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Confréries musulmanes

Commentaire de texte : Confréries musulmanes. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  17 Décembre 2014  •  Commentaire de texte  •  1 261 Mots (6 Pages)  •  741 Vues

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CONFRÉRIES MUSULMANES

Article écrit par Charles-Robert AGERON

Prise de vue

L'Islam ne reconnaît en principe aucun ordre religieux, aucun clergé, aucune hiérarchie spirituelle.

Pourtant le mysticisme musulman ou çoufisme (ou soufisme), d'abord individualiste, devait peu à peu, sous

l'influence du monachisme oriental, et surtout à partir du XIIe siècle, s'organiser en associations admettant

l'autorité d'un maître spirituel, pratiquant une discipline et utilisant un rituel commun.

I-La voie vers Dieu

Ces associations religieuses sont appelées en arabe t'ariqā (pluriel : t'uruq), c'est-à-dire « voie »,

« chemin du voyage vers Dieu », bien que ce mot désigne plus exactement l'ensemble des rites

d'entraînement spirituel proposés par les diverses congrégations. Le mot français « confréries » est employé

par analogie, car les affiliés portent le nom d'ikhwān, vulgairement khouān (« frères »).

Les confréries musulmanes se rapprochent des ordres religieux chrétiens en ce qu'elles reconnaissent un

maître, le chaïkh, des préposés locaux, et qu'elles comportent des novices et des disciples (muroud) reçus

après initiation devant une hiérarchie de témoins et voués à l'obéissance. La plupart des confréries

possèdent aussi des sortes de couvents ou centres de prières (zāwīya encore appelés ribāt, khanqa, tekkiyé)

généralement construits auprès de la tombe d'un saint vénéré dont on vient implorer la bénédiction

(baraka). Quelques-uns abritent une vie monastique (vie commune des frères), mais le célibat est

exceptionnel. On y pratique des exercices liturgiques particuliers, jeûnes, invocations, récitation de litanies

(dhikr). Chaque confrérie utilise ses formules spéciales de dhikr, ses litanies de noms et d'attributs divins, ses

recueils de textes coraniques ou de poésies mystiques.

Toutes les confréries comprennent aussi des affiliés, à la manière des tiers ordres catholiques. Ceux-ci

subissent, tout comme les novices, un rituel d'initiation et sont ensuite tenus à certaines pratiques

collectives : retraites, méditations ascétiques, veillées pieuses et prières accompagnées ou non de musique

et de danse, fêtes annuelles (zerda, moussem), visite au tombeau du fondateur (ziyāra), offrandes et

aumônes pieuses, travaux d'entraide.

Les canonistes musulmans ont constamment lutté contre les confréries, suspectes d'innovations

blâmables ou d'illuminisme. Celles-ci ont toujours affirmé ne pas s'écarter de l'orthodoxie ; leurs maîtres en

mystique ou leurs fondateurs disent se rattacher par une chaîne spirituelle ininterrompue aux compagnons

du Prophète ou à quelques saints de l'islam. Quant à leur rituel et à leur dhikr, ils auraient tous une

justification coranique. En réalité, les généalogies spirituelles ou les références à l'enseignement du Prophète

sont souvent laborieuses, invraisemblables, et elles ne résistent pas à la critique historique. Certains des

exercices surérogatoires des confréries, danses, acrobaties, aidés par l'usage d'excitants (café, haschich,

opium) favorisant les transes mystiques, ont pu facilement dévier de leurs intentions et ont abouti par

exemple aux exhibitions des derwich tourneurs ou hurleurs ou à celles des Aïssaouas de Meknès.

II-Rôle historique des confréries musulmanes

Bien qu'une minorité seulement de musulmans se soient affiliés aux confréries, celles-ci n'en ont pas

moins joué un rôle historique de premier plan. Elles ont fourni des missionnaires pour la conversion des

populations conquises et développé un mysticisme populaire qui a facilité l'adhésion des masses. Elles ont

souvent animé la résistance aux envahisseurs chrétiens et dirigé quelques reconquêtes victorieuses, telle

celle menée au Maghreb au XVIe siècle. Dans certains empires musulmans, elles ont contribué à entretenir

jusqu'à nos jours les particularismes tribaux ou nationaux : ainsi chez les Kurdes, les Albanais, les Berbères.

Par leur extension à l'ensemble du monde islamique et leur centralisation théorique, les confréries ont pu

donner l'illusion d'une force politique redoutable. Toutefois la cohésion entre les diverses branches d'un

même ordre fut toujours très faible, et la dénonciation d'un « péril confrérique » faite par les Européens du

XIXe siècle relève de l'aspect légendaire du panislamisme.

En revanche, dans les pays musulmans où le pouvoir étatique était faible ou nul, le rôle politique des

confréries fut souvent essentiel : ainsi en Cyrénaïque et dans le Maghreb, en Afrique noire et en Indonésie.

Aux époques d'anarchie, elles formaient

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