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Réformer l’Etat aujourd’hui : le prérequis essentiel pour une gouvernance locale de développement Par Sa’ah François GUIMATSIA

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Par   •  2 Décembre 2012  •  Cours  •  3 066 Mots (13 Pages)  •  1 505 Vues

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Réformer l’Etat aujourd’hui : le prérequis essentiel pour une gouvernance locale de développement

Par Sa’ah François GUIMATSIA, écrivain

E-mail : saafrancis2002@yahoo.fr Tél : (237) 77 77 09 71

Sa’ah François GUIMATSIA est auteur de trois livres et co-auteur d’un quatrième, tous publiés chez l’Harmattan, Paris, dont Meghegha’a Temi ou le tourbillon sans fin (roman, 2009), La décolonisation de l’Afrique ex-française, enjeux pour l’Afrique et la France d’aujourd’hui, ouvrage collectif coordonné par Alexandre Gerbi (janvier 2010), Cinquante ans de bilinguisme au Cameroun Quelles perspectives en Afrique ? en octobre 2010, préfacé par Ebénézer Njoh Mouelle, et enfin Des graines et des chaines, un recueil de nouvelles, 2011. Il est par ailleurs le Chef du Département d’Anglais au Centre Linguistique de Douala.

L’Etat colonial, notamment en Afrique francophone, était un outil d’assimilation et de domination des populations du territoire colonisé. Après l’indépendance, nous pouvions le démanteler comme un esclave libéré brise ses anciennes chaînes ou, mieux encore, conserver l’outil et le transformer en pilote de notre processus d’émancipation véritable. Paradoxalement, l’Etat postcolonial a conservé certains anachronismes coloniaux comme le centralisme excessif - entre autres - et au total il ressemble plus à un facteur de régression qu’à un moteur de développement. Le réformer en profondeur devient donc un impératif catégorique aujourd’hui, car si nous voulons atteindre nos objectifs de développement, la gouvernance locale doit nécessairement être soutenue et entretenue par un contexte politico-institutionnel rénové dans lequel l’Etat, reformaté dans ses dimensions locale, nationale et même continentale, joue pleinement son rôle de catalyseur de notre développement.

I - L’Etat postcolonial : plus d’ombres que de lumières

L’Etat moderne est la manifestation de la volonté des hommes de se doter d’un cadre sociopolitique ayant le maximum d’avantages et le minimum d’inconvénients. Ici nous pensons au livre Du contrat social de Jean Jacques Rousseau publié en1762 : pour cet auteur, les hommes ont renoncé à leurs droits naturels afin que l’individu se protège mieux grâce à la collectivité, cela d’autant plus que l’obéissance aux lois qu’on s’est volontairement prescrites est liberté. Mais les Etats africains ont été créés au 19ème siècle par les colons européens pour servir de débouchés à leurs industries.

La suite de cette histoire, nous la connaissons bien.

Dès le départ, l’Etat colonial (français notamment) a fait de la chosification des colonisés son cheval de bataille : pour eux, la colonie n’était pas un pays de citoyens ayant des droits à respecter. Quand arriva le moment des indépendances, il leur imposa parfois une sanglante guerre de libération, comme en Algérie et au Cameroun, avant de passer le relais (avec quelles consignes ?) à l’Etat postcolonial qui, depuis plus de 50 ans, dans ses relations avec les citoyens, n’a absolument pas déblayé la voie pour la gouvernance locale de développement. Bien au contraire, au fil des décennies, ses méthodes et ses stratégies dans ce domaine ont inexorablement installé et consolidé la mal-gouvernance. Parmi ces manquements auxquels nous sommes ainsi habitués en Afrique, citons-en trois, à titre d’illustration :

- Le non-respect des droits de l’homme. Selon les organisations spécialisées qui s’en occupent, la violation des droits de l’homme est une réalité quotidienne en Afrique. Les arrestations, les intimidations, les disparitions, la torture ainsi que l’usage régulier d’une violence disproportionnée contre des manifestants aux mains nues indiquent bien que l’Etat en Afrique ne s’embarrasse pas de scrupules. On se souvient des massacres perpétrés au nom de l’Etat en Guinée Conakry le 28 novembre 2009 à l’époque de Moussa Dadis Camara (avec au bilan 157 morts, 130 femmes violées et des dizaines de disparus), des 3000 morts de la crise postélectorale ivoirienne en 2011, des 35 morts lors d’une grève de mineurs sud-africains en août 2012, etc. Ces tragédies installent la peur et une résistance passive dans les esprits, et n’encouragent pas les Africains à participer ou à s’exprimer.

- La gangrène de la corruption. La concussion et la prévarication sont partout érigées en systèmes de gestion, notamment dans les secteurs gérés ou contrôlés par l’Etat. Le service public désintéressé n’est pas la préoccupation des agents de l’Etat qui se livrent impunément au racket et à l’arnaque des usagers. C’est ainsi que le Cameroun a eu la palme d’or de la corruption à la fin des années 90, et n’a jamais quitté le peloton de tête depuis lors. Cela n’est certainement pas la meilleure façon de préparer le pays à la gouvernance locale, qui rime avec de nouvelles ressources à gérer.

- L’opacité dans le système de gouvernance. Comme résultat du brouillage créé par la corruption, il n’y a ni lisibilité ni prévisibilité dans le recrutement ou la promotion du personnel de l’Etat qui, conscient de l’impact du favoritisme et du clientélisme sur sa carrière, se complaît dans une logique de rente et non de performance. L’intégrité, la compétence et la responsabilité sont ostensiblement et quotidiennement foulées aux pieds, une pratique rétrograde qui nous accoutume aux avatars de la médiocratie et nous empêche de profiter des vertus de la méritocratie.

Toutefois, dénoncer ainsi de l’image négative de l’Etat postcolonial ne signifie pas du tout qu’il faille jeter le bébé avec l'eau du bain. C’est juste pour montrer que nous avons véritablement atteint le creux de la vague, d’où l’ampleur et l’urgence des réformes à faire. D’ailleurs l’Etat comme institution, chez nous comme ailleurs, reste une œuvre humaine inachevée et donc perfectible.

II – Quel Etat pour l’Afrique aujourd’hui?

Notre émergence est inconcevable avec la balkanisation actuelle du continent, tout comme notre décollage économique ne peut avoir lieu sans une réelle déconcentration de la gestion des affaires

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