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Les Formes Précapitalistes

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Par   •  24 Janvier 2013  •  4 754 Mots (20 Pages)  •  577 Vues

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V

Volonté (éducation de la)

Ainsi que le fait entendre l'article qui précède, la première condition à remplir pour essayer de tracer un plan d'éducation de la volonté, c'est de renoncer à cette définition classique de la volonté qui en faisait une des trois « facultés de l'âme » au sens étroit et verbal du mot. Ou ce nom de « faculté » n'est qu'une étiquette, un titre collectif donné à toute une série de phénomènes et se bornant à les expliquer comme la« vertu dormitive » explique le fait de dormir ; ou ce terme désignerait l'acte complet et parfait du vouloir porté à sa plus haute puissance, tel qu'il se manifeste par exemple dans des traits de courage, de dévouement ou d'héroïsme.

Ni l'une ni l'autre de ces deux interprétations du mot volonté ne nous paraît répondre à la variété des faits psychologiques qu'il s'agit d'analyser et d'apprécier pour en trouver la loi.

Ce groupe de faits ne se compose pas d'actes tous semblables les uns aux autres, ayant même caractère et même portée. Dès qu'on observe avec soin les diverses formes de l'activité chez l'homme, dans chacune d'elles on distingue des degrés. Ce sont en quelque sorte les étapes de la volonté. Ses premières manifestations méritent à peine d'être appelées volontaires, tant elles sont incertaines, fugitives, capricieuses. D'autres leur succèdent, qui ont plus de fixité, de conscience et de suite, et qui finissent par se fixer parfois jusqu'à prendre l'aspect d'une véritable permanence : l'habitude, à force de répéter les mêmes actes, en a fait un caractère.

Précisons, dans les principales séries de notre activité, les trois phases que l'observation permet de distinguer.

Activité physique. — Il s'agit là surtout des mouvements musculaires. Ils sont de trois sortes : 1° mouvements réflexes ou instinctifs, au début spontanés, presque irrépressibles, désordonnés ; 2° mouvements proprement volontaires, coordonnés et soutenus par la force même qui a conscience de les produire ; 3° mouvements devenus habituels, rapides jusqu'à être presque instantanés, faciles jusqu'à s'accomplir inconsciemment. Ce sont les trois âges de l'action musculaire : appétition, effort, entraînement. Les tâtonnements du début font place à une tension énergique toute concentrée sur le même objet et agissant dans le même sens ; l'effort, à son tour, à mesure qu'il se continue, coûte moins et produit plus jusqu'à devenir inutile ; du moins, on ne le sent plus. Il y a volonté, mais non pas la même forme de volonté, avant l'effort, pendantl'effort, après l'effort.

Activité sensitive. — S'agit-il de sensations ? Même série de trois états : 1° celui de la sensation rudimentaire, fortuite, passive, où sans doute il faut bien un certain consentement de l'organisme, mais n'allant qu'à subir une impression visuelle, auditive, tactile, etc. ; 2° puis la sensation active : regarder, c'est-à-dire faire effort pour voir ; écouter, faire effort pour entendre ; saisir les objets, faire effort pour les toucher, etc. ; 3° enfin accomplissement de tous ces mêmes phénomènes sensoriels avec une prodigieuse rapidité qui devient un jeu : apprendre à manger, à marcher, à courir, à parler, à chanter, etc., c'est apprendre à faire jouer sans effort et pour ainsi dire sans y penser tout le mécanisme des sens dont le moindre mouvement était pour le petit enfant un véritable travail.

S'agit-il des sentiments? Trois degrés encore : le sentiment tel qu'il est chez l'enfant, prompt à éclore, prompt à disparaître, soudaine émotion aussitôt remplacée par une autre, non moins légère, superficielle et instable, mobilité extrême des impressions ; puis avec l'expérience et sous l'empire d'une certaine culture, le sentiment accompagné de conscience, mêlé de réflexion, se surveillant, s'épurant, se fixant, tendant à aimer avec constance ce qui est aimable ; et enfin le sentiment devenu permanent, inhérent à la personne, et lui faisant comme une seconde nature. C'est le même rythme dans le même processus qui va de l'instinct à l'effort et de l'effort à l'habitude.

Activité intellectuelle. — On y distingue plus clairement encore les trois mêmes degrés : l'attention spontanée ou l'intelligence suivant au gré du hasard ou de la fantaisie ce qui l'attire ou ce qui la captive ; puis l'attention réfléchie ou l'intelligence faisant effort pour suivre une marche réglée, ayant un but, un plan, qu'elle s'impose ou qu'on lui impose ; enfin l'attention méthodique, ou l'intelligence si rompue aux lois de la pensée qu'elle les suit comme par une impulsion naturelle et qu'en s'y conformant elle semble obéir à un penchant inné.

Activité morale. — Ici, enfin, tout le monde a remarque de tout temps la même progression, qui va de certains instincts moraux d'abord bien confus, bien faibles et bien vagues, à un effort qui les fixe et, quand il a duré assez longtemps, à un état constant où les actes qui coûtaient le plus se font désormais d'eux-mêmes et comme par un effet insensible à la fois et irrésistible de l'habitude.

La pédagogie doit s'inspirer de ces indications purement schématiques, qu'il appartiendrait à la psychologie de développer.

Si l'on reconnaît, dans tous les ordres de faits que nous venons d'envisager, les trois degrés qui, nous semble-il, y apparaissent, le premier soin de l'éducateur doit être d'en tenir compte et d'y adapter des méthodes appropriées.

Mais d'abord il sera bien entendu que ce n'est pas sa propre volonté qu'il doit exercer, c'est celle de l'élève. C'est toute la différence entre le dressage et l'éducation L'instituteur institue un homme, c'est-à-dire qu'il ne lui donne pas des idées, dès croyances, des règles toutes faites : il le met en état de se les donner lui-même. Penser, sentir et vouloir pour autrui, ce n'est pas le rôle de l'éducateur, du moins s'il est laïque. Il n'a qu'une ambition : s'effacer. Il a horreur de ce qui fit jadis l'orgueil de certains maîtres: façonner ses élèves à son image. Il veut au contraire qu'ils puissent le plus possible se modeler eux-mêmes sur l'idéal qu'il les aura aidés à découvrir et qu'il leur aura fait aimer.

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