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Dans quelle mesure la littérature est-elle en droit d’investir le champ de la vulgarité ?

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Par   •  12 Janvier 2023  •  Dissertation  •  1 894 Mots (8 Pages)  •  347 Vues

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La vulgarité en littérature - Eléments de corrigé

« Dans quelle mesure la littérature est-elle en droit d’investir le champ de la vulgarité ? »

        On définit généralement la littérature par l’ensemble des œuvres écrites dans laquelle les auteurs utilisent un vocabulaire raffiné, poétique ou soutenu, à des fins esthétiques. Pourtant depuis Gargantua de Rabelais jusqu’à l’Eté des charognes, la littérature offre également des scènes familières, vulgaires, cruelles avec un vocabulaire argotique voire grossier. De fait, la vulgarité s’étend à la fois du côté du peuple (étymologie latine de « vulgus », la foule) et de la grossièreté et du côté de la littérature puisque selon Germaine de Staël qui proposa le mot en 1802 dans De la Littérature : « il n’[existe] pas encore assez de termes pour proscrire à jamais toutes les formes qui supposent peu d’élégance dans les images et peu de délicatesse dans l’expression ». Ainsi, dès l’usage du terme, la vulgarité s’oppose à la littérature, ce que confirme le dictionnaire distinguant le langage vulgaire au langage littéraire. On peut donc se demander si cette ségrégation n’est pas artificielle et si la vulgarité est bel et bien compatible avec la littérature. Dans un premier temps, nous étudierons les réactions hostiles à la confusion entre vulgarité et littérature avant d’envisager cette dernière comme ouverte au peuple ce qui nous conduira à comprendre l’emploi de la vulgarité en Littérature notamment à partir du XIXème siècle. 

I- La Littérature, langue des Dieux et de l’aristocratie raffinée

a) une inspiration mystique

        Dans l’Antiquité, les poètes sont les messagers des Dieux. Leur poétique est dictée par une instance supérieure.

        Pour un poète comme Victor Hugo, la poésie est composée par le Génie, propre à entendre (c’est-à-dire à comprendre) différemment le cours du monde, grâce à des dons supérieurs.

b) une littérature d’élite

        Le moyen-âge voit d’épanouir le roman courtois et chevaleresque où les valeurs héroïques sont défendues. Ces récits sont relayés par l’élite médiévale contre les croyances populaires.

        Le XVIIème voit naître un courant littéraire et mondain : la préciosité. La vulgarité est rejetée au profit des bonnes mœurs, du bon goût (interdiction de présenter un mouchoir dans une tragédie, comble du vulgaire).

c) la littérature, un lieu d’élévation et non d’abaissement

        L’argumentaire de Ferragus dans « De la littérature putride ».

Conclusion partielle : l’histoire littéraire montre que la vulgarité n’a pas été en droit d’être exprimée dans le champ littéraire durant plusieurs siècles.

II- La Littérature, des espaces ouverts au peuple

a) Une littérature pour le peuple

        La vulgarité est, de par son étymologie, l’espace du peuple.

        Le roman est avant tout un espace de littérature populaire puisque écrit en langue romane, soit la langue opposée à celle employée par l’élite (le latin). Ex : le Roman de Renart, le Roman de la Rose etc.

        Rabelais se place au croisement de la langue savante (le latin) et vulgaire (l’ancien français). Dans la démarche humaniste du XVième siècle, il s’illustre par un livre qui associe la plus grande trivialité, générant le rire potache, et le plus grand sérieux (Gargantua est un livre qui s’interroge notamment sur l’éducation humaniste).

b) L’âge d’or du roman populaire

Le roman « vulgaire » pensé et réfléchi pour satisfaire les goûts du public devient par l’intermédiaire de la presse un champ littéraire extrêmement influent au XIXème siècle. Alexandre Dumas, Paul Féval, Eugène Sue (pour qui on invente le terme de « romancier populaire »), Gaston Leroux, Maurice Leblanc voire Balzac seront des romanciers dont la finalité est de plaire au peuple, par ses histoires de faits de divers, de multiples rebondissements, leur côté rocambolesque.

c) Une littérature par le peuple

        Au XXème siècle, bien des personnes « interdites » de littérature prennent la plume à commencer par les ouvriers (la littérature ouvrière), les paysans (Alain Chany) jusqu’aux fans qui publient leurs propres romans (ce que les anglo-saxons appellent la fan fiction).

        Le langage du peuple et des régions, l’argot deviennent la matière littéraire de plusieurs écrivains : Céline, Alphonse Boudard, Frédéric Dard, Michel Audiard.

Conclusion partielle : la littérature populaire trouve au moyen-âge un terrain d’expansion. Plus récemment, au cours du XXème siècle et XXIème siècle, la littérature s’ouvre à des personnes qui ne sont pas des écrivains professionnels.

III- La Littérature à l’épreuve de la vulgarité

a) Le naturalisme, un nouveau rapport à la vulgarité

        Dans un siècle qui « fut propice à une édification sans précédent de codes et de lois encadrant l’ordre des bonnes mœurs », qui n’a cessé de définir ce qui était convenable en fonction de l’âge, du sexe, du milieu, de la classe, établissant de la sorte d’incessantes conventions rigoureuses, Emile Zola et les autres naturalistes ouvrent un nouveau champ des possibles faisant suite aux Romantiques pour qui, selon Germaine de Staël « le vulgaire dans la nature se mêle souvent au sublime ». Victor Hugo, dans la préface de Cromwell (1837), se fera le théoricien de la nécessité de faire côtoyer, en littérature, le grotesque et le sublime pour déployer des intensités nouvelles, plus fougueuses, plus sauvages, plus tristes. Le vulgaire sert alors de contrepoint à l’héroïsme (voir Quasimodo contre Phoebus dans Notre dame de Paris – 1831). Pour le naturaliste, la dimension sublime disparaît au profit d’« un intérêt vulgaire qu’il porte à la vie réelle » (Aldous Huxley). En témoignent les nouveaux lieux où se déroulent les intrigues (les mines de charbon, les blanchisseries, les usines, les chemins de fer, les terres, les maisons closes), lieux populaires par excellence. Ces descriptions de lieux s’accompagnent d’un langage spécifique, celui des parlés du XIXème siècle. Maupassant a souvent retranscrit le patois normand dans ses nouvelles (« aux champs »). Ce parlé nécessite des grossièretés pour accentuer l’effet de réel. Elles émaillent notre vocabulaire, et Zola les défend notamment dans la préface de l’Assommoir comme faisant partie intégrante d’un travail sur la langue qui ne doit pas être réservé à une élite (« ).

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