Le sacrifice

Je me souviens de son visage à ce moment, cet instant. L’instant fatal où tout a basculé. Un visage a la fois très expressif et très fermé.

Elle se tenait là, devant moi, me sentant plus impuissant que jamais. Oui, elle était là, emprisonnée par ses êtres sans scrupules, non que dis-je, par ses choses dépourvus de tous sentiments, dépourvus de cœur, d’âme…

Je ne pouvais supporte l’idée de l’abandonner, de partir sans me battre pour elle. Je m’étais toujours juré de la protéger coûte que coûte et là, me voila face à la possibilité de fuir et de la laisser se sacrifier. Qui suis-je pour accepter une telle éventualité ?

Comment pourrais-je continuer à vivre sans elle, comment supporter le quotidien sans sa présence sur la base, sans ses paroles pour nous guider ? Et comment pourrais-je retourner en mission après une défaite comme celle-ci ? Serais-je un bon militaire si je la laissais entre leurs mains ? Tant de questions qui se bousculent dans ma tête…

Alicia… quel courage ! Elle sait déjà ce qu’elle veut faire, elle a pris sa décision : elle est prête à se sacrifier pour nous sauver. Et malgré cela, elle ne laisse rien paraître, elle est droite et reste fière. Pourtant, malgré la force qu’elle dégage, je sens dans son regard comme un sentiment de regret. Pas de mourir, mais plutôt de ne pas avoir eu le temps de dire certaines choses…

Ce regard… Je me sens soudain auteur du même… un regard lourd de secrets, lourd de sentiments cachés. Un regard remplie d’amour mais vide d’espoir, un regard que j’ai si souvent posé sur elle sans jamais oser prononcer une seule parole… Si j’avais su lui dire avant ce que je ressens, s’il n’y avait pas cette putain de loi militaire, si nous pouvions tout recommencer, en étant juste un homme et une femme, juste Erwan et Alicia, juste ELLE et MOI…

Oui si nous n’avions pas étaient dans l’armée, j’aurais pu m’autoriser à l’aimer comme je l’ai si souvent rêvé... Non, c’est idiot, finalement si nous n’avions pas étaient dans l’armée, nous ne nous serions jamais connus ! « Jamais connus… » Ces deux mots résonnent dans ma tête comme un affreux bourdonnement de douleur, me ramenant à l’impitoyable réalité  à laquelle je suis confronté.

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