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Commentaire d'arrêt : Cour de Cassation, Chambre commerciale, 22 octobre 2002, 00-18.048

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Par   •  28 Janvier 2018  •  Commentaire d'arrêt  •  3 010 Mots (13 Pages)  •  1 476 Vues

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Le droit de la concurrence vise à maintenir la libre compétition économique sur le marché français et empêcher que ce marché devienne la propriété des cartels. Les ententes, accords formalisés ou tacites entre concurrents ou partenaires commerciaux afin de contrôler le marché font partie des pratiques anticoncurrentielles sanctionné par le droit de la concurrence. Ce contrôle des entente fait aujourd'hui appel à la théorie du seuil de sensibilité.

Cette théorie développée en premier lieu par la jurisprudence européenne a été introduite progressivement en droit interne après de premières réticences du Conseil de la concurrence et de la Cour d'appel de Paris. C'est une théorie qui peut avoir toute son importance car elle permet de déterminer si les effets d'une pratique sont assez sensibles pour que cette pratique soit caractérisée comme une pratique anticoncurrentielle méritant sanction. Le droit de la concurrence étant d'abord un système de normes visant à réguler le marché unique de l'Union européenne, le seuil de sensibilité s'entendait comme une affectation du commerce entre états membres. En droit interne, le seuil de sensibilité est constitué par une atteinte sur un marché interne. Le législateur avait, dans une loi sur les Nouvelles Régulations Économiques (Loi NRE) du 15 mai 2001 modifié le droit de la concurrence dans le but de renforcer l'efficacité de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles, notamment par l'introduction des procédures de clémence et de transaction et par le relèvement du plafond de sanction. Cette loi ayant pour objectif de s'attaquer aux effets de la mondialisation dans la vie économique française ne faisait pas référence au seuil de sensibilité, question abordée dans l'arrêt pris par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 22 octobre 2002,.

Dans cette affaire, un salon de l'assurance dénommé « Assure Expo » était organisée chaque année depuis 1985 par la société Vidal. Cette société cherchait à mettre en relation par l'intermédiaire d'un salon des professionnels du secteur de l'assurance et le grand public. La fédération française des sociétés d'assurance (FFSA), un syndicat professionnel constitué d'entreprises et d'organismes d’assurances et de réassurance s’adressa à ses adhérents dans un courrier du 8 mars 1991 et leur conseilla de ne pas participer au salon. Le salon s'avéra être un échec et la société Vidal saisit le Conseil de la concurrence d'une demande de mesures conservatoires. Le Conseil de la concurrence, par une décision du 6 octobre 1992, enjoint à la FFSA d'adresser une nouvelle missive annulant expressément les termes du courrier précédent. Cette nouvelle consigne n'empêcha pas l'annulation du salon suivant en raison du faible nombre d'inscrits – les participants de l'année précédentes se rappelaient du précédent échec. Le Conseil de la concurrence statua au fond dans une décision du 9 novembre 1999 et reconnu que si le comportement de la FFSA avait été à l'origine de la désaffection pour le salon et contribué à sa disparition, l'effet anticoncurrentiel provoqué ne procédait pas d'une intention délibérée de la FFSA et le marché de l'assurance n'avait pas été atteint sensiblement. La Cour d'appel de Paris rejeta l'appel contre cette décision dans un arrêt du 27 juin 2000 contre lequel la société Vidal forma un pourvoi.

La requérante soutenait que la FFSA avait appelé au boycottage du salon et que cette pratique avait eu un pour effet de l'évincer du marché des intermédiaires de l'assurance. En effet, elle assurait que l'atteinte à la concurrence était sensible sur le marché du salon de l'assurance, mettant en avant son activité d'intermédiation entre le grand public et les professionnels du secteur.

Les questions soulevées par cette affaire tenaient à la qualification des pratiques litigieuses et à la définition du boycott, mais aussi à la mesure de l'effet anticoncurrentiel des pratiques.

Malgré la présence d'éléments matériels constitutifs du boycott (I) la société Vidal se trouve déboutée. Pour rejeter son pourvoi , la Cour de cassation affine la définition juridique du boycott et fait référence à la théorie du seuil de sensibilité pour juger de l'effet anticoncurrentiel des pratiques incriminées (II).

I) Les éléments matériels en l'espèce, insuffisants pour caractériser la pratique de boycott

La FFSA a effectivement enjoint ses adhérents à ne pas participer au salon (A), une pratique dénoncée par la requérante qui affirme qu'il s'agit d'un boycott. La société Vidal soutient que cette prise de position a eu pour effet de l'évincer du marché des intermédiaires de l'assurance (B).

A – L'incitation à la non participation, suffisante à qualifier la pratique considérée de boycott ?

En l'espèce, la FFSA a incité sous forme de courriers adressé à ses adhérents visant à les inciter à ne pas participer au salon. Cette pratique est susceptible d'enter dans le champ d'application de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence devenu l'article L 420-1 du code de Commerce. Selon le deuxième moyen soulevé par la requérante, la représentativité de la FFSA est un facteur aggravant : « le mot d'ordre adressé par un organisme professionnel, fortement représentatif dans le secteur de l'assurance » suffit, selon elle, à constituer une pratique de boycottage, et cette pratique est anticoncurrentielle et prohibée. La société Vidal insiste sur le fait que la FFSA est représentative et influente au sein du secteur des assurances et que ces consignes ont donc eu un impact important sur les professionnels censés se rendre au salon.

Ce moyen est à mettre en parallèle avec le raisonnement opéré par les autorités régulatrices de la concurrence pour sanctionner des pratiques anticoncurrentielles : elles procèdent en premier lieu à une mesure du poids économique ou pouvoir de marché de l'opérateur concerné sur le marché en cause. Ainsi, la société Vidal cherche à mettre en évidence le pouvoir d'influence et son autorité de la FFSA sur le marché. Non seulement la FFSA est un opérateur lourd sur le marché délimité par la société Vidal, mais son autorité et sa crédibilité vis-à-vis des adhérents prouve le lien de causalité

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