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Les grandes écoles favorisent-elles la méritocratie ?

Discours : Les grandes écoles favorisent-elles la méritocratie ?. Recherche parmi 302 000+ dissertations

Par   •  8 Juin 2025  •  Discours  •  1 444 Mots (6 Pages)  •  61 Vues

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Sylvanie Lozach GO Sociologie  

Sujet : Les grandes écoles favorisent-elles la méritocratie ?

   En France, le système « méritocratique », prônant le mérite de la réussite scolaire en faisant croire à ceux qui sont parvenus « en haut » que leur réussite leur revient à eux seuls et que les autres « méritent leur sort », est devenu avec la IIIe République notre idéologie nationale. Cette idéologie se reflète d’autant plus dans le système d’accès aux « grandes écoles ». Un siècle auparavant, le dramaturge Beaumarchais relatait dans une de ses célèbres pièces intitulée Le Mariage de Figaro cette critique face à l’aristocratie de son temps :« qu’avez-vous fait pour tant de biens ? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus ». Ainsi, les élites françaises, le « Tout-Paris » réunit donc les représentants les plus influents de la politique, des arts, de la banque, de la télévision et sont en majorité tous passés par de « grandes écoles » telles que l’ENA, HEC, Science Po ou encore l’ENS.

Dans un premier temps, il est notable de souligner que les « grandes écoles » favorisent les plus favorisés. En effet, Paul Pasquali, sociologue au CNRS associe dans son ouvrage intitulé Héritocratie, le mérite scolaire et l’hérédité sociale. Ainsi, le mérite appartient toujours aux héritiers. D’une part, de par les héritages familiaux naissent des élites dynastiques dans les affaires comme dans le cas des Rothschild, Bouygues ou encore Michelin. Ainsi, il est presque impossible d’entrer dans ce tissu solide si l’on ne démarre pas dans la vie à partir de cette élite et si nous n’avons pas les « bons contacts ». Tout reposerait en réalité sur le phénomène de népotisme dont les individus qui en bénéficient, se cachent derrière la notion de « méritocratie ».

Il en est de même pour les grandes écoles. En effet, si l’on prend l’exemple de Science Po qui s’est en apparence démocratisé depuis 1970 est resté en réalité tout autant sélectif. Cela s’explique notamment par la préservation d’un système clientéliste via une sélection scolaire et sociale incontestable. En effet, d’après une étude de l’IPP sur 100 étudiants, 64 sont issus des classes très favorisées.

De facto, grâce à mon réseau de connaissances, mon mérite scolaire reposerait en vérité sur le mérite de mon héritage familial. Ainsi, ce système contribue à la persistance d’un élitisme républicain. On sélectionne les supposés meilleurs sur des exercices arbitraires (inéquitables) qui favorisent les habitus de la classe dominante comme le relate Pierre Bourdieu dans La Reproduction. Ce dernier affirme en effet que les inégalités sociales sont ainsi transmises de génération en génération. Elles démarrent dans le cadre familial et se répercutent indéniablement au sein du cadre scolaire/universitaire - pour celles et ceux qui auront l’opportunité de poursuivre après le baccalauréat, voire bien avant -. En effet, les concours d’entrée dans les grandes écoles reposent essentiellement sur des épreuves de culture générale ou encore sur des exercices de langues étrangères. Cela profite donc pleinement aux classes les plus favorisées car ces connaissances sont directement liées au milieu social de l’individu. De cette manière, cet « entre-soi » crée un élitisme républicain permettant de remplacer l’oligarchie déjà en vigueur.

   Il devient difficile pour les individus issus des classes moyennes et populaires de connaître une mobilité sociale ascendante du fait de la sélectivité inéquitable des grandes écoles. Les individus doivent donc faire face au système « méritocratique » ainsi qu’au déterminisme social.

Faire face au déterminisme social en tant qu’individu issu des classes moyennes souhaitant entrer dans une grande école devient compliqué mais demeure plausible -bien qu’encore de nos jours, les étudiants issus de classes défavorisées sont en minorité dans ces écoles-. Ces individus qualifiés de « transclasses» sont en réalité des individus qui ont dû fournir plus d’efforts que ceux issus des milieux favorisés, quitte à ressentir une honte vis-à-vis de leur milieu social d’origine.

Tout cela est notable en littérature : des écrivain.e.s tels que Annie Ernaux ou encore Edouard Louis sont qualifiés de « transfuges de classe », qui est un terme plutôt péjoratif pour qualifier la honte ressentie vis-à-vis de leur milieu social d’origine.  

Prenons le cas du jeune Eddy Bellegueule, né dans une commune au nord d’Abbeville, à Halencourt, cet individu, issu de la classe populaire, a connu une mobilité sociale, que l’on peut qualifier « d’ascension sociale ». En effet, bon scolairement, il est parvenu à « monter les échelons » de la société. Il n’y est pas parvenu grâce à son héritage familial mais bien grâce à d’autres facteurs, notamment davantage d’implication dans ses études du fait de son « handicap » de départ mais également de par une rencontre qui lui a permis de connaître cette mobilité, celle du sociologue Didier Eribon, célèbre pour son ouvrage intitulé Retour à Reims, (qui a lui-même connu cette ascension sociale auparavant). De plus, Edouard Louis a dû faire face à l’insécurité linguistique: par honte d’être lui, il a gommé son accent, a changé de style vestimentaire et a dû se coller aux habitus parisiens afin d’être publié notamment. Il a ainsi dû devenir étranger à lui-même.

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