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Les démembrements de la propriété

TD : Les démembrements de la propriété. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  31 Octobre 2022  •  TD  •  8 545 Mots (35 Pages)  •  193 Vues

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TRAVAUX DIRIGES – 1ère année de Licence en droit DROIT CIVIL – 2nd semestre

Cour de Monsieur le Professeur Laurent Leveneur

Vingtième séance

Thème : Les démembrements de la propriété

Correction

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FICHES D’ARRET

I - USUFRUIT

Document 1 : Civ. 1re, 12 novembre 1998, Bull. civ. I, n° 315 ; D. 1999, jurisp. P. 167, note L. Aynès ; RTD civ. 1999, p. 422, obs. F. Zenati

 Le litige prend place dans le cadre d’une succession, ouverte en 1959, et porte sur un portefeuille de valeurs mobilières. L’épouse du défunt est usufruitière des biens transmis tandis que les héritiers en ont la nue-propriété. Une héritière, en tant que nue-propriétaire indivise, demande le partage de la nue-propriété et, à cette fin, exige que l’usufruitière fournisse des informations sur le portefeuille de valeurs mobilières.

Un premier jugement, rendu le 12 octobre 1988, a ordonné la liquidation et le partage de la succession ; il a été suivi par un deuxième jugement du 26 février 1990 qui ordonne une expertise afin de déterminer la valeur des titres compris dans la succession. L’usufruitière résiste et les juges du fond la somme de fournir les informations nécessaires à l’expertise, notamment tous les mouvements ordonnés sur ce portefeuille depuis l’ouverture de la succession, injonction prononcée sous astreinte. Un troisième jugement du 19 janvier 1995 ordonne une nouvelle expertise et condamne l’usufruitière à régler le montant de l’astreinte. Cette dernière conteste en appel le versement des astreintes et les diverses injonctions à communiquer des informations concernant la gestion du portefeuille de valeurs mobilières. L’arrêt rendu par la Cour d’appel accueille ses demandes et infirme les jugements la condamnant à payer certains montants au titre des astreintes et la conforte dans son refus de communiquer à l’héritière les informations portant sur la gestion du portefeuille de valeurs mobilières. La Cour d’appel considère que l’article 587 du code civil ne s’applique pas au portefeuille de valeurs mobilières, ce dernier constituant une universalité, c’est-à-dire un contenant juridique distinct de son contenu, qui appartiendrait à celui que le détient. Par conséquent, ce ne serait qu’à l’extinction de son droit d’usufruit que la veuve aurait à rendre compte la gestion de cette universalité, pour que l’intégrité de l’universalité soit vérifiée par le nu-propriétaire. L’héritière nue-propriétaire indivise forme alors un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation était d’abord invitée à répondre à la question suivante : un portefeuille de valeurs mobilières constitue-t-il une universalité, de sorte que l’usufruitière de ce portefeuille pourrait aliéner les titres composant cette universalité sans avoir à rendre compte au nu-propriétaire avant l’extinction de son droit réel démembré ?

Répondant par l’affirmative, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel. Elle considère que la nue-propriétaire indivise était parfaitement fondée à exiger ces informations portant sur la consistance et la valeur de ce portefeuille de la part de l’usufruitière afin de permettre le partage successoral ; au surplus, si le portefeuille de valeurs mobilières constitue bien une universalité dont les éléments ne sont pas consomptibles et que l’usufruitière peut gérer, ce qui inclut l’aliénation des éléments de l’universalité dès lors qu’ils peuvent être remplacés, cette dernière doit tout de même en conserver la substance.

NB : L’arrêt invitait aussi à déterminer la date à compter de laquelle courraient les intérêts sur les sommes que devait restituer l’usufruitière à la nue-propriétaire. Se fondant sur l’ancien article 1153, alinéa 3, du code civil, la Cour de cassation indique que l’intérêt au taux légal ne court qu’à compter de la notification de la décision de justice ouvrant droit à restitution des sommes sur lesquelles porte l’intérêt, cette notification valant mise en demeure.

Observations :

Deux apports principaux peuvent être dégagés de cet arrêt.

Tout d’abord, celui-ci consacre la qualification d’universalité du portefeuille de valeurs mobilières. C’est donc l’idée qu’un portefeuille de valeurs mobilières est un bien unique soumis à un régime différent de la masse des biens qui le composent qui se voit affirmer avec force par la Cour suprême et, conséquence logique, que le droit de l’usufruitier ne porte pas sur chaque titre individuellement, mais sur l’universalité en tant que bien. Cette première étape de qualification a un intérêt pratique évident, et c’est le second apport de cet arrêt.

En considérant que le portefeuille de valeurs mobilières est une universalité, la Cour de cassation reconnait à l’usufruitière le droit de gérer, d’administrer ce bien unique, ce qui signifie qu’elle peut aliéner les biens qui le composent. Bien sûr, une telle aliénation ne peut se faire qu’à charge de remploi, c’est-à-dire que l’usufruitier doit s’assurer de remplacer les titres aliénés par des valeurs équivalentes, car ce dernier n’est qu’un détenteur précaire, son droit réel a vocation à s’éteindre tandis que celui du nu-propriétaire est voué à la perpétuité – c’est sur la tête de ce dernier que le droit réel complet se reformera.

En conclusion, si la Cour de cassation approuve la qualification d’universalité adoptée par la Cour d’appel, elle en tire de plus justes conséquences concernant son régime : en octroyant les prérogatives d’un propriétaire à l’usufruitière qui n’aurait de comptes à rendre qu’à l’extinction de son droit, la Cour d’appel s’est fourvoyée. La Cour suprême parvient alors à concilier deux propositions antinomiques : l’usufruitier, qui doit conserver l’universalité, peut disposer des titres qui la composent – à charge de les remplacer au moins en valeur et de communiquer au nu-propriétaire les informations relatives à la gestion du portefeuille.

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