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La culture permet-elle d’échapper à la barbarie

Étude de cas : La culture permet-elle d’échapper à la barbarie. Recherche parmi 298 000+ dissertations

Par   •  13 Avril 2015  •  Étude de cas  •  2 040 Mots (9 Pages)  •  1 105 Vues

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La culture permet-elle d’échapper à la barbarie ?

Introduction : ²

Dans son roman à succès, les Bienveillantes, Jonahtan Littell met en scène un officier nazi cultivé, et nous savions déjà que de la musique classique fut jouée dans les camps de la mort. Vercors, dans le silence de la mer, présente également un officier allemand, pétri de littérature français, qui essaye de se faire accepter par une famille contrainte de l’accueillir. Ces exemples sont choquants. Il semble indéniable que la connaissance et le goût pour de très hautes œuvres de l’esprit n’empêche nullement de se conduire de façon violente, voire atroce. Il est alors envisageable de répondre immédiatement que la culture ne permet pas d’échapper à la barbarie, et même qu’elle la provoque en suscitant des haines entre les nations. (Pire encore, la culture, dans certains cas, perfectionne, aiguillonne et raffine de plus en plus la barbarie pour la rend plus atroce). Cette réalité demande, néanmoins à être analysée. S’il ne faut pas surévaluer le pouvoir de la culture, il reste nécessaire de préciser ses relations à la barbarie, en commençant par étudier le sens de ses termes. Ils apparaissent immédiatement comme des opposés. N’est-ce pas le signe d’une liaison interne qui demande des éclaircissements ? Si la culture se définit contre la barbarie, mais à partir d’elle, peut-elle échapper à ce dont elle provient ?

1. Les raisons d’une opposition

A- Barbarie et culture.

Par définition, culture et barbarie sont des termes opposés. Barbarie désigne tout d’abord un état de grossièreté. On appelle « barbares » des meurs rudes, des manières brutales d’obtenir ce que l’on désire. Cette rudesse témoigne d’un manque général de jugement. Un homme cultivé est capable d’apprécier la diversité des situations et d’y trouver la réponse appropriée. Par exemple, il fait preuve de tact dans ses relations avec les autres. Il les traite avec ménagement, en employant les tournures requises. Ses paroles sont adaptées aux circonstances et à la nature de son interlocuteur. La barbarie se caractérise donc par l’absence totale de manières dans le rapport à autrui. Est barbare celui qui satisfait immédiatement son désir sans se soucier des sentiments ou des réactions des autres. Il ne met pas les formes requises par l’obligation de respecter ses semblables. La culture, à l’inverse, implique une éducation. Les désirs sont disciplinés et soumis à des règles, autant de médiations entre notre envie et sa réalisation.

B- L’humanisation de l’homme

Cette perspective fait apparaitre la dimension humaniste de la culture. Il ne s’agit pas seulement d’avoir des connaissances, mais de marquer un souci d’autrui. La culture est donc une façon de civiliser les hommes afin de permettre une vie sociale plus conforme à leur qualité d’êtres de raison et de dialogue. Dans son étude, la Civilisation des mœurs, Nobert Elias a montré comment les cours occidentales se sont employées à polir les manières des élites sociales et politiques. Les manières de tables, les manières de s’adresser aux femmes, le soin à apporter à l’éducation des enfants, tout fut progressivement codifié dans le but d’élever les conduites vers un idéal conforme à la représentation de l’homme comme un être de raison et de liberté. Cette humanisation donne un rôle important à la politesse et à l’instruction. La première a pour but de permettre le développement de relations sociales harmonieuses, puisque l’homme est fait pour vivre en société. La seconde libère l’esprit de sa grossièreté en lui donnant la capacité d’envisager un sujet sur une diversité de points de vue. L’homme frustré est borné. Il ne sait pas voir la complexité du réel, il s’avère incapable de se mettre à la place d’autrui. La brutalité de ses manières et de son ton montre qu’il reste prisonnier de son étroitesse d’esprit. La personne cultivée, au contraire, a un jugement affiné par la formation qu’elle a reçue. Cependant, les bienfaits faits sociaux de la culture n’empêchent pas cependant des interrogations à son sujet. Quelle est la portée exacte de cette éducation ? Est-elle aussi bienfaisante qu’elle l’affirme ?

2- La valeur de la culture en procès

A- Relativisation de la culture

Il est important de constater que la promotion de la culture comme éducation s’accompagne d’une réserve, ou même d’une remise en cause violente de ses vertus. Kant affirme dans ses Propos pédagogiques, que l’homme ne devient homme que par l’éducation. Mais il introduit une différence entre civilisation et morale, qui nous laisse penser qu’être civilisé ne suffit pas. Sa réflexion sur l’histoire le confirme : « Nous sommes cultivés au plus haut degré par l’art et par la science. Nous sommes civilisés, jusqu’à en être accablés, par la politesse et les bienséances sociales de toute sorte. Mais nous sommes encore loin de pouvoir nous tenir pour moralisés » (Idée d’une histoire universelle du point de vue cosmopolitique, proposition 7). Kant annonce une apparence de moralité qui consiste à respecter les codes sociaux en usage tout en ne respectant pas ses semblables et en essayant de les utiliser comme de simples moyens pour satisfaire nos intérêts. Il est possible d’être cultivé sans être moral, c’est-à-dire sans avoir le souci de choisir pour nos actions des maximes qui pourraient être une loi universelle. Kant distingue donc le fait d’être instruit, et le fait de posséder ce qu’il nomme une « bonne volonté ». La politesse, le goût, l’acquisition de connaissances en sciences, en art, en philosophie, ne mettent pas l’homme à l’abri de l’immoralité.

B- Le naufrage de la culture européenne

La justesse de cette idée a souvent trouvé à se vérifier. Freud en fait le constat amer au sortir de la Première Guerre Mondiale. Ses considérations actuelles sur la guerre et sur la mort présente le conflit de 14-18 comme un phénomène qui blesse profondément la représentation que les Européens avaient d’eux-mêmes. La barbarie en fut la règle. Les nations apparurent animées par une rage aveugle et une soif de destruction inédite. Mensonge, cynisme, indifférence à la vie humaine atteignirent des niveaux insoupçonnés. Freud souligne que la barbarie ne s’exerça pas seulement dans les relations entre belligérants,

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