mon corps qui s’écrase contre le bitume. Encore une fois, des larmes coulent sur mes joues et je sens mon corps s’alourdir. Je ne sens plus rien. Je ne vois plus rien.

Agathe. Agathe. Agathe. J’entends quelqu’un prononcer mon nom. Je ne sais pas à qui appartient cette voix. Une femme ou un homme. Je ne sais pas, je ne sais plus qui est quoi. Mes paupières sont trop lourdes pour que je puisse les ouvrir. En fait, je ne veux pas voir le monde et la personne qui continue de prononcer mon prénom.  

Tous mes os, mes muscles et mes tendons me font mal. Je ne suis pas capable de bouger, de faire un seul mouvement. J’ai tellement mal, un mal de vivre. Je ne veux plus faire partie de ce monde, ce monde de souffrance et de violence.  

J’entends quelqu’un entré dans la pièce, la personne qui murmurait mon nom s’est tu. Je sens des mains sur moi. Je ne veux pas qu’elle me touche. J’essaie de me débattre, mais mon corps ne veut pas m’obéir. Je sens ses mains répugnantes et douces me tripoter le bras.  Je sens quelque chose de pointu rentrer dans ma peau. Elle me fait une injection. Elle n’a pas le droit, je ne veux pas. Elle n’a pas le droit, pas le droit, pas le droit.

Je me sens fatigué, tomber dans la noirceur. Elle me recouvre et entre dans mon corps pour l’ensevelir. Mon corps s’enfonce, chute et percute les ténèbres. Il fait froid et je suis bien dans cette noirceur si écarlate. Lentement, mon esprit remonte vers la lumière, mon corps se réchauffe. Je peux bouger, mais je ne peux toujours pas ouvrir les yeux.

Je me souviens pourquoi je courais dans le bois. Je me souviens de tout, des gens souriants, de Tom. Tom. Je devais me marier avec Tom. Je l’ai laissé sur l’autel, je n’ai pas été capable de dire oui. Je l’ai aimé, mais pas assez pour me marier.

Agathe, je t’aime. Je t’aime. Je t’aime.

Les mots entrent dans ma tête et je deviens folle. Je ne veux pas l’entendre. Je ne veux plus rien entendre. J’ai tellement mal, tellement mal. Un mal de vivre. Je veux mourir.

Ma première intention d’écriture était de mettre sur papier tout le mélange que j’ai dans ma tête.  Ensuite, j’ai formulé ce mélange en une jolie histoire sur une femme qui ne veut pas épouser un homme et que toutes ses pensées sont brusquées et mélangées ! Dans cette création littéraire, la femme vit un dilemme, le plus important de sa vie.  Elle se pose comme question dois-je vivre ou mourir. Elle n’aimait pas la vie et le monde ne l’intéressait plus. Alors elle a choisi la voie facile. J’ai choisi d’écrire sur un angle plus négatif de la vie. J’ai choisi une tonalité pathétique pour montrer à quel point la jeune femme ne sait plus quoi penser et qu’elle déteste la vie. Je voulais faire susciter chez le lecteur un sentiment de compassion et leur montrer comment une personne qui n’aime pas la vie peut penser et avoir des pensées contradictoires.  

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