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Je me traverse, Céline

Dissertation : Je me traverse, Céline. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  11 Mars 2018  •  Dissertation  •  2 287 Mots (10 Pages)  •  823 Vues

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                                                Je me traverse…

Louis-Ferdinand Céline, médecin de sa profession, est aussi l’un des plus illustres romanciers français, qui aurait potentiellement pu recevoir le Prix Nobel de littérature. Son œuvre la plus connue : Voyage au bout de la Nuit, a un caractère évocateur au regard du sujet proposé « Je me traverse », car les deux expressions reflètent le mouvement et le déplacement, le voyage et la traversée.

Citation : « Je me traverse » : on sent dans cette citation, une volonté de la part de l’auteur avec l’utilisation de la voix active. Le verbe « se traverser » peut se référer au fait de s’explorer, de faire retour sur soi. Cela signifie que l’écrivain implique volontairement sa personnalité et son vécu dans son travail.

Problématique : Où s’opère l’exploration de soi dans le processus littéraire ?

Plan : En amont de tout type d’œuvre autobiographique semble être une réponse logique, mais cela peut-être un travail trop superficiel sur soi : il faut réintégrer les émotions et le corps dans cette descente en nous. L’écriture, peut représenter ultimement une base sur laquelle on peut plonger au soi grâce aux chemins de traverse et au modelage du temps qu’elle propose.

L’exploration de soi, apprendre à se connaître peut constituer la première étape de la rédaction d’une autobiographie. En effet pour construire une œuvre cohérente pour le lecteur, il va falloir généralement suivre la chronologie des évènements ce qui invite à se remémorer le passé et les évènements qui l’ont constitué, retrouver les dates et remarquer parmi ces moments marquants, ceux qui ont constitués des étapes charnières qui ont eu un impact décisif. Ensuite, il est bon d’expliquer les raisons de certaines de nos décisions ou pourquoi un souvenir nous a particulièrement marqué, surtout quand parfois nous nous rappelons de certaines choses qui ont l’air anodine pour quelqu’un d’extérieur. Ainsi dans Le livre de ma mère, Albert Cohen est littéralement hanté par un événement anodin : un coup de téléphone de sa mère reçu par des connaissances chez qui il était au même moment invité. La raison de cet appel est simple : sa mère est inquiète pour son fils, et elle appelle « la comtesse « pour savoir si son fils est toujours chez elle. A son retour, son fils la houspille pour cette humiliation : en effet, lui et la comtesse sont de milieux différents, il essaye tant bien que mal de pénétrer dans des sphères sociales plus haute mais sa mère la ramène sans cesse à ses racines, à sa condition de fils d’immigrés qui ont vécu sous le sou. C’est pour cela que par exemple au début du chapitre 14, dans son cauchemar, il entend sa mère lui promettre qu’elle n’appellera plus la comtesse : il a honte de son emportement envers sa mère, qui pensait bien agir, et qu’il aime tendrement, pour une peccadille et une comtesse envers laquelle il n’a que du dédain.  

Cependant la chronologie qui sera choisie comme reflet des étapes cruciales de notre vie, les moments qui serons décrits et dont l’importance sera explicitée peuvent refléter plus une volonté de montrer, et même d’insister sur une face de notre vie, plutôt que de livrer un récit plus intime. Cependant cette posture qui est d’aborder sous un seul angle notre vie pour mieux en appuyer un aspect, et donc pour provoquer un sentiment chez le lecteur : admiration, pitié… peut représenter les codes de l’époque où l’autobiographie a été écrite, comme par exemple La Guerre des Gaules de César qui est un récit qui met en exergue le génie militaire de l’empereur, mais peut aussi révéler certaines choses sur l’auteur et cela passe par l’implicite du texte. C’est le cas des Confessions de Rousseau qui sont certes autobiographiques, dont le but affiché dans le Préambule de Rousseau est de se dévoiler à nu devant ses pairs comme il le sera devant Dieu lors du Jugement dernier mais derrière ce jugement que Rousseau s’administre lui-même et le titre qui le met dans une posture de pénitent : car on confesse des fautes, ce que désire Rousseau n’est pas d’être mis au ban de la société pour les fautes qu’il va révéler mais au contraire, il veut provoquer la pitié du lecteur pour la pauvre hère qu’il est. D’ailleurs il reconnaît lui-même dans Les Rêveries du Promeneur solitaire, dans la Promenade consacrée au mensonge, avoir exagéré ses fautes et omis ses bonnes actions afin d’exacerber la compassion du lecteur.

