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L’homme est comme maitre et possesseur de la nature

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Par   •  12 Mars 2018  •  Dissertation  •  7 123 Mots (29 Pages)  •  1 435 Vues

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L’idée de progrès appliquée à la nature humaine

Introduction

Commençons tout d’abord par une définition du mot progrès ? Etymologiquement, ce nom vient du latin pro, c’est-à-dire « devant, de l’avant » et gressus, qui est le participe passé du verbe en latin gradior, qui signifie « avancer ». Le progrès désigne ainsi l’action d’aller de l’avant, dans l’espace et le temps, avec une acception positive d’amélioration, c’est-à-dire d’« avancée vers le mieux ». Mais le progrès est-il toujours associé au principe de l’évolution positive ?

Nous essayerons de répondre à cette question en nous intéressant tout d’abord à l’idée du progrès de l’homme comme

  1. L’idée d’un progrès humain :

On peut être tenté par une première question, assez simple et pourtant si complexe : l’homme progresse-t-il ? Si l’on s’inscrit dans une logique eschatologique, qui est la conception du devenir dans la religion chrétienne et musulmane où, à la fin des temps, après l’apocalypse, Dieu jugera les hommes, on peut en effet dire que l’homme progresse dans le sens où il « va de l’avant » vers ce moment ultime, cette fin des fins, au-delà de laquelle s’ouvre un temps éternel. Mais en dehors de cette croyance, n’y a-t-il pas une autre représentation du progrès autre que celle associée au principe de l’eschatologie chrétienne ou musulmane ?

  1. L’homme progresserait-il par « nature » ou par « culture » ?

Les anciens déniaient à la nature toute aptitude au changement profond ; ils l’associaient à un mécanisme cyclique ; attentifs au rythme des saisons, ils considéraient que chaque année ramenait le retour du même. Claude Levi Strauss et Lucien Levy-Bruhl ont décrit la « mentalité primitive ». Ils expliquent que certaines sociétés primitives perçoivent un « temps du mythe » qui est en opposition avec l’idée linéaire du temps. En effet, ces tribus considèrent que le temps du mythe est sacré, ce qui leur inspire crainte et respect. Ils n’ont par conséquent aucune envie « d’avancer dans la vie » au risque de s’éloigner du temps mythique qui leur apparaît comme parfait. En reproduisant régulièrement des rituels millénaires, ils ont l’impression de renouer avec leurs ancêtres qui accomplissaient déjà les mêmes gestes, de rentrer dans quelque chose qui les dépasse, de transcendant, de participer à la bonne marche du monde. C’est cette notion que Myrcea Eliade nomme « Le mythe de l’éternel retour » et qui implique que les membres de ces tribus vivent dans le présent plutôt que d’espérer sans cesse l’avenir.

Les Sumériens et les Egyptiens ont multiplié à ce propos les représentations mythiques du passage du chaos originel à l’organisation cosmique. Les hommes sont en charge de ne pas rompre l’équilibre des forces naturelles décidées par les dieux, et se doivent aussi d’éviter la ruine de l’espace cosmique organisé par les dieux à leur intention. Aussi bien chez les Sumériens (qui croyaient en la menace du déluge qui permet de faire disparaître l’ancien monde par la volonté d’un être divin courroucé) que chez les Grecs par exemple, pour qui la faute ultime (l’Ubris) consiste à outrepasser les limites du pouvoir accordé aux hommes par des dieux jaloux de leur prééminence et leur force.

Mais l’état de nature est un stade primitif à dépasser. C’est sans doute quand ils ont commencé à prendre acte de leur pouvoir et de leur capacité à changer le monde, par le recours à la technique, que les hommes se sont inscrits dans une logique évolutive (ou transformative) de la nature. L’acte symbolique d’une telle échappée au règne de la nature vers celui de la culture est celui accompli par Prométhée, le dérobeur du feu divin, grâce à qui l’humanité (selon le mythe) a hérité de l’ingéniosité et de la technicité nécessaires à sa survie dans un monde dominé par la puissance animale. L’état de nature est donc un stade primitif à dépasser. Une assez bonne représentation nous en est donnée dans l’Odyssée d’Homère, qui raconte l’opposition entre Ulysse (héros rusé, doté de savoir et industrieux) et Polyphème (le cyclope, inculte et inhumain). Fils de Poséidon, dieu des mers et donc de forces naturelles redoutables, primitives, Polyphème échappe à la loi, à l’organisation cosmique du monde comme à toute norme destinée à régler les sociétés humaines pour les arracher à la barbarie. En outre, les cyclopes ne transforment pas la nature car ils ignorent l’agriculture. Ils n’ont aucune organisation, ni politique ni sociale. Ils ne sont pas religieux car ils n’ont aucun sens de l’hospitalité et considèrent avec cruauté les suppliants.

Néanmoins, malgré la ruse triomphale d’Ulysse (qui n’a d’égale que sa maîtrise technique), ce dernier ne peut échapper à une sorte de mouvement circulaire, ses aventures se répétant à l’infini et se reflétant les unes dans les autres, son Odyssée ressemblant à un éternel recommencement. C’est là sans doute son châtiment, lui qui a commis une faute originelle en faisant triompher les siens grâce à une ruse (le cheval de Troie), moyen peu honorable pour les Grecs et abhorré par les dieux.

Les hommes doivent nécessairement se développer par leur culture, mais ils ne peuvent le faire sans respecter la nature, comme c’était le cas dans l’antiquité. Les hommes doivent autrement dit faire un usage prudent de la technique et ne pas mettre en péril les équilibres cosmiques en franchissant les limites les séparant des dieux.

L’homme est ainsi capable de se réaliser dans le temps. Dans le Protagoras, Platon reprend le thème prométhéen et fait de l’homme un « animal sans qualité », non déterminé par un facteur biologique précis comme les animaux et, donc, susceptible de se développer en transformant la nature mais aussi lui-même. Cette faculté s’appelle dunamein, qui désigne cette potentialité de l’être qu’a l’homme de transformer la nature, donc sa nature.

Il ne faut pas oublier que le temps détruit l’être, et que la nature humaine progresse vers sa fin. Aristote est le premier à mener une vaste enquête (historia) sur la nature (physis) Il reprend ce faisant lui aussi le mythe de Prométhée, et distingue la technique de la nature, qui possède en elle-même le principe « de mouvement et de repos ». Les êtres ont donc une nature qu’ils doivent développer dans le respect des lois de la nature : sa vision du monde relève, elle aussi, d’un principe d’ordre. Cependant, il conçoit le temps comme un facteur de dégradation qui corrompt la substance et la détruit. Son irréversibilité caractérise la condition humaine mais aussi toute la nature : « C’est dans le temps que tout est engendré et détruit… » (Physique, Aristote). A l’inverse, les dieux sont immortels, parfaits, et ne sont pas soumis au changement : ils évoluent dans l’éther, un milieu qui s’identifie alors au cosmos. Cette représentation dualiste, hiérarchisée du cosmos inspire la vision du monde chrétienne pour qui l’homme, créature pécheresse, ne saurait progresser qu’en Dieu. Le siècle des Lumières remettra en cause cette conception religieuse en libérant l’homme de l’emprise des dieux.

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