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Les réactions du Vieux Nice à la crise de la Covid, de la culture alternative aux commerces

Étude de cas : Les réactions du Vieux Nice à la crise de la Covid, de la culture alternative aux commerces. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  1 Novembre 2022  •  Étude de cas  •  5 955 Mots (24 Pages)  •  168 Vues

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Introduction

« Il faut reprendre le contrôle de nos vies ! Liberté ! » s’écriait Christophe Wilson, restaurateur du centre-ville de Nice, après la réouverture illégale de son établissement le mercredi 27 janvier 2021. Depuis maintenant 1 an, le Vieux Nice, véritable poumon de l’économie, de la culture – et de la contre-culture – et des arts de la ville, s’essouffle petit à petit. Les rues habituellement chargées de passants se sont vidées au cours du premier confinement, un peu moins au cours des deux suivants, mais toujours est-il que la réduction des sociabilités et toutes les formes d’interactions qu’elles entrainent a considérablement bouleversé les habitudes et les répertoires d’action de ceux qui font vivre le Vieux.

L’étude sociologique dont il sera ici question focalise son analyse sur le cœur névralgique de Nice, de ses quartiers les plus populaires aux quartiers les plus prisés, du quartier des Diables Bleus à la promenade des Anglais. Les lieux emblématiques qui reflètent l’état végétatif dans lequel l’activité économique niçoise est plongée depuis plusieurs mois sont investis par différents acteurs qui en assurent en temps normal la vitalité. Les collectifs associatifs se revendiquant de la culture alternative, les associations de commerçants, les hôteliers, les fêtards, tiennent les rôles de premier plan dans le dynamisme et l’attractivité du centre-ville. Si le choix s’est porté sur ce quartier et ces lieux précis plutôt que d’autres, c’est puisque mes racines niçoises m’ont conduit à découvrir et à participer aux sociabilités qui s’y jouent, notamment au cours de ma première année de licence d’anthropologie au campus Carlone en 2018-2019. Les « anciens » étudiants que j’y côtoyais m’ont familiarisé avec la culture alternative naissante qui commençait à sérieusement s’organiser, autour des référents anarchistes et des idéaux d’une société autogérée. 3 ans plus tard, il m’a paru pertinent de revenir pour me focaliser en partie sur ce milieu, car il est un terreau fertile qui a ainsi dû, comme je le supposais, prendre en compte les contraintes sanitaires dans son développement et sa notoriété. Mais la crise mondiale de la Covid a irrémédiablement marqué un coup d’arrêt aux habitudes ancrées dans le quotidien des Niçois : entre l’annulation du traditionnel carnaval de Nice, l’annulation de la fête de la Santa Capelina, et les distributions répétées d’amendes pour des pratiques de rue faisant partie de l’ADN de partie des habitants du Vieux, chacun a dû s’adapter. La révolte primant dans de nombreux cas, la résignation primant dans d’autres, les confinements ont révélé la diversité des comportements politiques de ces acteurs clés quant à la pérennité de leurs activités si essentielles.

La réflexion guidant cette étude vérifiera ainsi si les mesures sanitaires inédites consubstantielles à la crise de la COVID ont vraiment conduit à l’affaiblissement et à l’essoufflement des milieux commerçants et de la culture alternative.

Il s’agira dans un premier temps de montrer comment le bouleversement de l’activité économique du Vieux-Nice a pu mener les mouvements à se mobiliser pour réclamer que justice soit rendue. En mobilisant, ou simplement en envisageant certains répertoires d’actions, nous observerons combien les restaurateurs et tenanciers ont voulu faire front face à l’épidémie comme à des mesures considérées excessives. Il nous faudra ensuite développer dans un deuxième axe comment ce désir puissant de fête et de loisir associé à la fréquentation de ces établissements a lui aussi été mis à mal par les mesures de restriction, ce qui a conduit au recours à des moyens d’action et de manifestation aussi originaux qu’improbables. Enfin, une dernière partie s’efforcera de voir comment cette restructuration citoyenne des habitants du Vieux-Nice a su s’appuyer sur la forte présence d’associations et d’acteurs de la culture alternative niçoise. A la fois soutiens et catalyseurs de la mobilisation du Vieux, ces acteurs associatifs sont le lien de solidarité qui a su redonner un élan démocratique et citoyen à la ville.

Cette étude ayant dû se faire à distance, tous les matériaux et méthodes relevant de l’observation participante propre aux approches ethnographiques n’ont pu être mobilisés. Il reste toutefois qu’un certain nombre d’articles scientifiques et d’ouvrages ont permis nourrir la réflexion autour de la mobilisation du Vieux-Nice en période de restrictions sanitaires, au même titre que les supports – reportages, presse alternative – produits par les acteurs de la culture alternative niçoise eux-mêmes, ainsi que la collaboration de certains acteurs de ce milieu, anciens camarades de l’Université Nice-Sophia Antipolis et anciennes connaissances, qui ont accepté de répondre à mes questions. Il est évident que le recoupage de ces matériaux donnera, malgré les efforts d’objectivation, davantage le point de vue des Niçois administrés que celui des Niçois administrateurs, la Mairie de la ville n’ayant donné suite à mes sollicitations. Néanmoins, les pages à venir illustreront bien les évidents conflits d’intérêt qui opposent ces deux camps, dans ce que les premiers semblent considérer comme une guerre ouverte menée par la mairie.

I. La mobilisation des restaurateurs et tenanciers du Vieux : des comportements contraires

La crise de la Covid a contraint les commerces non-essentiels, au rang desquels les restaurants et les bars, à une fermeture prolongée pendant les confinements, au nombre de 4 à Nice. Livrés à eux-mêmes, les professionnels du milieu n’avaient guerre le choix que de se mobiliser selon que la survie économique de leur établissement était – et continue à être – en jeu.

i. Rouvrir pour survivre

Malgré un soutien substantiel de l’Etat, caractérisé par des aides financières directes, la mise en place d’un crédit d’impôt pour les bailleurs supposé faire baisser le prix des loyers pour les occupants des murs, ou encore la mise à disposition de fonds pour faciliter la transition numérique et l’adaptabilité à de nouvelles modalités de travail, les restaurateurs niçois n’ont pour la plupart pas trouvé satisfaction pendant les confinements successifs. La cause n’est pas simplement liée à la difficulté économique, mais aussi à ce qu’ils dépeignent, au même titre que d’autres restaurateurs français, comme un viol des libertés les plus fondamentales et d’une privation du plaisir. Les associations de restaurateurs plaident ainsi largement en faveur

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