Commandant Hugues du Roy de Chaumareys

En 1816, le commandant Hugues du Roy de Chaumareys, rétabli récemment dans ses fonctions par la Restauration, engage sa frégate , La Méduse, « le navire le plus moderne et le plus rapide de son temps », dans le banc d’Arguin pourtant signalé sur toutes les cartes maritimes. Le navire échoue sur le sable et comme les canots ne sont pas assez nombreux ,on construit un radeau. Sur les 147 marins qui s’y trouvent alors, seuls 10 survivants pourront rapporter l’horreur d’une catastrophe et d’un naufrage qui poussèrent au cannibalisme les hommes d’équipage. Le peintre Géricault fait de l’anecdote un tableau monumental à valeur de réquisitoire : ceux qui gouvernent ne savent pas piloter le navire, le régime est voué à échouer, l’Etat à « prendre l’eau » et les sujets de sa Majesté Louis XVIII sont condamnés à s’entredévorer. Le Radeau de la Méduse figure avec emphase la dérive de la Société Française issue de la Restauration vers l’Etat de Nature.

Mais gouverner est-ce commander ? Diriger les hommes ? Exercer sur leur volonté une contrainte ? un pouvoir ? A trop filer la métaphore du navire et de son capitaine qui a pour mission de le mener à « bon port », on en oublie précisément sa valeur propre. Car au gouvernail on ne voit ni le commandant du bateau, ni l’armateur, ni tel ou tel passager. Celui qui tient la barre n’a pas fixé le cap, il n’a pas décidé de la destination, où d’ailleurs il n’a pas de raison particulière de se rendre. Si gouverner c’est au sens propre « être au gouvernail », alors quelle compétence cela réclame -t’il ? Quelle est la responsabilité du pilote ? Contre toute apparence l’art de gouverner les hommes et les choses demande des qualités qui ne sont pas aisées à définir. Il y a assurément de bons et de mauvais pilotes mais comment les distingue- t’on des bons et des mauvais capitaines ?

Certes gouverner, ce n’est pas commander ou exercer le pouvoir, mais, le savoir-faire de l’homme au gouvernail , également son intuition, sont déterminants . Dès lors quelle est la mesure exacte de sa responsabilité politique ?

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