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Étude de l'oeuvre de Jean Rousset, Leurs Yeux se rencontrèrent : La scène de première vue

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Par   •  16 Février 2015  •  1 349 Mots (6 Pages)  •  8 393 Vues

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Leurs Yeux se rencontrèrent : La scène de première vue dans le roman

Jean Rousset

La scène de rencontre est une scène clé à laquelle se suspend la chaîne narrative. La scène de rencontre est partout. Une tradition tenace la répète depuis deux millénaires. Elle appartient de droit au code romanesque avec ses cérémoniales et ses protocoles.

Elle met en scène une situation fondamentale : le face à face qui joint les héros en couple principale, la mise en présence de ceux qui se voient pour la première fois. Elle déclenche un engrenage de conséquences proches et lointaines : autre rencontre, séparations et retours, quête ou attente, pertes momentanées ou définitives.

Elle pose un commencement et détermine des choix qui retentiront sur l’avenir du récit et sur celui des personnages. Ceux-ci la subissent comme un ouragan ou une rupture, comme une naissance et comme un engagement qui les entraîne malgré eux.

« Ne t’eussai-je vue que ce premier instant, c’en était déjà fait, il était trop tard pour pouvoir jamais t’oublier ». La Nouvelle Héloïse

Dominique Fernandez disait « un roman d’amour, c’est l’art de faire vivre dans le temps l’illumination de la première découverte…, il s’agit de concilier le temps – extase et le temps-durée, de décrire comment l’expérience transforme la stupeur initiale »

La construction d’un modèle

L’effet, l’échange et le franchissement.

L’accent est souvent mis avec force sur l’effet et ses composantes : surprise, soudaineté, saisissement dont on souligne les contradictions : agitation, envahissement brusque, transport, désordre mais aussi stupeur et paralysie.

Pour l’essentiel, la scène est immobile : une longue contemplation extasiée qui ne manifeste aucune action extérieure.

Mais il n’y a pas de rencontre sans un minimum d’échange « elle me regarda à son tour… mais détourna les siens en rougissant un peu ». Echange muet, langage non verbal, don puis retrait du regard, indices qui répondent à des indices, le sens incertain de la réponse qui fera par la suite le tourment du héro. Il ne sait rien d’elle, puisque souvent, il ignore jusque son nom.

Toute cette de rencontre est par définition incomplète puisqu’elle appelle une suite qui peut être immédiate ou différée, positive ou négative : le manque est d’ailleurs flagrant et fortement ressenti.

La mise en place de la scène de rencontre est primordiale. L’importance est donc dans la situation initiale de lieu, de temps, de circonstances, d’âges. Il faut également préter attention aux positions des personnages l’un par rapport à l’autre : proximité ou éloignement, immobilité ou mouvement, isolement ou présence de tiers, approche libre ou barrée.

Le portrait fait des personnages peut également être plus ou moins lacunaire. Puis l’apprentissage du nom « les personnages demeurent inexistants aussi longtemps qu’ils ne sont pas baptisés ».

Ce qu’on peut qualifier d’ étape finale dans la scène de rencontre est le franchissement, c'est-à-dire l’annulation des distances qui est par définition toujours interposée. Selon les positions des personnages, il leur sera plus ou moins aisé de se rapprocher. Contact physique, symbolique ou parlé les modalités du franchissement sont donc multiples : dans certains cas, la première vue peut coïncider avec la première discussion.

Les personnages qu’un romancier appelle à se rencontrer sont normalement séparés, on le sait, par un espace qui les tient à distance, cette distance sera-t-elle franchie, quand et comment ? La logique de la situation et des dispositions veut qu’elle le soit difficilement, le plus souvent loin en aval de la scène inaugurale pour le meilleur, ou pour le pire, ou pour rien du tout.

La scène de la rencontre provoque trois réalisations fortes qui indiquent une expansion maximale : fascination ; commotion ; mutation.

a) La fascination est le degré élevé de l’étonnement : elle se traduit soit par une paralysie momentanée, soit par le silence de la parole bloquée. Cette paralysie peut se présenter sous sa forme bénigne « soudain je m’arrêtais » (Proust), ou aigue comme souvent dans la Comédie humaine «

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