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Le nucléaire

Étude de cas : Le nucléaire. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  10 Mai 2013  •  Étude de cas  •  6 519 Mots (27 Pages)  •  598 Vues

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La question du nucléaire est également particulièrement intéressante à pointer pour montrer que les avancées de la science et des technologies sont désormais ouvertes à la controverse politique. Yannick Barthe étudie ainsi les processus d’« irréversibilisation technique » de la question de l’enfouissement des déchets nucléaires1 : à travers un cadrage essentiellement scientifique, ce dossier est d’abord capté par les ingénieurs de l’industrie nucléaire qui mettent en avant des considérations avant tout techniques et monopolisent ainsi l’enjeu des grands choix technologies en France : il faut du nucléaire ; et les déchets produits par cette activité ne peuvent être qu’enfouis dans des couches géologiques profondes. Mais ce processus échoue : la politisation de la question est ré-ouverte dans les années 1980, « après la bataille » donc (c’est-à-dire après que la décision d’enfouissement ait été prise) mais surtout, en dépit de l’évidence technique (il n’y a qu’une solution pour se débarrasser des déchets). Les « irréversibilités techniques » peuvent donc être « mises en politique » ; et « c’est précisément ce processus d’irréversibilisation d’une solution technique qui, dans le cas des déchets nucléaires, a rendu possible une qualification politique du problème et, par voie de conséquence, sa saisie par des instances politiques »2. « Problématisation technique et problématisation socio-politique ne s’opposent donc pas ; elles forment continuité »

La consultation

Les techniques consultatives visent à recueillir l’opinion du « public », filtré par différents dispositifs ou bien l’opinion de groupes sociaux plus précis telle que la formulent certains porte-parole institués. Mais il revient ensuite aux élus ou aux experts de choisir et l’on reste finalement dans l’espace assez classique de l’aide à la décision ou des organes consultatifs, dont la loi prévoient qu’ils doivent donner un avis à l’administration au sujet de tel projet d’action publique (comme le Conseil d’Etat, les Commissions administratives paritaires, le Conseil économique et social, ou les comités et commissions institués par les ministères). De même, ces techniques consultatives ne sont pas d’essence démocratique puisqu’on les retrouve également sous une forme corporatiste dans les régimes autoritaires.

Ce type de dispositif est donc éventuellement conflictuel mais aussi préparatoire à une décision ou à un projet d’action publique ainsi que ponctuel, limité à l’amont de la décision. Il vise également un objectif gestionnaire, renforcer l’acceptabilité sociale d’un projet éventuellement controversé. Selon Jean-Pierre Gaudin, le recours à la « participation des citoyens » n’est qu’une diversification récente et un prolongement de la consultation des experts pour éclairer et rationaliser la décision publique : en ce sens, la délibération n’est qu’une nouvelle figure de l’aide à la décision3.

Le « Débat national sur l’eau » impulsé par le Ministère de l’environnement de février 2003 à juin 2004 afin d’établir les bases d’une nouvelle politique de l’eau illustre l’invocation du public et son intégration dans un processus législatif et un domaine d’action publique, l’eau, largement réservé à quelques acteurs corporatistes4. Après une phase d’élaboration d’un pré-projet avec le Ministère de l’environnement et les Agences de l’eau, divers instruments ont été mobilisés pour recueillir l’opinion du grand public (sondage, questionnaire électronique, focus groups d’usagers, conférence de citoyens). Le but du Ministère est de renforcer une régulation centralisée des questions hydrauliques. D’où une maîtrise totale du dispositif (organisation, pilotage des débats) par les fonctionnaires de l’Environnement et le rejet d’une saisine du CNDP, jugée risquée. Pourtant, les autorités tendent à marginaliser ce public construit et mobilisé comme source de légitimation dans le processus législatif ; et les acteurs traditionnels de ce secteur (agences de l’eau, comités de bassins, associations de protection de l’environnement) n’apparaissent que très peu ébranlés par cette mise en publicité. En effet, les « Parlements de l’eau » (réunissant élus locaux, représentants de l’Etat, associations environnementalistes ou d’usagers, monde agricole et

acteurs techniques : agences de l’eau, comités de bassin) ont maîtrisé les déclinaisons locales de ce débat national, sollicitant les acteurs les plus concernés et donnant un aspect souvent technique aux discussions.

On peut également prendre l’exemple des CLIC (comités locaux d’information et de concertation) institués après la catastrophe d’AZF avec la Loi Bachelot5. Les débats ayant fait suite à l’explosion et la loi qui est votée ne remettent absolument pas en question la place de la DRIRE et des exploitants dans les contrôles des sites dangereux. Il s’agit même de renforcer leurs moyens. En parallèle, le ministre de l’environnement Yves Cochet entend démocratiser la gestion des risques industriels en créant une instance ouverte de contrôle avec une vraie capacité de contre-expertise. Malgré cela, des résistances administratives en interne puis surtout le changement de majorité politique avec les élections de 2002 vont détricoter ce projet : la loi Bachelot qui va finalement sortir en revient ainsi à une conception plus classique en limitant l’instance collégiale à un simple rôle pédagogique et en la créant par le haut : un ensemble de responsables techniciens (notamment les industriels) apportent de l’information à un ensemble choisi de représentants (syndicaux, associatifs) dans le but de contribuer à l’acceptabilité sociale du risque industriel et ce, sous l’égide de l’Etat via les DRIRE.

La concertation

La concertation désigne une action collective, réunissant plusieurs personnes, qui tentent de s’accorder en vue d’un projet commun. En ceci, elle se distingue de la négociation puisqu’elle n’aboutit pas nécessairement à une décision, mais qu’elle vise à la préparer. La concertation se distingue également de la consultation précédemment vue en ce qu’elle ne se résume pas à une demande d’avis ou d’information mais suppose une confrontation entre les parties prenantes, un échange d’arguments visant à l’explicitation des points de vue de chacun.

Les techniques concertatives visent en effet non pas seulement à informer ou à s’enquérir d’un avis mais à produire un consensus. Il convient donc de donner d’emblée quelques

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