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Le Travail Permet Il A L'homme De S'accomplir ?

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Par   •  23 Février 2014  •  1 935 Mots (8 Pages)  •  12 373 Vues

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Dans le langage courant, le terme travail désigne un grand nombre d'activités sociales : l'ouvrier et le cadre travaillent, mais aussi la femme au foyer, l'élève à l'école. Malgré une certaine confusion, il semble qu'ils se consacrent tous à une activité socialement utile ou rentable. Travailler c'est donc agir en vue de l'utilité et plus fondamentalement le travail est nécessaire à la vie. En effet, si je travaille, c'est que j'en ai besoin pour vire, ce besoin est indéfiniment renouvelé car j'aurai toujours à nouveau faim ou soif et donc à faire un effort pour me satisfaire. La pénibilité indéfinie, l'attachement au corps et à la vie la nécessité définissent donc le travail. Pourtant, par son intermédiaire, je transforme mon monde : mon rapport à la nature, à moi-même et aux autres. Cette transformation est-elle un accomplissement pour l'homme ou le rend-elle du moins possible ? Faut-il penser qu'il y a là une dénaturation de l'humanité ? Si le travail est la marque de la nature en l'homme, il développe néanmoins des rapports proprement humains avec elle. Ceci n'exclut pourtant pas que l'homme peut se perdre dans le travail et les obligations qu'il implique.

Travailler, c'est d'abord réponde à une nécessité naturelle, celle de satisfaire, au moins dans un premier temps, nos besoins. Le travail est donc fondamentalement la marque de la nature sur l'homme. Il semblerait de ce fait qu'il nous lie à la réalité biologique du corps avec ses mécanismes qu'il faut sans cesse entretenir plutôt qu'à des qualités spécifiquement humaines qui distinguent l'humain des autres êtres. Ainsi, Hannah Arendt dans Condition de l'homme moderne associe le travail au cycle biologique de production et de consommation, alors même que dans la société moderne, on a largement dépassé la question de la satisfaction des besoins primaires. Même si nous travaillons pour le confort, le bien-être, le loisir, tous ces objets sont rapidement consommables et nous devrons renouveler notre effort pour les obtenir à nouveau, et ils ne donnent que des jouissances biologiques au fond.

Cette nécessite s'accompagne, on le devine déjà, à la pénibilité du travail : pour nous satisfaire, nous devons transformer une nature aride, hostile, inculte qui ne nous prodigue pas spontanément ses bienfaits. En ce sens, si le travail est nécessaire, nous souhaiterions souvent nous en passer parce qu'il fatigue le corps et l'esprit. La tradition biblique fait d'ailleurs du travail une punition, une malédiction : en effet, dans la Genèse, Dieu chasse Adam et Ève du Jardin d’Éden après le péché originel et condamne Adam au travail pénible : «Tu travailleras à la sueur de ton front.». La nature est désormais inculte et l'homme devra se fatiguer pour en tirer des fruits. Les catholiques voient d'ailleurs la peine du travail comme un moyen de se rapprocher de Dieu qui a souffert comme un homme sur la croix.

La dignité humaine semble plutôt mise à mal par la nécessité de travailler puisqu'elle rapproche l'homme de sa part animale qui l'attache à la nature alors qu'il voudrait pouvoir s'en libérer. En ce sens, l'accomplissement de l'humanité serait à rechercher dans des qualités qui nous distinguent et nous élèvent au-delà de notre condition naturelle donnée spontanément et que nous n'avons qu'à laisser s'épanouir. Non que cet épanouissement n'offre pas des satisfactions (le bien-être du corps est loin d'être négligeable), lais il confine l'humanité bien au-delà de l'idéal qu'elle peut se prescrire. Ainsi, pour Aristote, dans l’Éthique à Nicomaque, ce sont les vertus intellective et délibératives (qui concernent l'esprit dans les deux cas, mais plutôt la contemplation gratuite dans le premier et la politique dans le second) qui font la dignité de l'homme. Le travail est ce dont il faut se libérer, et c'est pourquoi «il faut des esclaves» selon lui.

Cette analyse du travail, par son attachement à la nature, si elle est juste, ne laisse pas d'être réductible : en effet, le travail, en nous confrontant à la nature et à la matière, nous émancipe aussi de notre condition strictement biologique.

En effet, il est indéniable que c'est bien la pression naturelle sur l'organisme qui incite à produire. Néanmoins, l'activité du travailleur est proprement humaine, et on peut même penser qu'elle fait émerger des qualités qui nous définissent. Travailler, c'est produire en vue d'une fin, savoir se donner des buts, développer des stratégies et des détours, inventer des instruments, faire un effort sur soi-même pour contrer la paresse. Toutes ces caractéristiques sont celle d'un esprit qui ne peut que se confronter à la matière. La dignité humaine se saurait être une négation de sa condition ; et on peut penser qu'un esprit purement contemplatif refuse l'action. Ainsi, Karl Marx, dans le Capital, distingue les productions humaines des productions animales non pas par leur habilité ou la perfection de la réalisation, mais par la présence de l'esprit dans le travail : « ce qui distingue dès l'abord le plus mauvais architecte de l'abeille la plus experte, c'est qu'il a construit la cellule dans sa tête avant de la construire dans la ruche ». De ce fait, la pénibilité et la nécessité sont certes le signe de la confrontation à la matière mais aussi d'une réponse intelligente et d'un effort de la volonté.

Si le travail est ce qui fait de nous des hommes, alors il nous procure aussi une certaine estime de nous-mêmes : achever son travail, c'est avoir accompli par soi-même un ouvrage dont on peut rendre raison, dont on est responsable et dont on peut être fier. Or, l'accomplissement de soi doit bien procurer ce type de satisfaction puisque l'on réalise un objectif nouveau dont nous sommes nous-mêmes l'origine et qui donc nous construit en même temps qu'est construit l'ouvrage. On est assez loin de la simple satisfaction biologique d'avoir consommé, comblé un besoin qui

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