Le suffrage universel est-il une condition de la démocratie ?

Le suffrage universel est-il une condition de la démocratie ?

Née à Athènes dans l’antiquité et toujours présente aujourd’hui dans près de 40% des états, la démocratie - mot composé du Grec démos, le peuple, et kratos, le pouvoir - est un système politique dans lequel le pouvoir émane du peuple et auquel de nombreuses valeurs sont intrinsèques.

Ainsi, s' il n’y a pas de critères officiels de la démocratie, il existe des valeurs démocratiques consensuelles et implicites qui lui sont indissociables. Parmi elles, l’état de droit - état qui se soumet aux lois votées par la souveraineté - la présence d’une constitution ou de textes fondateurs, la souveraineté du peuple, la séparation des pouvoirs ou encore la garantie des libertés fondamentales - les citoyens peuvent vivre comme bon leur semble à la limite des lois).

Souvent associé à ces conventions, le suffrage universel - vote non restreint étendu à tous les citoyens sauf exceptions prévues par la loi - a cependant été contesté à de nombreuses reprises depuis qu’il existe au sein des démocraties.

Ainsi, peut-on dire que le suffrage universel est une condition de la démocratie ? La démocratie est-elle possible sans le suffrage universel ?

La souveraineté du peuple est inhérente à la démocratie, à l’instar de l’état de droit, dès lors on peut dire que les citoyens doivent prendre les décisions, et pour tous les représenter, quel meilleur moyen que l’utilisation du suffrage universel ?

Dans un premier temps, le suffrage universel seul n’est pas suffisant pour garantir une prise de décision juste. Par exemple, il doit être couplé au pluralisme politique afin que le plus de citoyens possible voient leurs idées représentées. Ainsi, des pays comme la Chine élisent leurs représentants au suffrage universel sans pour autant être considérés comme des démocraties du fait de leur monopartisme. De plus, les votes doivent non seulement être libres, mais aussi réguliers pour assurer une représentation correcte de l’opinion des citoyens. En effet, on ne saurait considérer un vote sous menace comme représentatif et, de la même manière, des élections de dirigeants trop espacées dans le temps ne permettraient pas de suivre l’évolution de l’opinion du peuple quant à ceux qu’il a élus.

Il n’empêche qu’il doit être utilisé, même couplé à d’autres critères pour représenter l’opinion de l’ensemble des citoyens.

Cependant, même lorsque c’est le cas, on observe des problèmes de représentation, comme la tyrannie de la majorité, théorisée au XIXe siècle par Alexis de Tocqueville, idée selon laquelle le suffrage universel favorise la majorité de la population et fait du reste de celle-ci un ensemble de minorités peu ou moins représentées, ce qui crée notamment des risques de révoltes. On en voit des exemples dans l’actualité avec des phénomènes comme le mouvement des gilets-jaunes ou l’abstention, qui manifestent le mécontentement de certains citoyens de ne pas se sentir assez représentés et écoutés.

La décision prise demeure tout de même celle du peuple dans sa majorité, elle est donc meilleure que n’importe quelle autre possibilité.

A ce sujet, Alexis de Tocqueville a justement développé l’idée de despotisme démocratique : dans les démocraties, notamment modernes, les citoyens ont tendance à délaisser la sphère politique au profit de leur sphère privée et renoncent à voter, ou le font par conformisme avec la majorité. Ainsi les votes au suffrage universel peuvent diminuer la part démocratique des prises de décision et favoriser des pratiques politiques comme le populisme ou la démagogie, qui s’appuient plus sur le charisme d’un leader et la flatterie des citoyens que sur un programme politique concret,

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