L'école, lieu de reproduction sociale

L'école, lieu de reproduction sociale

I.L’école et ses transformations

A.L'école comme lieu de socialisation

Durkheim est le premier à s’intéresser à l’école comme lieu de reproduction sociale. Il faut replacer les analyses de Durkheim dans le contexte de la 3ème république : en 1881, l'école est gratuite et en 1884, elle devient laïque.

Plus que toute institution, l'école doit exprimer la société dans son ensemble. Face à la montée des égoïsmes individuels et marchands, elle seule pouvait recréer un système de valeurs morales et cohérentes afin d'éviter les risques d'anomie dus à la perte des repères sociaux traditionnels.

Tout système éducatif a pour finalité la socialisation des individus. Le rappel de sa définition révèle les enjeux de toute éducation : l’apprentissage des valeurs, idées, sentiments, savoirs faire et être. C'est l’ensemble des valeurs et des normes sociales que va incorporer un individu depuis l’enfance et tout au long de sa vie. Un individu va intérioriser toutes les valeurs et les normes qu’il reçoit lors de sa socialisation. Tout d’abord pendant l’enfance au sein de la famille : c'est la socialisation primaire. Puis tout au long de sa vie au sein de l'école, le travail ou les groupes de pair : c'est la socialisation secondaire.

L'école dispute à la famille ces fonctions traditionelles. Pour Durkheim il s'agit de transformer l'enfant en un être "capable de mener une vie morale et sociale". L'enseignant incarne par sa pratique, son discours, et sa vie même, cet idéal. Il donne un rôle central à l'autorité du maître et à la laïcité.

Fin 19ème/début 20ème, Durkheim propose une école juste, intégratrice et méritocratique et l'école devient un symbole du régime Républicain. Respect de la patrie, discipline, autorité, méritocratie, tels furent donc les crédos de l'école républicaine.

Les conflits sociaux n'épargnent pas pour autant le système scolaire. Au contraire, l'éducation apparaît comme un champ privilégié des luttes entre groupes pour imposer leurs systèmes de valeurs.

La société se transforme. On passe de solidarité mécanique à solidarité organique. Dans ce passage l’école permet d’unifier les différentes activités sociales autour de valeur centrale et permet de préparer l’individu au monde du travail.

Il est nécessaire que l’école s’adapte aux situations changeantes de la société pour pouvoir jouer ce rôle unificateur.

Pour Durkheim, elle permet de transformer un individu insociable à un individu qui peut avoir une vie sociale. L’école occupe une place de plus en plus importante dans la trajectoire des individus.

B.Augmentation de la scolarisation

Plusieurs étapes découpent l'histoire du système éducatif :

- de 1900 à 1945, prédomine un système composé de 2 structures indépendantes l'une de l'autre. On va avoir un système à 2 niveaux :

* l'enseignement primaire, sanctionné par le certificat d'étude (1880), témoigne d'une réelle volonté politique de démocratisation, quels que soient les gouvernants.

* l'enseignement secondaire débouchant sur l'Université reste très sélectif, non seulement dans son recrutement mais aussi dans sa pratique et organisation. Ca « reste un certificat de la bourgeoisie ».

L'école dispense un enseignement de base de toute la population et sélectionne une élite.

- de 1945 à 1975, le primaire rejoint le secondaire. La gratuité est instituée dans le secondaire dès 1939 pour les classes de 6ème. En même temps se développe un enseignement intermédiaire entre primaire et secondaire. Cependant, après 1945, le mouvement s'accélère. L'intégration fonctionelle de l'école au marché de travail par la reconnaissance du titre scolaire pour accéder à une position statuaire ne s'est pas encore opérée. Le baccalauréat légitime la hiérarchie sociale plus qu'il ne qualifie pour un emploi.

Plusieurs logiques se développpent pendant la période de croissance :

* demande scolaire généralisée. Ce mouvement se justifie par la relation de plus en plus visible entre le diplôme et l'accès à une profession, plus particulièrement pour les nouvelles couches moyennes et supérieures salariées. Il y a alors une prise de consience que le diplôme devient important pour avoir accès a une profession. Avec l'importance du diplôme on a une demande scolaire généralisé. Le thème de la pénurie de diplômés se conjugue avec une politique de recrutement des entreprises qui sélectionnent à partir des titres scolaires.

* Etat : c'est d'abord un logique égalitaire : promouvoir l'égalité des chances scolaires dans le système secondaire. L'ordonnance de 1959 prolonge la scolarité obligatoire jusqu'à 16ans pour inciter à faire d'avantage d'étude dans le secondaire. Haby, en 1975, instaure le "collège unique" sans filières avec l'idée de prolonger la scolarité au sein de l’enseignement général. Cette politique se traduit par un programme de construction et de recrutement très ambitieux. Ensuite, une logique de différenciation : il s'agit de constituer une formation alternative, professionnelle et technique, notamment à partir de la classe de 3ème.

- de 1975 aux années 1990, on assiste à une montée des contradictions. 2 faits majeurs interviennent durant cette période. La croissance économique se ralentit, renchérissant le cout social de la formation. Le chômage se développe, surtout parmis les jeunes, remettant en cause l'efficacité de l'école. Derrière l'objectif de démocratisation et d'homogénéisation des structures sociales s'est recréé un système hiérarchique souterrain fondé sur le maintient de certaines filières, le choix des établissements, ou celui des options à l'intérieur des classes. La selection parait plus féroce et plus masquée qu'auparavant. Les enseignants ont perdu une partie de leur légitimité sociale et économique, ce qui se traduit par une crise de recrutement, et plus particulièrement dans les disciplines scientifiques.

Dans les années 1980, l'objectif est de conduire 80% d’une classe d’âge vers le baccalauréat. En 2008, 65% d’une classe d’age a accès

...