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Commentaire de poème Le Lac d'Alphonse De Lamartine

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Par   •  26 Mai 2013  •  3 172 Mots (13 Pages)  •  5 184 Vues

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Alphonse de Lamartine : Le Lac (Méditations poétiques, 1820)

Les Méditations poétiques est un recueil poétique publié en 1820 qui regroupe 24 poèmes. La publication de ce recueil, qui développe des thématiques de la solitude et de la mélancolie, fut un événement poétique : il est le premier manifeste du romantisme français.

Le lac est le 10ème poème du recueil, qui dans une première édition portait le titre d'Ode au lac de B..., autrement dit le lac du Bourget à Aix-les-Bains en Savoie. .Ce poème fut inspiré à Lamartine par la liaison amoureuse qu’il eut en 1816-1817 avec Julie Charles, une femme mariée atteinte d’un mal incurable qui l’emporta en 1817, et qu’il nomme « Elvire » au fil de son recueil. Lamartine revient seul revoir les lieux qu'il a visités autrefois avec elle. Ce poème fut en partie écrit sur place, sur la colline de Tresserve qui domine le lac.

Le poème relève du genre de l’ode (cf. son titre initial) : il est constitué de 16 quatrains, composés pour la plupart de 3 alexandrins et d’un hexamètre, sauf pour les strophes 6 à 9 qui reposent sur une alternance alexandrin/hexamètre. Les rimes sont croisées et respectent l’alternance classique entre rimes masculines et féminines.

Nous verrons dans un premier temps que le poème se présente sous une forme polyphonique, où se mêlent la voix du poète et celle de la femme aimée. Nous analyserons ensuite la façon dont le texte développe le thème de la fuite du temps. Nous montrerons enfin le rôle que joue la Nature auprès du poète.

I La structure du poème

L’étude de l’énonciation permet de dégager 4 étapes.

Dans la première, qui correspond aux 5 premières strophes, le poète s’adresse au lac, comme le montrent l’apostrophe « ô lac ! » du vers 5 et le dialogue qu’il entretient avec lui (« Regarde ! », au vers 7 ; « un soir, t’en souvient-il ? », au vers 13) : il y évoque le souvenir du bonheur perdu, à travers le rappel d’une promenade nocturne, en barque, effectuée l’année précédente avec Julie. Contrastant avec le présent d’énonciation « je viens seul m’asseoir sur cette pierre » du vers 7, ces strophes multiplient les marques du passé, à travers l’emploi de l’imparfait et du passé-simple, et situent l’événement rapporté : « l’année à peine a fini sa carrière » (v. 5), soit l’année précédente. Il s’agit donc d’une sorte de « pèlerinage », en hommage à l’aimée disparue, sur les lieux mêmes de leur amour.

Dans la seconde, qui correspond au changement de dispositif métrique signalé plus haut (strophes 6 à 9) : c’est la voix de la femme aimée qui prend le relais, comme l’indiquent, à la fin de la strophe 5, les vers 11 et 12 : « et la voix qui m’est chère /laissa tomber ces mots : ». Rapportés au discours direct, comme le signalent les guillemets, les propos que la jeune femme a prononcés l’année précédente s’adressent au Temps : « ô temps, suspends ton vol », et prennent la forme d’une supplique, accumulant les verbes à l’impératif – souvent mis en relief en début de vers (« suspendez » / « laissez-nous » / « coulez » / « oubliez »)

Dans la troisième partie (strophes 10 à 12) le poète reprend la parole, et prolonge la méditation de la jeune femme sur le Temps : la 10ème strophe commence, comme la 6ème, par une invocation : « Temps jaloux », et, comme précédemment, le texte multiplie les marques de la 2nde personne du pluriel, notamment dans la 12ème strophe (« Que faites-vous des jours que vous engloutissez ? »). Le « nous » ici employé diffère du « nous » « biographique » utilisé dans la première partie du texte (cf. « nous voguions en silence », vers 13) et prend une valeur générale ; dépassant le cadre du drame personnel, la méditation s’élargit à l’ensemble du genre humain.

La dernière partie du texte (strophes 13 à 16) clôt le poème sur lui-même, puisque le poète s’adresse à nouveau au lac, comme le montrent les apostrophes initiales « ô lac » (vers 49) et « beau lac » (vers 54), et plus généralement à la nature dans son ensemble (cf. « belle nature » au vers 51). Là encore, l’accumulation de marques de 2nde personne montre que le poète poursuit son dialogue avec le paysage lacustre ; comme en écho à la 2nde partie du poème, le texte prend à nouveau la forme d’une supplique : cf. emploi de l’impératif (« Gardez de cette nuit, gardez, belle nature, / Au moins le souvenir » et du subjonctif à valeur optative : « Qu’il soit » répété tout au long des 3 dernières strophes.

Le texte se présente donc sous la forme d’un double dialogue, avec le Temps et la Nature, où les voix du poète et celle de la jeune femme disparue s’enchevêtrent et se répondent, par tout un système d’échos.

II La fuite du temps

Le premier quatrain pose, de façon programmatique, le thème de la méditation : la relation de l’homme au temps. Avant de se recentrer, dès la 2nde strophe, sur l’évocation d’un souvenir personnel, le poème s’ouvre sur une interrogation générale, qui concerne l’ensemble du genre humain, comme l’indique le « nous » à valeur généralisante du vers 3 (« Ne pourrons-nous jamais ? »).

La condition humaine s’exprime ici à travers une métaphore filée, fondée sur l’association du temps avec l’élément maritime : « l’océan des âges ». La strophe développe ce champ lexical nautique : « nouveaux rivages », « jeter l’ancre ». L’être humain est donc semblable à une frêle embarcation naviguant dans l’immensité du temps, dont le poète souligne le caractère infini en jouant des voyelles ouvertes et des assonances en « an ».

D’emblée, l’accent est mis sur l’impuissance humaine à maîtriser le cours du temps : l’emploi de deux participes passés à valeur passive (« poussés », « emportés »), et l’antithèse « toujours / jamais » qui structure la phrase font de l’Homme une sorte de fragile esquif ballotté par le temps et inéluctablement entraîné vers la mort, comme l’indique la litote « nuit éternelle » (v.2) Comme le souligne l’expression « sans retour », le temps est irréversible et l’homme ne peut en arrêter le cours.

Cette représentation du Temps qui s’écoule inexorablement n’est pas sans rappeler le philosophe grec de l’Antiquité Héraclite (6eme siècle av. J.-C.) et ses fameuses formules, « πάντα ρει » (panta rei : tout coule) ou « on ne se baigne jamais deux fois dans le même

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