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Les Sciences Cognitives

Fiche de lecture : Les Sciences Cognitives. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  7 Février 2014  •  Fiche de lecture  •  1 630 Mots (7 Pages)  •  914 Vues

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Le mot "cognition" vient du latin cognoscere et il a approximativement la même extension que le mot "intelligence". Les sciences cognitives étudient l'ensemble des manifestations de l'intelligence humaine. Comment un bébé humain apprend-il la référence des mots de sa langue maternelle ? Comment reconnait-on un visage qu'on n'a pas revu depuis vingt ans ? Pourquoi est-il plus facile de mémoriser Le petit chaperon rouge qu'une liste de numéros de téléphone ? Pourquoi est-il plus facile de juger "9 est plus grand que 2" que "6 est plus grand que 5" ? Pourquoi la couleur des objets nous paraît-elle constante en dépit des variations dans les longueurs d'onde de la lumière qu'ils réfléchissent ? Quel rôle jouent les émotions dans les prises de décision ?

L'importance théorique des sciences cognitives tient à trois caractéristiques. Premièrement, les sciences cognitives poursuivent par d'autres moyens — des moyens scientifiques, formels et expérimentaux — le projet traditionnel de ce qu'on nomme en philosophie l'"épistémologie", c'est-à-dire la théorie de la connaissance. Les sciences cognitives ont en effet pour ambition de fournir une connaissance des mécanismes de la connaissance qui soit aussi exacte, objective et impartiale que la connaissance physique des particules élémentaires, la connaissance chimique des molécules ou la connaissance biologique des cellules vivantes. Deuxièmement, les sciences cognitives occupent l'interface entre les sciences humaines et les sciences de la nature. Comme les sciences humaines, elles étudient la formation et la transformation des représentations mentales. Comme les sciences de la nature, elles ont l'ambition d'offrir des explications causales. Enfin, si les sciences humaines ont pour vocation d'étudier le rôle des idées dans la vie des hommes et des femmes, les sciences cognitives ont pour vocation de nous renseigner sur le propre de l'homme, c'est-à-dire sur ce qui distingue l'intelligence humaine de l'intelligence des autres machines et des autres animaux.

Dans le foisonnement des paradigmes théoriques et expérimentaux en sciences cognitives, trois thèmes retiendront notre attention en raison de leur intérêt philosophique intrinsèque. La théorie computationnelle de l'esprit constitue un cadre pour une conception moniste matérialiste de la pensée. Les recherches sur le développement ontogénétique des capacités cognitives du bébé humain suggèrent que l'intelligence humaine n'est pas un système polyvalent de résolution de problèmes généraux. Les recherches sur les illusions cognitives démontrent l'importance du format dans lequel les problèmes sont traités par l'esprit humain.

1. La théorie computationnelle de l'esprit

L'étude des capacités cognitives du cerveau humain remonte au milieu des années 50. Grâce aux progrès spectaculaires de la logique et des mathématiques, la construction des premiers ordinateurs capables d'accomplir des opérations numériques réhabilita sur des bases scientifiques l'idée déjà émise au xviiè siècle par Hobbes et Leibniz selon laquelle penser, c'est calculer. Calculer, c'est manipuler, selon des règles, des symboles dans un système formel, indépendamment de leur sens. Un système formel est un langage dans lequel on peut déterminer de manière mécanique si un ensemble de propositions est une preuve d'un théorème. On dispose de règles explicites déterminant si une suite de symboles est une formule du système. On détermine la structure logique des suites de symboles qui sont des formules du système. On dispose de règles explicites de déduction ou de preuves qui déterminent si une séquence de formules est une preuve valide d'un théorème. Selon la célèbre thèse de Turing/Church, toute manipulation ou fonction d'entiers que l'esprit humain peut calculer effectivement peut être aussi calculée par une "machine de Turing". Une machine de Turing est une machine abstraite munie d'un ruban abstrait infini, d'une tête de lecture-et-d'écriture, et d'une table d'instructions (un programme). A chaque instant, la tête est placée devant l'une des cases du ruban. Elle est capable (i) de déterminer si la case contient un symbole ; (ii) si oui, de le lire ; (iii) d'effacer ce symbole ou (iv) d'en inscrire un nouveau. Elle est enfin capable (v) de se déplacer d'une case le long du ruban à droite ou à gauche en fonction des instructions contenues dans sa table. Si la tête est placée devant une case dont le "contenu" ne correspond à aucune instruction contenue dans la table, la machine s'arrête.

Deux sortes d'arguments militent en faveur de la théorie computationnelle de l'esprit : des arguments épistémologiques ou méthodologiques et des arguments ontologiques. Premièrement, grâce au "computationnalisme", un système cognitif peut être étudié à trois niveaux complémentaires (Chomsky, Marr, Newell). On commence par caractériser une compétence cognitive : par exemple, la capacité d'effectuer des additions, c'est-à-dire d'associer un entier positif à toute paire d'entiers positifs. On caractérise ensuite l'algorithme ou la procédure particulière employée pour exécuter la compétence. Pour exécuter une addition, il faut choisir un système de représentation des nombres entiers (par exemple, le système décimal et les chiffres arabes) et un ordre d'application des opérations. Enfin, on recherche le mécanisme physique grâce auquel l'algorithme est "implémenté" : une calculatrice électronique et un cerveau humain sont deux mécanismes physiques distincts susceptibles d'implémenter un algorithme d'exécution d'une addition[1]. Deuxièmement, la théorie computationnelle de l'esprit

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