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Sieyès, "Qu'est-ce que le Tiers Etat?", janvier 1789

Commentaire de texte : Sieyès, "Qu'est-ce que le Tiers Etat?", janvier 1789. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  3 Mars 2018  •  Commentaire de texte  •  1 888 Mots (8 Pages)  •  3 264 Vues

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Introduction :

C’est dans le cahier de doléance d’Aix, rédigé en prévision de la réunion des Etats généraux, qu’il est mentionné que « La noblesse jouit de tout, possède tout, et voudrait s’affranchir de tout ; et cependant si la noblesse commande les armées, c’est le Tiers état qui les compose ; si la noblesse verse une goutte de sang, le tiers état en répand des ruisseaux. La noblesse vide le trésor royal, le Tiers état le remplit ; enfin le Tiers état paie tout et ne jouit de rien. »

C’est cette idée directrice que l’on retrouve dans Qu’est ce que le tiers Etat ?, un pamphlet prononcé par Emmanuel Siéyès en prélude à la convocation des Etats généraux, avec pour but la remise en cause de l’ordre établi.

  Siéyès est ordonné prêtre en 1772, à l’âge de 24 ans. Rapidement, il s’insurge contre la société d’ordres constituée de privilèges qui ne sont selon lui réservés qu’à la noblesse. Il assiste à l’ensemble des évènements de la Révolution et participe à la rédaction de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, de même qu’il joue un rôle important au Directoire. Par la suite, il favorisera le coup d’état de Napoléon en 1799.

  C’est en 1789 que Siéyès publie le pamphlet, écrit au ton polémique, « Qu’est ce que le tiers état ?» avec pour ligne directrice « Qu’est ce que le tiers état ? Tout. Qu’a-t-il été jusqu’à présent dans l’ordre politique ? Rien. Que demande-t-il ? A y devenir quelque chose. ». Cet écrit de 127 pages, en plus de constituer un appel à la lutte et à l’indignation, annonce la Révolution à venir et expose les moyens à mettre en oeuvre dans la lutte révolutionnaire.

  En 1789, il y a ainsi en France 26 millions d’habitants, partagés en différentes classes sociales. La noblesse compte 400000 personnes, le clergé 120000, et le tiers état le reste des habitants, soit 98% de la population du pays. Les privilégiés ne représentent donc pas plus de 2% de la population française, mais détiennent pourtant tous les pouvoirs.

  La noblesse ne paye que peu d’impôts, elle est dispensée de la taille, l’impôt le plus lourd en ce qu’il prélève 53% du revenu, taux qui peut connaître une augmentation en période de crise. Le clergé ne paye quant à lui pas d’impôt ; au contraire, des impôts tels que la gabelle et la dime sont prélevés en sa faveur. Face aux crises économiques de 1787-1788, Calonne, le contrôleur général des finances, avait proposé à Louis XVI de lever un nouvel impôt, la subvention territoriale. Il s’agissait d’un impôt unique qui se serait substitué à toutes les taxes et aurait pesé sur les propriétaire de tous ordres et non plus seulement ceux du tiers Etat, rétablissant une certaine égalité. Le Parlement de Paris s’est fermement opposé à l’instauration de cet impôt et a refusé d’enregistrer la loi en vertu des droits de remontrance et d’enregistrement qu’il peut invoquer lorsqu’il estime qu’un édit royal est contraire aux intérêts du peuple ou aux lois fondamentales du royaume, ce qu’il rappelle dans un arrêt du 3 mai 1788. Ces évènements témoignent de la volonté des parlementaires - principalement issus de la noblesse de robe - de conserver leurs privilèges.

  Face à la perspective de la convocation des Etats Généraux, et notamment de la réunion prévue par Necker pour les organiser le 1er mai 1789, le tiers Etat souhaiterait voir les injustices de l’Ancien Régime atténuées, tendre vers une société plus égalitaire en termes d’impôts et asseoir sa légitimité politique.

  C’est dans ce contexte de convocation des EG et parallèlement aux doléances invoquées par les trois ordres, que Siéyès évoque quant à lui un enjeu primordial comporté par ces derniers pour le tiers état : quelle serait la représentation du Tiers dans la nouvelle assemblée et quel rôle y jouerait-il ?

  Les intérêts de ce texte sont ainsi multiples en ce qu’il nous pousse à nous interroger sur la place du tiers état au sein de la société d’ordres de l’ancien régime, en cela sur l’importance du peuple au sein du royaume, mais aussi sur la portée contestataire de ce pamphlet, et le rôle qu’il a pu jouer dans un contexte de réunion des états généraux, puis de Révolution Française.

  Dans quelle mesure peut-on dire que Siéyès en appelle, à travers ce pamphlet, à la lutte des classes ?

Siéyès dénonce une société d’ordres injuste (I) avant d’en appeler à une lutte en faveur de l’égalité de ces ordres (II).

I - La dénonciation d’une société d’ordres injuste

Siéyès présente le tiers état comme une classe aliénée, mais le pilier de la nation (A), et le clergé et la noblesse comme des ordres privilégiés inutiles à la société (B).


A - Le tiers état, une classe aliénée mais le pilier de la nation

Siéyès présente le tiers état, constitutif de 98% de la population française en 1789, comme étant « l’ensemble des citoyens appartenant à l’ordre commun », il l’identifie ainsi à la nation, ensemble d’individus libres, doués de raison et soucieux de la chose publique. Pour Siéyès, la mission du tiers état émane du peuple, là où la noblesse ne défend que son intérêt particulier et non l’intérêt commun. Cet ordre est en cela la seule classe réellement utile au royaume. L’utilité sociale du tiers état est indispensable : il se charge les travaux agricoles, industriels et commerciaux, Siéyès dit en sens qu’il s’acquitte de « tout ce qu'il y a de pénible dans ce service », mais aussi que « rien ne peut aller sans lui ».

Ce contre quoi Siéyès s’insurge, c’est le paradoxe qui fait que malgré que le tiers état soit le seul ordre véritablement utile à la nation, on ne peut répondre que « rien » à la question « qu’est ce que le tiers état a été jusqu’à présent ?». En effet, le Tiers état n’a pas eu, jusqu’à 1789, de véritables représentants aux Etats généraux et les votes étaient pris par ordres, non seulement en matière d’impôts mais en tous sujets, l’empêchant, malgré le poids démographique de son ordre, de faire asseoir sa voix. Ses droits politiques sont donc inexistants malgré son importance sociale, Siéyès dit ainsi que « ses droits politiques sont nuls ».

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