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Le roman peut-il appréhender le réel ?

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Par   •  26 Juin 2019  •  Dissertation  •  2 145 Mots (9 Pages)  •  1 231 Vues

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Le roman peut-il appréhender le réel ?

Le genre du roman a beaucoup évolué à travers les siècles. Il désignait d’abord une œuvre écrite en roman, la langue vernaculaire au Moyen-Age. L’époque classique lui confère ses lettres de noblesses et le consacre comme une œuvre fictive narrative en prose. Ce genre connaîtra une popularité croissante au XVIIe siècle où il est vivement critiqué pour sa dimension imaginaire, incitation dangereuse à l’oisiveté. Le formidable essor de la culture et de l’éducation ainsi que de la technologie participe de la diffusion du roman au XIXe siècle. Cet âge d’or du roman est marqué par une grande variété d’auteurs, des réalistes aux romantiques. Le roman, genre bâtard comportant diversité de sous-genre, porte par sa nature même un paradoxe. Ainsi, Stendhal affirmait que le « roman est un miroir qui se promène sur une grande route ». Le roman s’éloigne de ce fait de ses débuts dans la fiction et se rapproche d’une représentation fidèle de la réalité. Pour Stendhal, l’effort du romancier vise surtout à en donner une vision parfaite. Celui-ci s’inscrit par sa vision réaliste du roman dans son époque. Toutefois, un roman peut-il vraiment appréhender le réel ? C’est-à-dire saisir par l’esprit ce qui existe indépendamment de nous ? Nous verrons tout d’abord que le romancier s’attache à représenter la réalité le plus fidèlement possible par un contexte véridique mais aussi par la psychologie des personnages. Cependant, le romancier ne donne qu’une vérité à voir, la sienne. Autant par les choix de sujets que par la manière de faire. En tout état de cause, l’écrivain essaie de dépasser ce paradoxe en pliant la vérité conformément à sa vision artistique et, faisant parfois fi de la réalité, en vient à établit un univers, réel par lui-même.        

        

        Le romancier rapproche son œuvre du réel en y puisant son inspiration, par l’expérience que lui-même y fait.

        Ainsi, le mouvement réaliste est probablement le plus représentatif de cette volonté. Balzac n’ambitionne-t-il pas de « faire concurrence à l’Etat civil » ? Les carnets de notes, noircis d’annotations et de réflexions du naturaliste Zola, écrits en amont d’Au Bonheur des Dames, présentaient des plans des quartiers ainsi que des témoignages des rouages des grands magasins encore naissant à Paris qui allaient écraser la concurrence des petites enseignes. Aussi son travail s’apparente-t-il à un travail de journaliste d’enquête lorsqu’il va à la rencontre du monde ouvrier, avant la rédaction de Germinal, poursuivant par là sa volonté de faire du roman une sciences à même de révéler les sourds déterminismes sociaux à l’œuvre. Les grèves des mineurs violemment réprimées sont décrites, dépourvues du fard de la bienséance et traduisent le combat social portant l’embryon de ce que sera le syndicalisme. Pour ajouter du poids au réalisme de l’intrigue, les références spatiales et géographiques sont précises. Dès les premières pages de Thérèse Raquin, l’intrigue est située passage du Pont-Neuf, à Paris. Le passage sert autant des fins de réalisme qu’il est annonciateur du dénouement tragique de l’intrigue. La ruelle sombre et sale semble étendre son insalubrité, sa noirceur sur ses habitants. Ces cadres, familiers du lecteur, aident à comprendre la thèse de l’auteur, tentative de compréhension du réel, ou encore facilitent l’identification aux protagonistes par un rapprochement avec l’environnement du lecteur. Ce travail d’analyse se tient au plus près du quotidien contemporain de ces auteurs. Il s’agit d’une capture de l’instant.

        Par ailleurs, quand les repères ne sont pas contemporains de l’auteur, ils peuvent s’adresser directement à une réalité historiques antérieures. Afin de renforcer cet effet, le lecteur est plongé dans l’époque par des détails évocateurs ou des personnages historiques pouvant servir de référence. Ainsi, La Chartreuse de Parmes précise dès le départ du roman le contexte de la naissance du héros, Fabrice, à travers les conquêtes napoléoniennes, avec force de date et de personnalités historiques. Cela permet à Stendhal d’éclairer le lecteur sur le climat politique en Italie qui lui servira de base pour l’intrigue. La naissance de Fabrice se fait dans la joie de la libération des peuples italiens annonçant son caractère jovial et libre. Le comte Mosca va régulièrement à la Scala, comme la haute société italienne d’alors. Ce détail conforte l’illusion du réel et crée l’atmosphère dans laquelle l’intrigue va prendre germe.

        Aussi, non seulement l’auteur s’inspire-t-il du contexte socio-politique mais il dépeint surtout avec réalisme la psyché humaine. Les lecteurs doivent pouvoir trouver dans les personnages un miroir d’eux-mêmes qui permet de réaliser une meilleure identification. C’est le cas de l’ironie moqueuse que Flaubert met en œuvre dans Madame de Bovary : Emma, l’héroïne, se languit en dans un petit bourg de Normandie. Flaubert y dissèque les mécanismes psychologiques qui mèneront cette petite bourgeoise vers une fin tragique. La création du chef-d’œuvre pris cinq ans à son auteur qui cherchait à dépouiller son style de toutes réflexions personnelles, d’être le plus neutre et le plus réaliste possible. Le narrateur omniscient permet de livrer toutes les pensées des personnages, de forcer leur intimité et de les mettre à nu pour le lecteur. Une relation privilégiée s’installe ainsi entre le lecteur et les personnages, permettant au premier d’accéder à la connaissance du cœur humain.

        En somme, dépeindre le réel s’effectue au travers de la psychologie des personnages et du cadre de l’intrigue. Le roman semble se rapprocher de celui-ci en rappelant ce qui est familier au lecteur.  

        Cependant, le miroir dont Stendhal parle, ne donne une vision que partielle de la réalité, qu’il déforme selon la vision de l’auteur et réduit par le style ou le choix du sujet.

Aussi, le cadre réaliste de l’histoire, allié au style de narration plus proche d’un rapport que d’un roman, ne suffisent pas à rendre Homo Faber de Max Frisch plus vraisemblable. Le fabuleux concours de circonstance amenant le héros Walter Faber à rencontrer le frère de son ami d’enfance dans un avion puis sa fille cachée sur un bateau paraissent invraisemblable. La distorsion sert avant tout le propos du romancier qui défend une thèse ou un point de vue. Ici, sur les évolutions de notre société sous le coup des avancées techniques qui nous déshumanisent lentement. Le propos, l’idée du romancier qui se veut la critique de notre société, déteint sur son œuvre et modifie la réalité au gré de son propos.

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