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La raison est-elle une obstacle au bonheur ?

Cours : La raison est-elle une obstacle au bonheur ?. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  13 Octobre 2020  •  Cours  •  2 303 Mots (10 Pages)  •  721 Vues

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Méthode : Dissertation rédigée : La raison est-elle une obstacle au bonheur ?

Exercice : il faut remettre dans l'ordre les paragraphes        

Quand à l’injonction d’être raisonnable n’est-elle comme le dit Calliclès qu’une injonction contre-nature visant à empêcher l’individu de vivre pleinement son  bonheur au nom d’exigences sociales illégitimes ? La restriction de nos désirs dus la vie en société semble inévitable non seulement à la paix sociale mais aussi au bonheur de l’individu dans la mesure où cette vie sociale est un élément indispensable de notre bonheur. C’est grâce à cette vie sociale que l’on peut organiser une coopération dans le travail grâce à laquelle on pourra satisfaire plus efficacement l’ensemble de nos désirs. La vie sociale n’exclut pas les plaisirs solitaires mais l’ermite se prive de toutes les jouissances qu’occasionne la rencontre avec autrui.

        Pourtant, ce serait ignorer que les seuls désirs qui peuvent nous conduire à la joie sont ceux que l’ont a pu authentiquement s’approprier, ceux qui partent de nous et expriment notre nature, au lieu de venir du dehors ; quant aux autres, il ne peuvent que nous donner un plaisir éphémère et une satisfaction imparfaite. Si la satisfaction du désir peut conduire de déception en déception, c’est parce que nous nous laissons entrainer à désirer ce que l’on considère communément comme désirable, comme dans la société de consommation, ou ce que nos parents, notre culture considèrent comme désirables. Il est illusoire de croire qu’en laissant errer notre désir, il trouvera spontanément l’objet qui lui convient. Seule une réflexion lucide sur nos désirs peut nous conduire à distinguer ce qu’on désire authentiquement et qui nous procurera une joie véritable et ce qu’on désire inauthentiquement et qui n’effacera jamais la frustration. La raison est donc ici le moyen de l’appropriation et de l’autonomie de notre désir car il faut beaucoup de lucidité pour prendre conscience que la plupart de nos désirs proviennent de l’extérieur, de notre passivité, même si le bonheur provenant d’une émotion, la raison ne saurait par elle-même la produire et peut même parfois contribuer à la tempérer.

        De plus, c’est à juste titre que l’on oppose l’homme raisonnable au jouisseur. Alors que le premier cherche à maximiser son plaisir, le second ne pense qu’à le limiter. Etre raisonnable ne signifie rien d’autre que renoncer à certains de nos désirs et pourtant c’est par la multiplicité de nos désirs que nous pourrons atteindre le plus de plaisir. La raison s’oppose aussi à la passion, or c’est grâce à nos passions, autrement dit, à nos désirs les plus déraisonnables que nous pouvons atteindre les plaisirs les plus intenses puisque en effet l’intensité du plaisir est corrélée à celle de nos désirs. Par le renoncement à la passion qu’elle exige, la raison introduit une tiédeur dans notre existence qui s’oppose en tout point à ce que serait une vie de jouissance mais aussi de cette façon, elle dévitalise la vie. C’est ainsi que Calliclès, dans le Gorgias de Platon, compare la vie de l’homme tempérant, autrement dit, raisonnable, à celle d’une pierre ou d’un cadavre. La raison assèche en nous l’émotivité qui nous rend apte à ressentir le bonheur.

        Aussi bien l’on peut se demander d’où provient cette injonction de se conduire raisonnable, pourquoi cela serait-il une valeur puisque cela nous éloigne de notre recherche du bonheur, seule fin véritablement ultime et naturelle de toute existence ? L’origine de cette injonction est la morale, nous dit Calliclès, plus précisément la morale commune, celle de la masse. Cette morale, selon lui, n’est qu’un artifice de la société qui vise à sa propre conservation, au détriment des fins véritables de l’individu. Car il est vrai que si chacun se lançait, comme il serait légitime qu’il le fasse du point de vue de la nature, vers la poursuite sans limite de ses plaisirs, la vie sociale serait impossible, tout du moins pour les plus faibles. C’est pourquoi ce sont en fait les faibles qui font l’éloge de la vie raisonnable, soit parce qu’ils sont incapables d’être animés par de puissants désirs, soit parce qu’ils sont dans l’incapacité de les réaliser. Mais il y a dans un tel éloge une hypocrisie évidente, le masque du ressentiment, l’aveu de leur impuissance au lieu de la défense de ce qui se présente à eux comme un véritable idéal de vie. La haine du tyran, qui ne connaît aucune limite à son désir et qui peut tout ce qu’il désire, n’a d’autre mobile que l’envie. Ce n’est pas de la raison dont nous avons besoin pour atteindre le bonheur, mais du courage, celui d’assumer un idéal de vie posée par la nature même mais allant à l’encontre de la morale commune qui jette l’opprobre sur la vie du jouisseur.

        Vivre sous la direction de la raison, être raisonnable n’est-ce pas vivre dans la privation de toutes les jouissances qui font le bonheur véritable ? Pourtant, même à supposer que le bonheur réside dans une vie de plaisir, la raison n’est-elle pas l’instrument le plus efficace pour parvenir à leur maximisation ? ou alors si le bonheur ne réside pas dans un état mais dans une émotion, la raison n’est-elle pas finalement étrangère à cette quête ?

        Pourtant ce procès fait à la raison n’est-il pas injuste ? En admettant comme Calliclès que le bonheur est dans la réalisation de tous nos désirs sans restriction, la raison n’est-elle pas l’instrument essentiel de cette réalisation ?

        Nous pouvons déjà trouver dans son discours une forme d’aveu : « il faut mettre son courage et son intelligence au service de si grandes passions ». Sans intelligence, sans raison, nous resterions impuissants face à nos désirs. Comment trouverions-nous les moyens de les réaliser, si la raison, grâce à son analyse de la réalité, ne nous donnait pas le pouvoir d’agir efficacement sur celle-ci. La réflexion, l’ingéniosité humaine permettent aux individus et aux sociétés de se délivrer des contraintes matérielles, d’élever le niveau d’existence, d’assurer bien-être et loisir. La raison nous a permis de développer notre science et notre technique. Celles-ci nous ont permis d’assouvir de plus en plus de désirs. Si l’humanité avait préféré se laisser aller à ses impulsions immédiates, comme le recommande Calliclès, nous en serions encore à rechercher péniblement comment assouvir nos besoins les plus primaires. En nous libérant des contraintes matérielles de l’existence, la connaissance, fruit de la raison, a multiplié nos sources de plaisirs et donc a augmenté notre bonheur. De même l’exigence de lucidité, portée par notre raison, nous prémunit d’un bonheur illusoire généré par l’imagination et qui ne peut être qu’un bonheur précaire car on ne peut continuellement échapper à la réalité. Si, comme on le dit, celle-ci finit toujours par nous rattraper dès lors mieux vaut éviter la déception produite par la désillusion. En se confrontant à la réalité, un esprit rationnel augmente sa puissance d’agir au lieu de s’enfermer dans un monde illusoire qui ne peut que le condamner à l’inaction.

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