Bien sûr, il existe le mythe de l’auteur inspiré, principalement dans l’Antiquité comme en témoigne le mythe d’Orphée. Dans cette optique, on peut imaginer que le travail préparatoire est réduit, et que l’auteur est une sorte d’émissaire anesthésié entre une entité supérieure qui lui livre le contenu de ses œuvres et son public. Mais cette illusion est à remettre en question, quand on voit que les mêmes auteurs qui se disent inspiré réalisent d’aussi bonnes œuvres que sous « l’inspiration » mais qui ne sont pas guidée par un être inspirateur étant donné qu’elles ont pour sujet l’inspiration et la relation entre celle-ci et son récepteur : par exemple Joachim du Bellay dans le poème « Las, où est ce mépris de Fortune » issu des Regrets. C’est aussi ce que l’on peut constater dans une annexe de La Reine morte de Montherlant, intitulé « Comment fut écrite La Reine mort ». L’auteur perla dans un premier temps d’inspiration : le projet lui est donné par la lecture d’une pièce espagnole qu’il devait traduire. Dans un premier temps, l’écrivain a une mauvaise opinion du texte mais ensuite il est pris des symptômes de l’inspiration : il se réveille une nuit, et a un éclair de génie où il voit comment remanier la pièce. Pourtant la pièce est très personnelle car le dramaturge confie s’être appuyé sur son quotidien, sur le caractère de ses proches pour retravailler les personnages et les évènements au point qu’un critique, Marcel Arland, écrivit à propos de la pièce : « Tout ce qui compte de La Reine morte est de vous ».

Mais « se traverser », se connaître soi ne passe pas que par la rédaction d’une chronologie des étapes de notre vie, car un autre pourrait réaliser ce travail : c’est donc qu’il n’y a rien de vraiment trop personnel dans cette entreprise. C’est ce que malheureusement montre W ou le souvenir d’enfance, quand Pérec montre bien que ce ne sont pas les dates et les noms qui permettent de retrouver les souvenirs et de ressentir l’existence de son père. En effet, le fait de connaître les raisons de sa mort, de se rendre sur sa tombe qu’il retrouve ne lui permet pas de se souvenir de l’existence de son père. Ce qu’il n’appartient vraiment qu’a nous ce sont nos sentiments et nos pensées - nos décisions peuvent être contraintes – et peuvent susciter alors l’acte d’écriture. Alors certes, on pourrait objecter qu’une écriture motivée par nos émotions est spontanée, et donc qu’on est plus dans l’optique d’une démarche motivée par l’écrivain. Cependant, il faut remarquer que si l’écriture est motivée par les émotions c’est aussi parce que l’écrivain est dans une posture qui fait qu’il ausculte ses émotions - c’est ce que suggère cet extrait D’Interjection d’Antonin Artaud « Du corps par le corps avec le corps depuis le corps jusqu’au corps » qui qu’être qu’une anaphore du mot « corps », est un parallélisme de construction qui met en lien une préposition avec le mot corps pour insister sur le cheminement de l’acte d’écriture vis-à-vis du corps et prolongement de ce que suscite le corps chez l’individu (douleur, bien-être, chaleur, …) et donc cette écoute des sensations permet de recueillir les éléments nécessaires pour les retranscrire et faire en sorte que le lecteur puisse les ressentir.  

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